Testament manuscrit, clause bénéficiaire d’un contrat-assurance vie : attention à la rédaction au profit de vos héritiers !

Publié le 22/06/2021 Vu 2 801 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

Lorsqu’un membre de la famille décède, ce dernier lègue une partie de son patrimoine au reste des membres. Si ce dernier n’a pas expressément désigné ses héritiers, des conflits peuvent alors naître lors de la répartition du patrimoine.

Lorsqu’un membre de la famille décède, ce dernier lègue une partie de son patrimoine au reste des membres

Testament manuscrit, clause bénéficiaire d’un contrat-assurance vie : attention à la rédaction au profit de vos héritiers !

Le partage de la succession se divise en théorie en deux parts distinctes :

  • La réserve héréditaire : c’est la part réservée de droit aux héritiers réservataires, c’est-à-dire aux enfants ou au conjoint restant. Elle représente la majeure partie de la succession (la moitié pour un enfant, 2/3 pour deux enfants, 3/4 pour trois enfants et plus).
  • La quotité disponible : c’est la part restante du patrimoine qui est divisée selon les volontés du défunt, notamment par le biais de la rédaction d’un testament olographe. 

Il n’est pas possible, sauf en cas de renonciation à la succession ou de qualification de l’héritier indigne, de priver un héritier réservataire de son droit à la succession en droit français.

Il est en revanche possible d’avantager un héritier ou un tiers en lui attribuant la quotité disponible.

Les termes employés lors de la rédaction d’un testament sont donc particulièrement importants notamment pour désigner les personnes qui bénéficieront de la quotité disponible.

Dans une affaire récemment soumise à la Cour de cassation, la défunte était mère de deux enfants et grand-mère d’une petite-fille. Elle avait souscrit une assurance-vie, par le biais de sa fille qui était sa tutrice, dont les bénéficiaires se trouvaient être « les héritiers ». Le testament, rédigé par la défunte et ultérieur à la souscription de cette assurance-vie, désignait les ayants-droits de la quotité disponible comme étant sa fille (une de deux héritiers réservataires) et sa petite-fille (non héritier réservataire).

Le fils exclu de la quotité disponible, et père de la petite-fille, se pourvoit alors en cassation contre la décision de la Cour d’appel qui avait jugé que le terme « héritier » ne renvoyait pas seulement aux légataires universels ou héritiers réservataires mais bien aussi aux héritiers testamentaires.

L’article L132-8 du Code des assurances prévoit ainsi que :

Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l'assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés.

Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l'assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui, sans être nommément désignées, sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l'exigibilité du capital ou de la rente garantis.

Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaires des personnes suivantes :

  • les enfants nés ou à naître du contractant, de l'assuré ou de toute autre personne désignée ;
  • les héritiers ou ayants droit de l'assuré ou d'un bénéficiaire prédécédé.

L'assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l'exigibilité.

Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l'assurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession. […]

La compagnie d’assurances a considéré que les bénéficiaires déterminés étaient constitués des deux enfants de la personne décédée dans la proportion de 2/3 du montant total et de 1/3 réparti entre la fille et la petite fille au titre des ayants-droits.

L’indemnisation de l’assureur respectait bien la proportion des parts héréditaires et de la quotité disponible.

Sur la question du terme « héritiers » et les personnes effectivement désignées, la Cour de Cassation indique que la volonté de la défunte doit être recherchée :

5. Pour identifier le bénéficiaire désigné sous le terme d’« héritier », qui peut s’entendre d’un légataire à titre universel, il appartient aux juges du fond d’interpréter souverainement la volonté du souscripteur, en prenant en considération, le cas échéant, son testament.

6. Après avoir relevé que G...  K...  avait, par testament olographe désignant ses héritiers et précisant la part revenant à chacun d’eux, formalisé ses volontés avant son placement en tutelle et la souscription en son nom du contrat d’assurance sur la vie, et souverainement apprécié la volonté de la défunte, la cour d’appel a pu en déduire que le capital garanti devait être réparti entre les héritiers légaux et les légataires à titre universel de G...  K... .

7. Le moyen n’est donc pas fondé.

Ainsi, la volonté de la défunte doit s’apprécier notamment au regard du testament qu’elle a elle-même rédigé. Etant précisé que ses héritiers légaux étaient sa fille et sa petite-fille et que l’assureur a bien respecté les parts de chaque légataire universel, le terme « héritiers » ne peut limiter les bénéficiaires de cette assurance-vie au simple légataire universel. 

En formalisant ses choix par voie de testament olographe, la volonté de la défunte a pu être recherchée afin de répartir le capital de son assurance-vie entre ses légataires universels et ses héritiers légaux.

Ainsi, la rédaction d’un testament est particulièrement scrutée par les juges afin de définir la clé de répartition du patrimoine en cas de succession.

Je suis à votre disposition pour vous assister dans cette rédaction, aux côtés, le cas échéant, de votre notaire.

Mathieu WEYGAND,
Avocat

Vous avez une question ?

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.