L’abus du droit d’agir en justice / Sanctions

Publié le 17/12/2017 Vu 18 073 fois 0
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Tout citoyen a le droit de saisir le juge et d’être entendu sur le fond d’une prétention afin que ce dernier la dise bien ou mal fondée. L’action en justice est libre, des garanties ayant été mises en place pour en assurer l’effectivité. Le principe de liberté d’ester en justice connaît néanmoins une limite dans la notion d’abus du droit d’agir. L’action en justice peut constituer une faute causant préjudice à autrui et ouvrant doit à réparation et, éventuellement à une sanction pénale.

Tout citoyen a le droit de saisir le juge et d’être entendu sur le fond d’une prétention afin que ce der

L’abus du droit d’agir en justice / Sanctions

1- Le principe

Tout citoyen a le droit de saisir le juge et d’être entendu sur le fond d’une prétention afin que ce dernier la dise bien ou mal fondée. L’action en justice est libre, des garanties ayant été mises en place pour en assurer l’effectivité.

Le principe de liberté d’ester en justice connaît néanmoins une limite dans la notion d’abus du droit d’agir.

L’action en justice peut constituer une faute causant préjudice à autrui et ouvrant doit à réparation et, éventuellement à une sanction pénale.

2- Les sanctions civiles

Sur le plan civil, l’auteur de l’abus risque de payer une amende civile et de verser à son adversaire une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l’abus.

Ainsi, l’article 32-1 du Code de procédure civile prévoit que : « Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés. »

Cette sanction suppose l’existence d’une faute susceptible de faire qualifier en abus l’exercice du droit d’ester en justice (3e Civ., 11 juillet 2012, pourvoi n° 10-21.703).

Selon la Cour de cassation, l’abus est qualifié en présence d’ « un acte de malice ou de mauvaise foi, ou s’il s’agit d’une erreur équipollente au dol » (2e Civ., 6 novembre 1974, pourvoi n° 73-12.650, Bull. 1974, II, n° 283). Il s’agit, à titre d’exemple :

  • De l’exercice d’une action au mépris des conditions de recevabilité expressément prévues par la loi (Com., 12 janvier 1976, pourvoi n° 74-13.386, Bull. 1976, IV, n° 16). Néanmoins, l’erreur sur le fondement juridique de la demande ne constitue pas, à elle seule, une faute (2e Civ., 18 décembre 2003, pourvoi n° 01-16.617, Bull. 2003, II, n° 402).
  • Du fait d’intenter une action, en première instance et en appel, sans disposer de la moindre preuve de son bien-fondé (3e Civ., 18 octobre 2006, pourvoi n° 05-15.179).

Il est ainsi nécessaire de s’informer préalablement sur les chances de succès de l’action envisagée.

3- Les sanctions pénales

Des dispositions particulières du Code pénal répriment des agissements tendant à instrumentaliser la justice par la production de faux documents, de faux témoignages, ou autres manœuvres frauduleuses.

Concernant les preuves écrites : L’article 441-1 du code pénal prévoit et réprime le faux qui a « pour objet ou peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques ».

Concernant les témoignages : L’article 434-11 du code pénal punit l’abstention de témoigner pour un innocent.

L’article 434-13 dispose : « Le témoignage mensonger fait sous serment devant toute juridiction ou devant un officier de police judiciaire agissant en exécution d’une commission rogatoire est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. »

L’article 434-15 réprime la subornation, même non suivie d’effet (le fait d’user de promesses, offres, présents, pressions, menaces, voies de fait, manœuvres ou artifices au cours ou en vue d’une procédure afin de déterminer autrui soit à faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère, soit à s’abstenir de faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation).

Concernant les preuves matérielles : Selon l’article 434-4 du code pénal : « est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait, en vue de faire obstacle à la manifestation de la vérité : 1° De modifier l’état des lieux d’un crime ou d’un délit soit par l’altération, la falsification ou l’effacement des traces ou indices, soit par l’apport, le déplacement ou la suppression d’objets quelconques ; 2° De détruire, soustraire, receler ou altérer un document public ou privé ou un objet de nature à faciliter la découverte d’un crime ou d’un délit, la recherche des preuves ou la condamnation des coupables. Lorsque les faits prévus au présent article sont commis par une personne qui, par ses fonctions, est appelée à concourir à la manifestation de la vérité, la peine est portée à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende ».

Concernant la qualification d’escroquerie au jugement :

Selon l’article 313-1 du code pénal, « l’escroquerie est le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. L’escroquerie est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende ».

Selon la jurisprudence, « si l’exercice d’une action en justice constitue un droit, sa mise en œuvre peut constituer une manœuvre frauduleuse caractérisant le délit d’escroquerie ». (Crim., 22 mai 1968, pourvoi n° 67-92.782, Bull. crim. 1968, n° 169, p. 409, Gaz. Pal. 1968, 2, p. 225 ; Crim., 7 janvier 1970, pourvoi n° 69-90.114, Bull. crim. 1970, n° 14, p. 30).

Les manœuvres ayant été retenues comme constitutives d’escroquerie au jugement sont notamment :

  • obtention d’une injonction de payer une dette éteinte en produisant une reconnaissance de dette mensongère et en usant de la fausse qualité d’huissier de justice : Crim., 4 juillet 1972, pourvoi n° 71-92.515, crim. 1972, n° 228 ;
  • présentation à un expert judiciaire de documents comptables falsifiés pour les besoins de la cause : Crim., 14 mars 1972, pourvoi n° 71-91.077, crim. 1972 ;
  • production d’un reçu d’une somme supérieure à celle qui a été remise : Crim., 27 janvier 1977, pourvoi n° 76-91.078, crim. 1977 ;
  • présentation du constat d’huissier qui, sans être intrinsèquement mensonger, ne faisait que relater une mise en scène : Crim., 14 novembre 1979, pourvoi n° 79-90.407, crim. 1979, n° 321 ;
  • la production à un juge des ordres d’un jugement annulé par un arrêt de cour d’appel statuant sur renvoi de la Cour de cassation : Crim., 4 mars 1991, pourvoi n° 90-80.321, crim. 1991, n° 106 ;
  • la production d’une liste de clients, partiellement fictive : Crim., 19 octobre 1993, pourvoi n° 92-83.743 ;
  • la production d’un faux contrat de travail : Crim., 30 novembre 1995, pourvoi n° 94-84.612 ;
  • la production de factures fictives correspondant à une dette effective, mais obtenues de façon telle que le créancier a usé de moyens dolosifs privant le débiteur de son libre arbitre : Crim., 30 octobre 1996, pourvoi n° 94-86.042 ;
  • la prétention mensongère selon laquelle une marchandise n’a pas été livrée : Crim., 24 septembre 1996, pourvoi n° 94-84.528 ;
  • la production de fausses reconnaissances d’honoraires établies par l’épouse du prévenu : Crim., 26 mars 1998, pourvoi n° 96-85.636, crim. 1998, n° 117 ;
  • diverses manipulations destinées à tromper un expert judiciaire : Crim., 6 septembre 2000, pourvoi n° 99-87.547 ;
  • l’affirmation d’une expérience commerciale, pour convaincre les juges d’accéder à une offre de reprise partielle d’activité dans le cadre d’une procédure de redressement judiciaire : Crim., 11 janvier 2006, pourvoi n° 05-82.530.
    La chambre criminelle de la Cour de cassation admet que la seule production en justice d’un document mensonger suffit à réaliser la tentative d’escroquerie au jugement (Cass. Crim., 3 juin 2004).

Dans le cadre d’un litige en cours ou futur, il est important de ne pas négliger le rôle capital de l’avocat, à l’occasion de la défense de vos intérêts en demande comme en défense afin de se prémunir contre de tels risques.

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