Savoir sécuriser la rupture conventionnelle du contrat de travail

Publié le 30/12/2014 Vu 9 349 fois 0
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Si la rupture conventionnelle permet de rompre aisément le contrat de travail, ce dispositif nécessite de s’entourer des plus grandes précautions, pour éviter un refus d’homologation et une remise en cause de la convention.

Si la rupture conventionnelle permet de rompre aisément le contrat de travail, ce dispositif nécessite de sâ

Savoir sécuriser la rupture conventionnelle du contrat de travail

1/ Respecter le calendrier de procédure

Les erreurs de délai et de date figurent parmi les motifs de refus d’homologation les plus fréquents.

Rappelons que la signature de la rupture conventionnelle fait naître un premier délai de 15 jours calendaires pour l’exercice du droit de rétractation (C. trav. art. L. 1237-13, al. 3).

La notion de jours « calendaires » implique que chaque jour de la semaine est comptabilisé ; le délai démarre au lendemain de la date de signature de la convention de rupture et se termine au quinzième jour à 24 heures (Circ. DGT n° 2008-11 du 22 juillet 2008).

Attention : si le délai de rétractation expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (C. trav. art. R. 1231-1). Il est donc nécessaire de vérifier le calendrier civil dans le décompte du délai de rétractation.

Une fois le délai de rétractation expiré, la convention de rupture peut être déposée ou envoyée à la Direccte en vue de l’homologation.

La Direccte dispose alors d’un délai de 15 jours ouvrables, à compter de la réception de la demande, pour homologuer la convention de rupture (C. trav. art. L. 1237-14, al. 2).

Afin de calculer ce délai, il convient d’inclure tous les jours de la semaine, sauf le dimanche et les jours reconnus fériés par la loi et habituellement chômés. Ce délai commence à courir le lendemain du jour ouvrable de réception de la demande d’homologation. Il expire au dernier jour ouvrable d’instruction, à 24 heures (Circ. DGT n° 2008-11 du 22 juillet 2008).

Comme pour le délai de rétractation, lorsque le délai d’homologation expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (C. trav. art. R. 1231-1).

Attention : Les parties doivent soigneusement calculer ce délai d’homologation au regard de la date envisagée de la rupture du contrat de travail, sous peine de refus d’homologation de la convention de rupture. En effet, la date de rupture du contrat de travail « ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation » (C. trav. art. L. 1237-13, al. 2).

2/ Verser une indemnité de rupture suffisante

Selon l’article L. 1237-13, alinéa 1er du Code du travail, l’indemnité de rupture ne peut être inférieure à l’indemnité « prévue à l’article L. 1234-9 », c’est-à-dire à l’indemnité légale de licenciement.

L’indemnité légale est due au salarié comptant au moins un an d’ancienneté, et son taux est égal à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de 10 ans d’ancienneté (C. trav. art. R. 1234-2).

Selon l’administration, si le salarié a moins d’une année d’ancienneté, l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle lui est due « au prorata du nombre de mois de présence » (Circ. DGT n° 2009-04 du 17 mars 2009).

Certaines juridictions n’ont pas suivi cette position de l’administration (ex. CA Bordeaux 22 mai 2012 n° 11-5856), estimant que le montant de l’indemnité de rupture, applicable au salarié ayant moins d’un an d’ancienneté au moment de l’homologation, peut être égal à zéro

Cela étant, il est vivement conseillé de retenir la position de l’administration, pour éviter un refus d’homologation. Par conséquent, si le salarié a moins d’un an d’ancienneté, il faut calculer son indemnité de rupture conventionnelle au prorata.

Enfin, dans toutes les entreprises couvertes par l’avenant du 18 mai 2009 à l’ANI du 11 janvier 2008, le montant de l’indemnité de rupture ne doit pas être inférieur au montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement lorsque cette dernière est supérieure à l’indemnité légale.

Rappelons que tous les employeurs sont soumis à l’avenant, à l’exception des professions agricoles, des professions libérales, du secteur de l’économie sociale et du secteur sanitaire et social et, enfin, du particulier-employeur (qui sont en dehors du champ de l’avenant).

NB. Les formulaires prévoient que l’indemnité doit être mentionnée en « brut », et il convient de la déterminer (i) en fonction de l’indemnité nette négociée et (ii) des CSG/CRDS et cotisations applicables.

3/ Tenir compte de la situation du salarié

A titre préalable, il importe de rappeler que la procédure de la rupture conventionnelle est distincte selon que le salarié est protégé ou non.

Ainsi, pour les salariés protégés, l’employeur doit suivre la procédure spécifique d’autorisation auprès de l’inspecteur du travail et utiliser le formulaire Cerfa n°14599*01 au lieu du Cerfa n° 14598*01.

Par ailleurs, la rupture conventionnelle est parfois risquée, lorsque le salarié est dans une situation de protection : maternité, inaptitude, accident du travail ou maladie professionnelle,...

Depuis un arrêt du 30 septembre 2014 (Cass. soc. 30 septembre 2014, n° 13-16.297), il est possible de conclure une rupture conventionnelle en cas de suspension du contrat de travail pour accident du travail.

Si la solution devrait s’appliquer aux autres cas de protection du salarié, il n’en reste pas moins que le risque de remise en cause de la rupture conventionnelle est important dans ces situations particulières.

Il est donc fortement conseillé de prendre des mesures de protection pour sécuriser la rupture conventionnelle conclue dans un contexte sensible.

Exemples :

- Demander au salarié de solliciter la rupture conventionnelle par écrit, en faisant ressortir les motifs personnels qui motivent sa demande (réorientation professionnelle, projets personnels,…).

- Convoquer le salarié à un ou des entretiens préalables, en lui rappelant la possibilité d’être assisté, même si ces convocations sont simplement facultatives.

4/ Etablir une convention annexe

Si la rupture conventionnelle doit être obligatoirement matérialisée sur un formulaire Cerfa, les parties ne sont pas juridiquement contraintes d’établir une convention annexe.

Toutefois, en pratique, l’établissement d’une telle convention s’impose puisque toutes les conséquences de la rupture du contrat de travail doivent être réglées (C. trav. art. L 1237-13, al. 1er) :

- Le droit individuel à la formation (ou compte personnel de formation) ;

- la portabilité des garanties complémentaires santé / prévoyance ;

- la levée de la clause de non-concurrence ;

- la restitution du matériel confié au salarié ;

- l’insertion d’une clause de confidentialité ou de non-dénigrement ;

- le remboursement de frais éventuels,…

La convention distincte présente aussi d’autres intérêts :

- régler la situation du salarié pendant la procédure (dispense d’activité, payée ou non, prise de congés payés...) ;

- déterminer le montant net de l’indemnité de rupture, puisque les formulaires Cerfa commandent d’indiquer un montant brut.

A défaut d’informer le salarié sur l’étendue de ses droits, celui-ci peut prétendre à des dommages-intérêts, comme plusieurs décisions ont pu le juger (ex. CA Rouen 27 avril 2010, n° 09-4140 en matière de DIF).

Il est donc nécessaire d’apurer l’ensemble de la situation contractuelle.

5/ Prévenir un litige

La rupture conventionnelle n’est pas une transaction et ne peut valablement avoir pour objet ou pour effet de régler un différend entre les parties.

D’ailleurs, les Direccte sont conduites à refuser leur homologation, si une convention annexe mentionne que le salarié renonce à tout litige.

Cette situation est logique car seule une transaction, postérieure à la rupture du contrat de travail et assortie d’une indemnité transactionnelle, permet de mettre fin à un litige.

Face à ce risque de litige, les parties peuvent sécuriser la rupture conventionnelle en adoptant les mesures suivantes dans la convention annexe :

- lister les éléments du solde de tout compte et indiquer que le salarié s’estime rempli de ses droits ;

- rappeler le régime social et fiscal de l’indemnité de rupture ;

- rappeler les différés d’indemnisation Pôle Emploi (« délais de carence ») ;

- mentionner le motif pour lequel le salarié a voulu la rupture conventionnelle (cf. ci-dessus, § 3),...

Toutes ces précautions permettent de limiter une remise en cause de la rupture conventionnelle, notamment sur le fondement d’un vice du consentement.

Xavier Berjot

Avocat Associé

OCEAN AVOCATS

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