Les faits : Dans le contexte des interactions sociales contemporaines, un geste apparemment anodin comme danser un slow peut soulever des interrogations juridiques complexes. Il y a une vidéo de Canal+ disponible sur les réseaux, dans lequel un viel homme est l’objet d’une plainte pour avoir danser du slow avec une dame, il y a de 53 ans. Ladite vidéo est accompagnée de cette phrase : « Attention !!! si vous aviez eu des occasions de danser des slows dans le passé vous n’êtes pas à l'abri d’une plainte. En tout cas ! » Au-delà de la complication de la preuve et de la temporalité, les allégations d’agression sexuelle, même anciennes, sont prises très au sérieux, notamment dans le contexte du mouvement #MeToo. Toutefois, cela soulève une interrogation surprenante : le slow, ce geste de proximité et de galanterie, pourrait-il un jour être source de litiges ou de plaintes juridiques ? Autrement dit, le simple fait d’avoir dansé un slow dans le passé, même dans un cadre festif et consensuel, pourrait-il exister comme argument dans un différend ultérieur ?
Le Droit : Le message diffusé dans ladite vidéo adopte une tonalité hyperbolique destinée à alerter sur d’éventuelles dérives dans les interactions sociales. En droit, il n’existe pas de législation spécifique visant la simple pratique du slow. Ce qui compte, c’est d’établir, en cas de litige, le contexte de la rencontre, l’état d’esprit (souvent influencé par l’alcool, par exemple) et surtout la nature exacte du contact. Tant que les mouvements restent dans le cadre de ce que les deux parties ont compris et accepté, il est peu probable qu’une plainte trouve une assise juridique solide. En revanche, si l’un des partenaires se sent lésé par un excès de zèle ou par des gestes non désirés qui auraient dépassé les limites du consentement, alors une plainte pourrait être envisagée, mais dans ce cas, c’est bien le comportement abusif et non le simple fait d’avoir dansé qui serait remis en cause.
Ainsi, le droit congolais requiert une analyse circonstanciée des faits et distingue nettement un geste isolé, même maladroit, d’un comportement répétitif caractérisé par une absence de consentement. Dès lors, une plainte pour harcèlement sexuel ne peut être fondée que sur la persistance d’actes à connotation injurieuse et oppressante, conformément à l’article 174 du Code pénal modifié par la loi n°06/018 du 20 juillet 2006. Historiquement, la pratique du slow s’inscrivait dans un rituel codifié : l’invitation à danser symbolisait un échange social empreint de respect et de courtoisie, où le consentement tacite des deux partenaires était présumé. Ce cadre permettait d’accepter certains contacts physiques inhérents à la danse, sans que ceux-ci ne puissent être interprétés comme agressifs. L’invitation, dans ce contexte, relevait d’une interaction conviviale et n’était pas de nature à justifier une qualification pénale.
Cependant, lorsque la gestuelle s’écarte des normes de bienséance - par exemple, en dépassant les limites initialement tacites d’un contact -, le geste peut donner lieu à des interprétations divergentes, notamment en cas de comportement répété. Il sera dès lors nécessaire de démontrer que le contact n’était pas seulement consensuel mais qu’il ne s’est pas transformé en un comportement intrusif ou inapproprié au point de constituer un délit (harcèlement, agression, etc.).
En somme, la transformation potentielle d’un slow en acte de harcèlement sexuel relève d’une zone grise où se mêlent enjeux juridiques et évolutions des mœurs sociales. Conformément au droit congolais, seuls les comportements répétitifs, coercitifs et non consentis peuvent légitimement relever de l’infraction de harcèlement sexuel. Attention donc de ne pas danser le slow – n’importe comment ! Heureusement qu’il est « dépassé, ringard, casseur d’ambiance... et définitivement passé de mode ».
Me Joseph YAV KATSHUNG