Globalement, si ma sœur est fermée a la vente, on sera obligé d'aller au tribunal ?
Vous ne serez jamais obligées d'aller au tribunal (sauf si c'est votre soeur qui vous y amène), vous avez le droit de préférer le statu quo.
Avant de se poser la question du tribunal, il faut définir vos exigences, ce que vous acceptez et ce que vous refusez.
Un exemple d'exigence est que le bien sorte de votre patrimoine, quoi qu'il en coûte.
Un autre exemple d'exigence est que la valeur que vous retirerez du bien dans la solution qui sera mise en œuvre doit être plus ou moins conforme à sa valeur du marché, et pas au rabais.
En comprenant que certaines exigences peuvent être incompatibles.
Pour illustrer, on va supposer que le bien vaut 200000€ selon le marché, que votre mère a 75 ans. Si on prend le barème fiscal de l'usufruit, l'usufruit de votre mère vaut 30% = 60000€, et la nue-propriété vaut 140000€, la part de nue-propriété de votre mère (50%) valant 70000€, et celle de chaque enfant (25%) valant 35000€. Le total des droits de votre mère vaut donc 130000€.
Avant d'aller au tribunal, il y a des choses à tenter, et on ne sait pas si vous les avez tentées.
Avez-vous tenté de proposer de racheter les droits de votre sœur ? Pour la valeur du marché 35000€ ? Pour une valeur beaucoup plus alléchante 50000€ ? 70000€ ? Quelle est votre limite acceptable ? Si un tel rachat de sa part se fait, vous pouvez ensuite vendre le bien sans votre sœur, puisqu'elle ne sera plus ayant-droit. Mais peut-être refusera-t-elle de vendre peu importe le prix, car son objectif est de conserver le bien.
Avez-vous tenté de proposer de vendre vos droits à votre sœur ? Pour la valeur du marché 35000€ vous concernant, et 130000€ concernant votre mère ? Pour une valeur beaucoup plus faible 25000€ pour vous, 90000€ pour votre mère ? Quelles sont vos limites acceptables dans une perte ? Mais peut-être refusera-t-elle d'acheter, car elle n'a pas les fonds, même en bradant vos droits.
Avez-vous tenté de trouver une société spécialisée dans le rachat de parts (mais à bas prix, il ne faut pas se leurrer), ou un marchand de biens, voire un acquéreur lambda ? Ce type de société s'occupe ensuite des procédures judiciaires de partage conduisant à la licitation, à laquelle elles participent, puisque leur objectif est de faire de la plus-value en revendant le bien acquis aux enchères à bas prix. Il est certain que cette solution est incompatible avec une exigence de récupération de la valeur du marché de vos parts.
Si toutes ces solutions ne fonctionnent pas, il ne reste que les voies judiciaires.
J'ai déjà donné la voie de la vente "normale" autorisée par le juge en cas de mise en péril de l'intérêt commun (815-5 alinéa 1er). Je doute qu'une telle voie réussisse. Le bien risque-t-il une perte de valeur majeure du seul fait qu'il ne soit pas vendu à court terme ?
La seule autre voie judiciaire qui reste est celle de l'assignation en partage de l'indivision en nue-propriété, puisque l'autre processus d'autorisation judiciaire de vente à la majorité des 2/3 des droits indivis est impossible à cause du démembrement (usufruit). L'assignation en partage conduit à la licitation (vente aux enchères) du bien si aucun partage en nature n'est possible. La licitation risque de conduire à un prix d'adjudication qui sera sans doute assez inférieur à la valeur du marché. Acceptez-vous ce risque ?
Notez que si votre mère fait une renonciation (translative) à l'usufruit, l'indivision devient en pleine propriété, et avec 75%, vous avez la majorité des 2/3 des droits indivis, permettant d'actionner l'autre processus (mais qui se traduira par une licitation, vente aux enchères, avec un prix d'adjudication qui sera pareillement inférieur à la valeur du marché).
Mais parfois la simple réception d'une assignation au tribunal permet de débloquer les choses (voir le cas de Chrysoprase) et de faire accepter la vente amiable, coupant court au processus judiciaire. Tout dépend donc du réel degré de fermeture de votre sœur. Et on a le droit d'abandonner une instance judiciaire.
Dans la perspective d'une licitation, une question à se poser est celle de sa capacité à participer aux enchères, en vue de récupérer le bien aux enchères, puis le revendre au prix normal. Si on en est capable, ce peut être un bon plan. Sinon, on encourt des pertes.
En conclusion, la question n'est pas simplement "est-ce que le tribunal est obligatoire ?", mais est aussi celle des conséquences acceptables pour vous.
Voir un avocat est effectivement une bonne solution, ne serait-ce que pour établir une stratégie.