L’ACTION PAULIENNE CONTRE LE DEBITEUR FRAUDEUR

Publié le 20/02/2018 Vu 38 256 fois 0
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Dans le dessein d’échapper aux voies d’exécution ou aux poursuites de ses créanciers ( ex saisies sur ses biens ), un débiteur serait tenter de se rendre insolvable ou de diminuer la valeur de son patrimoine . Ainsi en s'appauvrissant par la sortie frauduleuse d’un bien ou d’une somme d’argent, il s’exposerait aux affres de l’action paulienne. (Du latin Paulianus et de Paulus , l'action vise le surnom porté par le prêteur romain qui institua cette action judiciaire). Il sera intéressant de rappeler les grands principes liés à cette action

Dans le dessein d’échapper aux voies d’exécution ou aux poursuites de ses créanciers ( ex saisies sur s

L’ACTION PAULIENNE CONTRE LE DEBITEUR FRAUDEUR

 I- Présentation de l'action Paulienne 

 A) Présentation et analyse de l'action

Aux termes de l'article 1341-2 du Code civil:

"Le créancier peut aussi agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d’établir, s’il s’agit d’un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude."

Cette définition plus claire et modernisée prend en compte l’évolution jurisprudentielle principalement quant à la sanction liée à l’inopposabilité paulienne.

Cette action, permet aux créanciers agissant à titre personnel de faire sanctionner des actes découverts consentis en fraude de leurs droits, voire de poursuivre leur action envers les héritiers acceptant d'un de cujus, débiteur.

Tous les  types de créanciers sont concernés  même les créanciers dits chirographaires.

Cependant il faut se référer à la jurisprudence antérieure pour découvrir les contours de l'action.

On relèvera principalement la notion de fraude, d'appauvrissement du débiteur et d'impossibilité pour le créancier d'exercer son action.

La loi affirme la connaissance de la fraude dans le cadre des actes onéreux.

Pour rappel l’ancien article 1167 du Code civil,  était plus abscons en ce qu'il disposait: « Les créanciers sont autorisés à attaquer, en leur nom personnel, les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits. »

L'objet de l'action  n'est donc pas de faire disparaître, les effets d'un acte de disposition par exemple passé entre leur débiteur et un tiers, mais de  sanctionner ces "parties" pour le préjudice causé.

Dans  la majorité des cas, il s'agit de permettre au créancier tiers à l'acte litigieux, de faire réintégrer dans le patrimoine de son débiteur des biens que celui-ci avait cédé ou donné à un tiers, souvent complice, c'est à dire de  sanctionner à la fois le débiteur qui a organisé son insolvabilité et le tiers qui a acquis son bien en toute connaissance du préjudice causé.

Ce créancier pourra  ainsi agir aussi contre le bénéficiaire de l'acte litigieux; indépendamment de sa bonne ou mauvaise foi.

B) La fraude paulienne suppose qu'une dette certaine soit soustraite par un acte onéreux ou gratuit du patrimoine du débiteur en fraude des droits du créancier.

C'est ce que rappelle   1 ère Civ, 16 mai 2013, pourvoi n°12-13.637 en cassant un arrêt d'appel.

Il n’y aura aussi pas la nécessité de constituer une sûreté antérieure pour agir Cass 1ère Civ, 4 janvier 1995, pourvoi no 97-17.908.

L'objet de l'action  n'est pas de faire disparaître, les effets d'un acte de disposition passé entre leur débiteur et un tiers, mais de  sanctionner ces "parties" pour le préjudice causé.

En effet, dans la majorité des cas, l'action paulienne  aura pour but de permettre au créancier tiers à l'acte litigieux, de faire réintégrer dans le patrimoine de son débiteur un ou des biens que celui-ci avait cédé ou donné à un tiers, souvent complice, c'est à dire de  sanctionner à la fois le débiteur qui a organisé son insolvabilité et le tiers qui a acquis son bien en toute connaissance du préjudice causé.

Ce créancier pourra  même agir contre le bénéficiaire de l'acte litigieux; indépendemment de sa bonne ou mauvaise foi .

C) Elle suppose  une  créance certaine dans son principe et antérieure à l’acte frauduleux.

1ère Civ, 12 décembre 2006, pourvoi n° 04-11.579

La fraude paulienne peut être réalisée par tout acte dont il résulte un appauvrissement du débiteur, elle  résulte de la seule connaissance que le débiteur et son cocontractant ont du préjudice causé au créancier par l’acte litigieux, la cour d’appel a violé les articles 1351 et 1167 (ancien)  du Code civil.

L'objet de l'action  n'est pas de faire disparaître, les effets d'un acte de disposition passé entre leur débiteur et un tiers, mais de  sanctionner ces "parties" pour le préjudice causé.

En effet, dans la majorité des cas, l'action paulienne  aura pour but de permettre au créancier tiers à l'acte litigieux, de faire réintégrer dans le patrimoine de son débiteur un ou des biens que celui-ci avait cédé ou donné à un tiers, souvent complice, c'est à dire de  sanctionner à la fois le débiteur qui a organisé son insolvabilité et le tiers qui a acquis son bien en toute connaissance du préjudice causé.

Ce créancier pourra  même agir contre le bénéficiaire de l'acte litigieux; indépendemment de sa bonne ou mauvaise foi .

Elle suppose  une  créance certaine dans son principe et antérieure à l’acte frauduleux.

(Le fait que cette créance soit définitive c’est à dire fixée par un Tribunal, ou liquide n’étant pas une nécessité dans l’action.

1 ère Civ, 5 juillet 2005 pourvoi n° 02-18722.

D) Eléments constitutifs

1°) l’élément matériel : Le créancier, devra prouver l’élément matériel constitutif de la  fraude de son débiteur par tous moyens

-- l’organisation d’une insolvabilité au moins apparente du débiteur ,au jour de l'acte litigieux   1ère Civ, 5 décembre 1995, Bull. n° 443

De ce fait, si à cette date, le débiteur disposait de biens suffisants pour désintéresser le créancier, le préjudice fait défaut.

-- l'évolution vers l'absence de nécessité d’une insolvabilité du débiteur

3ème Civ, 6 octobre 2004, pourvoi n°03-15.392,

« …l’action paulienne est recevable, même si le débiteur n’est pas insolvable, dès lors que l’acte frauduleux a eu pour effet de rendre impossible l’exercice du droit spécial dont disposait le créancier sur la chose aliénée, s’agissant de la vente ou de la donation d’un bien.. » Toute pièce qui ne m’aura pas été communiquée pourrait être écartée des débats

1ère Civ, 8 avril 2009, pourvoi n° 08-10.024,

" L’action paulienne peut être accueillie indépendamment de toute exigence d’insolvabilité du débiteur lorsque l’acte critiqué rend frauduleusement inefficace un droit particulier dont est investi le créancier sur des biens particuliers de celui-ci"

Com, 1 mars 1994 pourvoi N° 92-15.425 pour une action paulienne d'un créancier liée à la  cession, consentie à un prix normal, mais  a  pour effet de faire échapper le bien à ses poursuites en le remplaçant par des fonds plus facilement dissimulables et plus difficiles à obtenir.

"Mais attendu que le créancier dispose de l'action paulienne lorsque la cession, bien que consentie au prix normal, a pour effet de faire échapper un bien à ses poursuites en le remplaçant par des fonds plus aisés à dissimuler et, en tout cas, plus difficiles à appréhender ; qu'en énonçant d'abord que la société dont M. X... était le gérant avait favorisé sciemment l'évasion du seul élément d'actif garantissant la créance fiscale en y substituant une somme d'argent facile à dissimuler, puis que Mme X... ne pouvait avoir ignoré la fraude commise par son mari, ayant été nécessairement consciente de l'opération et des fins poursuivies, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;"

2°)  L'élément intentionnel : De l'intention de nuire réduite à la simple connaissance du préjudice causé au créancier...

La fraude paulienne n'implique pas forcément une intention de nuire, mais peut résulter de la seule connaissance que le débiteur a du préjudice causé à son créancier ; c’est la mauvaise foi.

L’article 1341-2  du code civil affirme désormais cette condition de l’action , à charge d’établir, s’il s’agit d’un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude.

A contrario cette condition n’est pas nécessaire pour un acte à titre gratuit.

Com, 14 novembre 2000, Bull. n° 173

Pour accueillir une action en inopposabilité d’une donation-partage au visa de 1167 du code civil  les juges du fond ont retenu que le débiteur  ne pouvait ignorer qu'il portait ainsi atteinte aux droits de son créancier en diminuant de manière notable les biens qui pouvaient répondre de ses engagements.

Le  débiteur qui a agi en toute connaissance de cause pour causer préjudice au regard du remboursement de sa  créance risquera d’être sanctionné au visa de l’article 1167 du code civil.

1ère  Civ, 5 juillet 2005, BICC n°628 1er nov. 2005, N° 2009,

1ère  Civ, 13 décembre 2005, BICC 637 1er avril 2006

1ère Civ, 12 décembre 2006, pourvoi n° 04-11.579

La fraude paulienne peut être réalisée par tout acte dont il résulte un appauvrissement du débiteur, elle  résulte de la seule connaissance que le débiteur et son cocontractant ont du préjudice causé au créancier par l’acte litigieux, la cour d’appel a violé les articles 1351 et 1167 du Code civil.

E)   Les actes concernés

1°- A titre gratuit: ex donation simple en propriété , de droit démembré ou donation partage

1ère Civ, 8 avril 2009, pourvoi n° 08-10.024, précité pour une donation d’usufruit

1ère Civ, 6 mai 2003, pourvoi n° 00-20976,

Com, 14 novembre 2000, précité Bull. n° 173 , 1ère Civ, 16 mai 2013 

1ère Civ, 10 avril 2013,  pourvoi n°12-12174  a jugé que : la  fraude paulienne peut être effectuée par le biais d'une donation , si bien que le  débiteur, en se dessaisissant par le biais d'une donation des seuls biens de valeur susceptibles de lui permettre de payer sa dette, ne peut ignorer le préjudice causé à son créancier : cela suffisant à caractériser la fraude paulienne.

« ayant, d'abord, souverainement estimé que la donation en nue-propriété critiquée portait sur l'ensemble des actifs patrimoniaux des donateurs, en sorte qu'elle avait provoqué ou accru l'insolvabilité de ces derniers, et, ensuite, relevé, par motifs propres et adoptés, que M. Y. , en se dessaisissant des seuls biens de valeur susceptibles de lui permettre de payer sa dette, ne pouvait ignorer le préjudice causé à son créancier, la cour d'appel, sans inverser la charge de la preuve, a caractérisé la fraude paulienne et, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision"

Cass. 1ère Civ, 15 janvier 2015, pourvoi n° 13-21.174 a jugé dans le cadre d’une donation partage faite à l’épouse et à son enfant que :

"l'inopposabilité paulienne autorise le créancier poursuivant, par décision de justice et dans la limite de sa créance, à échapper aux effets d'une aliénation opérée en fraude de ses droits".

Rappel: Pour faire révoquer un acte à titre gratuit, l'intention de nuire du débiteur n’est pas exigée : Il suffit que le débiteur ne dispose pas gratuitement de son patrimoine au détriment de ses créanciers.

Ils peuvent faire révoquer rétroactivement une donation, même si le débiteur n'est pas insolvable.

Le bien transmis retourne alors dans le patrimoine du donateur, où le créancier pourra seul éventuellement le saisir.

2°- A titre onéreux, exemple une vente bradée

3°- Des actes difficilement attaquables

Exemple : un partage,  des actes liés à des droits exclusivement rattachés à la personne comme un mariage, une reconnaissance d'enfant naturel…), le paiement d'une dette échue...

L'inopposabilité paulienne n'empêchera pas une action en partage. 1ère Civ, 17 octobre 2012. pourvoi n°11-10.786

2°/ que c’est à la date de la conclusion de l’acte litigieux qu’il convient de se placer pour apprécier l’existence de la fraude paulienne ; qu’en se fondant sur la circonstance inopérante que « M. Eric X... ne prouve pas qu’à la date de ses premières conclusions aux fins d’action paulienne, notifiées et déposées le 29 mai 2008 devant le tribunal de grande instance de Marseille, M. Christian X... était en état d’insolvabilité », au lieu de rechercher comme elle le devait si, à la date du 2 mai 2003, lorsqu’il avait fait donation à ses deux enfants du quart indivis en pleine propriété de l’immeuble (et cédé, à titre de prestation compensatoire, l’autre quart indivis lui appartenant), cédant ainsi la propriété du seul bien immobilier qu’il détenait, le débiteur n’avait pas conscience du préjudice qu’il causait à son frère créancier, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1167 du code civil ;

II- Les conséquences de l'action Paulienne 

A) L’inopposabilité paulienne des actes affectés de fraude pour le créancier poursuivant affirmée désormais dans la Loi par reprise de l'ancienne jurisprudence

Jusqu’en 2006, le créancier qui obtenait gain de cause, voyait "réintégrer" les biens du débiteur dans son patrimoine.

Il  lui appartenait ensuite de faire procéder à la saisie entre les mains de son débiteur.

La jurisprudence avait facilité les choses avec 1ère Civ, 30 mai 2006, pourvoi n° 02-13495 ,

« l'inopposabilité paulienne autorise le créancier poursuivant, par décision de justice et dans la limite de sa créance, à échapper aux effets d'une aliénation opérée en fraude de ses droits afin d'en faire éventuellement saisir l'objet entre les mains du tiers. En ordonnant le retour des sommes données dans le patrimoine du débiteur, la cour d'appel a violé l'article 1167 du Code civil ».

Arrêt confirmé par 1ère Civ, 12 juillet 2006, pourvoi n° 04-20161,

Le  but de l’exercice de l’action paulienne ici n’est pas de faire revenir le bien dans le patrimoine du débiteur mais de permettre la saisie entre les mains de celui qui en est devenu propriétaire frauduleusement.

Le créancier fera comme si l’acte n’existait pas à son encontre.

On parle de l'inopposabilité de l'action paulienne, laquelle  n'aura plus pour effet de réintégrer les biens ou valeurs concernées dans le patrimoine du débiteur, mais permettra au créancier lésé d’agir directement auprès du tiers pour recouvrer le montant (  ex en saisissant le bien).

En effet, si le  juge ordonnait la restitution des sommes ou des biens entre les mains du débiteur, il prendrait le risque  de voir rentrer ces valeurs dans le patrimoine,du débiteur et donc de les rendre  accessibles aux  autres créanciers.

Cela aurait pour conséquence de rendre inefficace et de faire perdre tout intérêt à l’action, au cas où les autres créanciers pourraient tirer bénéfice indirect et injustifié au bout du compte de cette action entreprise par un autre, ( exemple en pouvant saisir les biens concernés dans le patrimoine du débiteur).

C’est pour cela que le créancier aura la possibilité, seul de saisir le compte bancaire du tiers, en ignorant les effets de l'acte litigieux à son égard.

L’article  1341-2 du code civil parle de l’inopposabilité ; l’évolution jurisprudentielle est donc prise en compte.

B) L’action paulienne n’a pas pour effet d’annuler l’acte litigieux envers le tiers

Dès lors, en confirmant le jugement ayant prononcé la nullité des donations litigieuses, la cour d’appel a violé l’article 1167 du Code civil. 1ère Civ, 20 décembre 2007, pourvoi n° 07-10.379,

Que signifie concrètement cela en pratique ?

Comme exposé ci-dessus, le créancier victime de la fraude reste seul à pouvoir saisir le bien.

Tous les autres créanciers du débiteurs n’ayant pas droit de gage général sur le bien concerné, ils, ne pourront poursuivre les voies d’exécution sur les biens ou valeurs concernées dans l’action paulienne.

En 2006, la cour de cassation, a pu rappeler ce principe : l'acte reste opposable à tous les créanciers  sauf au créancier qui exerce l'action paulienne. C’est aussi une façon aussi de sanctionner le tiers complice.

C) L’action paulienne ne peut empêcher une action en partage 1ere Civ,17 octobre 2012  pourvoi N°11-10.786 précité

En conclusion, il convient de rappeler qu’en sus de sa fonction comminatoire, l'action paulienne répare le préjudice subi par un  créancier en raison de l'inexécution par le débiteur de son obligation.

Elle doit être intentée dans les conditions de l'article 2224 du code civil qui dispose:

"Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer."

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L’Avocate vous fait Juge” Copyright Sabine HADDAD Première Edition : décembre 2013 ISBN: 978-1-291-48466-3 -330 pages

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