Pour l’article 1167 du Code civil,
« Les créanciers sont autorisés à attaquer, en leur nom personnel, les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits. «
Jusqu’en 2006,le créancier qui obtenait gain de cause, voyait "réintégrer" les biens du débiteur dans son patrimoine.
Il lui appartenait ensuite de faire procéder à la saisie entre les mains de son débiteur.
Depuis 2006, les choses ont été facilitées par la jurisprudence.
I- L' Inopposabilité des actes affectés de fraude pour le créancier poursuivant
Il faut une créance certaine,liquide et exigible.1 ère Civ,16 mai 2013,pourvoi N°12-13.637
Depuis 1ère Civ , 30 mai 2006, pourvoi n° 02-13495 ,
« l'inopposabilité paulienne autorise le créancier poursuivant, par décision de justice et dans la limite de sa créance, à échapper aux effets d'une aliénation opérée en fraude de ses droits afin d'en faire éventuellement saisir l'objet entre les mains du tiers. En ordonnant le retour des sommes données dans le patrimoine du débiteur, la cour d'appel a violé l'article 1167 du Code civil ».
Cet arrêt a été confirmé par:
1ère Civ 12 juillet 2006, pourvoi n° 04-20161,
Le but de l’exercice de l’action paulienne ici n’est pas de faire revenir le bien dans le patrimoine du débiteur mais de permettre la saisie entre les mains de celui qui en est devenu propriétaire frauduleusement.
Le créancier fera comme si l’acte n’existait pas à son encontre.
On parle de l'inopposabilité de l'action paulienne, laquelle n'aura plus pour effet de réintégrer les biens ou valeurs concernées dans le patrimoine du débiteur, mais permettra au créancier lésé d’agir directement auprès du tiers pour recouvrer le montant( ex en saisissant le bien).
En effet, si le juge ordonnait la restitution des sommes ou des biens entre les mains du débiteur, il prendrait le risque de voir rentrer ces valeurs dans le patrimoine,du débiteur et donc de les rendre accessibles aux autres créanciers.
Cela aurait pour conséquence de rendre inefficace et de faire perdre tout intérêt à l’action, au cas où les autres créanciers pourraient tirer bénéfice indirect et injustifié au bout du compte de cette action entreprise par un autre, ( exemple en pouvant saisir les biens concernés dans le patrimoine du débiteur)
C’est pour cela que le créancier aura la possibilité, seul de saisir le compte bancaire du tiers, en ignorant les effets de l'acte litigieux à son égard.
II L’action paulienne n’a pas pour effet d’annuler l’acte litigieux envers le tiers ni d'empêcher une action en partage
A) Pas d'annulation
Dès lors, en confirmant le jugement ayant prononcé la nullité des donations litigieuses, la cour d’appel a violé l’article 1167 du Code civil. 1ère Civ, 20 décembre 2007, pourvoi n° 07-10.379,
Que signifie concrètement cela en pratique ?
Comme exposé ci-dessus, le créancier victime de la fraude reste seul à pouvoir saisir le bien.
Tous les autres créanciers du débiteurs n’ayant pas droit de gage général sur le bien concerné, ils, ne pourront poursuivre les voies d’exécution sur les biens ou valeurs concernées dans l’action paulienne.
En 2006, la cour de cassation, a pu rappeler ce principe : l'acte reste opposable à tous les créanciers sauf au créancier qui exerce l'action paulienne. C’est aussi une façon aussi de sanctionner le tiers complice.
B) L’action paulienne ne peut empêcher une action en partage
1ere civ,17 octobre 2012 pourvoi N°11-10.786
"Mais attendu que l’inopposabilité paulienne ayant pour seul objet d’autoriser le créancier poursuivant, par décision de justice et dans la limite de sa créance, à échapper aux effets d’une aliénation opérée en fraude de ses droits, afin d’en faire éventuellement saisir l’objet entre les mains du tiers, la cour d’appel, tenue de trancher le litige selon les règles de droit applicable, a exactement retenu, statuant sur les conditions de l’action paulienne invoquée par le demandeur, lesquelles étaient nécessairement en la cause, que celle-ci ne pouvait avoir pour objet d’empêcher une action en partage entre coïndivisaires en niant le transfert de droits intervenu à leur profit ; qu’elle a, par ce seul motif, justifié légalement sa décision ;"
En conclusion, il convient de rappeler qu’en sus de sa fonction comminatoire, l'action paulienne répare le préjudice subi par un créancier en raison de l'inexécution par le débiteur de son obligation.
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Sabine HADDAD
Avocate au barreau de Paris