LE CRIMINEL NE TIENT PLUS LE CIVIL EN L'ETAT OU LA FIN D'UN ADAGE

Publié le Modifié le 08/07/2014 Vu 90 949 fois 11
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Depuis la loi du 5 mars 2007, (art 20 JO 6 mars ) l'article 4 du Code de Procédure pénale a été modifié, si bien que l'adage : « le criminel tient le civil en l'état » a pris un tournant inverse. Le but de cet adage était d'empêcher qu'une juridiction civile, commerciale ou prud'hommale ne contredise une juridiction pénale.Sa conséquence résidait dans un ralentissement des procédures, et ses abus souvent dénoncés... Si une juridiction pénale était saisie parallèlement à la juridiction civile, le juge décidait alors de surseoir à statuer... Entrons dans le détail.

Depuis la loi du 5 mars 2007, (art 20 JO 6 mars ) l'article 4 du Code de Procédure pénale a été modifié,

LE CRIMINEL NE TIENT PLUS LE CIVIL EN L'ETAT OU  LA FIN D'UN ADAGE

Depuis la loi du 5 mars 2007, (article 20 publiée au JO n° 55 du 6 Mars 2007 page 4206,) l'article 4 du Code de Procédure pénale a été modifié, si bien que l'adage du XIXème siècle « le criminel tient le civil en l'état a pris un tournant inverse.

Cet adage suppose que lorsqu'une affaire entre les mêmes parties, concernant des mêmes faits est portée à la fois devant la juridiction répressive et devant le tribunal civil ou commercial, la chose jugée au pénal ayant autorité sur tout autre juge, ce dernier doit surseoir à son jugement en attendant la décision pénale.

Quelle est est l'évolution ?

I- Sens de l'adage "le criminel ne tient plus  le civil en l'état "

A) La supériorité du pénal sur le civil

L'article 4 a 2 ancien du Code de Procédure Pénale disposait:

"il est sursis à statuer au jugement de cette action exercée devant la juridiction civile tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement".

Le but de cet adage est d'empêcher qu'une juridiction civile, commerciale ou prud'hommale ne rende une décision en contrariété de celle rendue par une juridiction pénale.

Si une juridiction pénale était saisie parallèlement à la  juridiction civile ou commerciale, le juge décidait alors de surseoir à statuer.

Dès lors, que la décision pénale pouvait avoir des répercussions sur la décision civile, la chose jugée au pénal avait ainsi autorité sur les décisions civiles.

Une certaine prééminence ou suprématie du pénal sur le civil était ainsi affirmée.

B) La conséquence

1°-dans le sursis à statuer

Article 378 du NCPC
.
La décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine.

Article 379 du NCPC
.
Le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge. A l'expiration du sursis, l'instance est poursuivie à l'initiative des parties ou à la diligence du juge, sauf la faculté d'ordonner, s'il y a lieu, un nouveau sursis.

Le juge peut, suivant les circonstances, révoquer le sursis ou en abréger le délai.

Ainsi, la procédure civile ou commerciale était figée jusqu'à ce  que la décision pénale soit prononcée définitivement.

3 ème Civ 7 janvier 2009, pourvoi n° 07-21.501 a jugé que:

Cette règle n'était pas applicable devant le juge des référés dont les décisions de caractère provisoire sont dépourvues sur le fond de l'autorité de la chose jugée.

2°- ... le ralentissement de la procédure

La plainte simple ou avec constitution de partie civile était ainsi un bon moyen de gagner du temps ( ex vol, agression, abus de confiance, faux...)

Bon moyen stratégique pour ralentir les procédures de 4 à 18 mois, selon qu'une  enquête est diigentée ou pour l'examen d'une plainte avec constitution de partie civile...

Il fallait de ce fait attendre l’issue de la procédure pénale suite à l’information judiciaire, laquelle pouvait aboutir: soit à une ordonance de non lieu,soit à une ordonnance de renvoi devant le Tribunal Correctionnel.

Ce n'est qu'ensuite que la décision en matière civile pouvait intervenir.

L'évolution, ne pouvait qu'eller vers le sens d'une réforme.

CEHD 28 novembre 2000, Leclercq/France a considéré qu'il n'est plus possible pour un état d'invoquer l'encombrement du rôle pour justifier la durée excessive des délais de jugement"

La réforme évitera le dilatoire et tout retard dans les procédures.

II- Depuis la loi N°2007-291 du 5 mars 2007 : "Le pénal ne tient plus le civil en l'état " dans le but d'éviter de ralentir  abusivement  les procédures civiles, commerciales ou prud'homales

L’article 20 de la loi n° 2007-291 du 5 Mars 2007 précitée « tendant à renforcer l’équilibre de la procédure pénale »,  a mis fin aux principes de l'adage.

Cette réforme vient mettre fin aux manœuvres dilatoires des défendeurs destinées   à ralentir  la procédure en causant préjudice au demandeur.

Désormais, le juge civil ou commercial a le pouvoir d'apprécier la caractère sérieux de la procédure pénale engagée et n'a plus l'obligation de prononcer automatiquement un sursis à statuer, sauf dans le cas d'une action civile  introduite séparément de l'action publique, ayant uniquement pour objet la réparation du dommage causé par l'infraction.

Le  principe du pénal qui tient le civil en l'état n'est plus automatique, il ne demeure donc que pour l'action en réparation causé par l'infraction en vertu de la loi.

L'article 4  du CPP a été modifié pour fixer un principe contraire :

"la mise en mouvement de l'action publique n'impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu'elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil".

Le juge aura la faculté de surseoir à statuer.

L'automatisme de cette mesure d'administration n'existe donc plus.

De ce fait, malgré le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile et le  dépôt d'une  consignation prévue par la loi, rien n'empêchera  plus au Juge Civil ou au Juge Commercial de statuer.

Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
.
Maître HADDAD Sabine

Avocate au barreau de Paris


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1 Publié par mathieumad
01/06/2011 21:24

est ce ce que une plainte avec constitution de partie civil suite au detournement des biens de la communauté par mon épouse pourrai m'accorder l'equivalence de 100% des biens caché et le civil declaré le 50/50 en liquidation du patrimoine de la communauté?

2 Publié par Visiteur
16/06/2011 10:28

Merci et bravo pour cet éclaircissement.
Si mon avocat m'avait clairement expliqué tout cela j'aurais procédé différemment, mais encore aujourd'hui bcp d'avocats n'informent leurs clients que de manière parcimonieuse.

Une question cependant. Quel serait le poids du délit d'abandon de famille pour un divorce pour faute si aucune procédure pénale n'est en cours et qu'il y a bien plusieurs plaintes déposées et dans le dossier? Le Juge peut-il estimer qu'il y a tjrs torts partagés ? Le poids de la faute ici n'est-elle pas plus importante ? De même, un délit de non représentation n'ayant pas abouti mais reconnu, n'est-il pas de nature à revoir les torts partagés ?

Ou bien encore aujourd'hui, si le conjoint le plus souple n'attaque pas, le Juge ne statuera pas en fonction du poids des fautes au détriment du plus conciliant et à l'encontre de l'intérêt des enfants mais dans l'optique d'un apaisement factice.

Il me semble que ce n'est pas une avancée prodigieuse.

3 Publié par Me Haddad Sabine
16/06/2011 12:42

A Information

je vous remercie de ce commentaire.

Le juge appréciera les griefs en fonction des circonstances. cet élément est à souligner dans les conclusions et la plaidoirie.le poids des torts partagés ou des torts exclusifs est une question subjective, appréciée in concreto par le juge,dans le cadre de son pouvoir souverain.

le plus décevant dans tout cela est le blocage de notre justice pénale dans ce type de dossiers.je pense à la voie classique de la plainte...
Cordialement

4 Publié par katanga
26/06/2011 21:28

La question demeure trop controversée dans la doctrine Congolaise, les uns estiment que le juge civil doit prononcer le sursis à statuer même quand un dossier pénal se trouve en instruction devant un magistrat du Parquet(l'office du Procureur), d'autres, par contre, soutiennent que les deux juridictions,civiles ou commerciale et pénale, doivent être saisies entre les mêmes parties pour que le juge civil prononce le sursis à statuer, mais dans tous les cas il appartiendra au juge d'apprécier, toute fois l'adage demeure d'application;Cependant, j'aimerai savoir quel serait le sort de l'action civile, si la juridiction pénale se trouve saisie pendant que l'instance civile était déjà en cours?

5 Publié par Visiteur
26/06/2011 23:45

Je viens de compléter ma fiche avec le code Antispam qui faisait défaut.Merci

6 Publié par Visiteur
31/01/2013 09:30

CONCERNANT "Le criminel tient le civil en etat", deux questions à poser:
1. quel rapprochement faisait-on à l'époque entre les adages " le criminel tient le civil en l'état" et lelecta una via non datur..." dans l'action en réparation du dommage caujé par une infraction. pouvait-on les évoquer simultanément pour aboutir au meme résultat? avaient-ils des points communs? (je dois signaler qu'en RDC l'application du premier adage est souvent automatique).
2. le civil peut-il tenir le pénal en l'état?
merci de me répondre avec diligence.

7 Publié par Visiteur
08/11/2013 18:29

Merci d évoquer la question de la prééminence du criminel sur le civil, car je pense qu' elle contribuera à une "certaine justice" de ne plus tenir des vies humaines en l'état.

8 Publié par Visiteur
18/02/2014 17:22

Ma préoccupation porte sur le sort réservé à une personne poursuivit pour atteinte à la surêté de l'Etat. en droit congolais, l'une des sanctions si le coupable est étrangé, c'est l'expulsion du territoire national congolais. Q'adviendra-il si au court de l'instance, la nationnalité du présumé est douteuse.
QUESTION: Faudra-t-il sursoir l'affaire et saisir le juge civil pour déterminer la nationnalité du prévenu? dans ce cas le civil ne tient-il pas le pénal en l'état? merci pour toutes vos réponses!

9 Publié par Visiteur
08/07/2014 08:05

Ma question est la suivante : si une ordonnance de non lieu est rendue au penal. Une juridiction civile tel un conseil de prud'hommes peut il tout de même statuer. Et qu'adviendra t'il si une decision est rendue au pénal. Sa portée devra t'elle être suivie par la juridiction civile.
J aurai une autre question mais elle ne concerne pas cet article. Dois je la poser dans les commentaires d un article plus approprié ?
Merci

10 Publié par Visiteur
08/07/2014 08:05

Ma question est la suivante : si une ordonnance de non lieu est rendue au penal. Une juridiction civile tel un conseil de prud'hommes peut il tout de même statuer. Et qu'adviendra t'il si une decision est rendue au pénal. Sa portée devra t'elle être suivie par la juridiction civile.
J aurai une autre question mais elle ne concerne pas cet article. Dois je la poser dans les commentaires d un article plus approprié ?
Merci

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