Cautionnement bancaire disproportionné: charge de la preuve des revenus et patrimoine de la caution

Publié le Modifié le 04/12/2015 Vu 11 434 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

Une banque peut-elle se prévaloir d’un cautionnement manifestement disproportionné par rapport aux biens et revenus de la caution ?

Une banque peut-elle se prévaloir d’un cautionnement manifestement disproportionné par rapport aux biens e

Cautionnement bancaire disproportionné: charge de la preuve des revenus et patrimoine de la caution

Le 10 septembre 2014, la Cour de cassation a jugé que l’article L. 341-4 du code de la consommation était applicable à un acte de cautionnement conclu par une personne physique.

Implicitement, elle rappelle qu’il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, personne physique, d’apporter la preuve de la solvabilité de celle-ci au moment où il l’appelle en qualité de caution.

Pour mémoire, l’article L. 341-4 du code de la consommation dispose :

« Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».

Depuis le 1er avril 2014, les juges de la Cour de cassation exigent aussi de la banque qui veut se prévaloir d’un cautionnement manifestement disproportionné par rapport aux biens et revenus de la caution de rapporter la preuve de la solvabilité de cette dernière au moment où elle est appelée en qualité de caution.

Ainsi, de manière imagée, deux « photographies » distinctes doivent être faites sur la situation de fortune de la caution :

- La première est celle de la disproportion de l’engagement au moment de sa conclusion, dont la preuve incombe à la caution.

- La seconde est celle de la disproportion de l’engagement au moment où le juge statue, dont la preuve incombe à la banque.

En l’espèce, une personne s’est portée caution du remboursement d’un prêt consenti par la Société Guadeloupéenne de Financement afin de financer l’achat d’un véhicule automobile au profit d’une tierce personne, pour un montant de 40.841,29 €.

Or, la caution a déclaré, lors de la conclusion de l’acte de cautionnement, habiter chez ses parents et ne percevoir qu’un salaire mensuel de 989,30 €.

La banque a assigné en justice la caution qui a invoqué l'article L. 341-4 du code de la consommation précité pour faire annuler le cautionnement sur le fondement de la disproportion.

Compte tenu des revenus de la caution et de sa situation patrimoniale au moment où celle-ci s’était engagée, le caractère disproportionné du cautionnement était manifeste.

Ainsi, la Cour d’appel a donné droit à la caution en jugeant que la banque ne pouvait pas se prévaloir de l’acte de cautionnement en raison de son caractère manifestement disproportionné par rapport aux biens et revenus de la caution au moment où celle-ci s’était engagée en cette qualité.

La banque a alors formé un pourvoi en cassation en soutenant notamment que la charge de la preuve du caractère disproportionné du cautionnement incombait à la caution.

Cependant, la Cour de cassation a sanctionné la banque en considérant que :

« il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, personne physique, d’établir qu’au moment où il l’appelle, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation »

La Cour de cassation rappelle ainsi l’applicabilité de l’article L 341-4 du Code de la consommation à ce type de situation et l’impossibilité pour la banque de se prévaloir d’un cautionnement manifestement disproportionné.

En effet, il a déjà été jugé que la sanction de la disproportion d’un acte de cautionnement lors de sa conclusion est la déchéance totale du créancier professionnel dans ses droits contre la caution. (Cass. com., 22 juin 2010, n° 09-67814 ; Cass. com., 19 oct. 2010, n° 09-69203 ; Cass. Com., 1er avril 2014, n° 13-11313).

Par conséquent, la Cour de cassation exige de la banque qui entend se prévaloir d’un cautionnement manifestement disproportionné aux revenus et patrimoine de la caution d’apporter la preuve de la solvabilité de la caution au moment où celle-ci est appelée au paiement de la dette, c'est-à-dire concrètement au moment de la procédure judiciaire devant le juge.

Compte tenu que la banque n’a pas rapporté la preuve d’une amélioration dans la situation financière de la caution cette dernière a été libérée de son engagement bancaire.

La preuve du retour à meilleur fortune de la caution incombe donc à la banque.

A contrario, la caution n’a pas à justifier de sa situation financière actuelle auprès des juges en cours de procédure.

Cette décision complique donc l’action en justice des banques puisque, dans de nombreuses situations, elles ne disposent d’aucun élément de preuve sur les revenus et le patrimoine de leurs clients au moment où le juge statue.

Pour conclure, il convient de garder en mémoire que :

- lorsque les cautionnements bancaires représentent plus de 4 fois le montant des revenus annuels de la caution ou que la charge mensuelle de remboursement de la dette envers la banque est supérieure à 33% des revenus mensuels de la caution, cette dernière peut obtenir l'annulation de son engagement en raison de son caractère disproportionné ;

- le montant de tous les crédits à la charge de la caution sont pris en compte pour le calcul de son endettement.

En tant qu'avocat expert en cautionnement bancaire, je vous propose d'analyser l'éventuelle disproportion de vos engagements bancaires et, le cas échéant, de les faire annuler.

NB : Afin d'approfondir le sujet des moyens de défense dont disposent les cautions poursuivies en paiement par la banque, je vous invite à lire mon article publié ICI.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
01 40 26 25 01

abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1435 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1435 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles