La cession du droit au bail commercial déguisée en cession de fonds de commerce

Publié le 02/09/2012 Vu 18 509 fois 0
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Il arrive fréquemment que le locataire d’un local commercial décide de céder son droit au bail en se passant de l’autorisation ou de l’accord de son bailleur, par le biais d’une cession de fonds de commerce « déguisée » ou « maquillée ». Mais cette opération n’est pas sans risques puisque le bailleur peut en obtenir l’annulation, une indemnisation des préjudices subis voir même la résolution du bail pour non respect des clauses contractuelles.

Il arrive fréquemment que le locataire d’un local commercial décide de céder son droit au bail en se pass

La cession du droit au bail commercial déguisée en cession de fonds de commerce

La différence entre les cessions de droit au bail commercial et celles du fonds de commerce est que ces dernières sont libres et sans autorisation préalable du bailleur nécessaire, contrairement aux cessions de droit au bail.

Autrement dit, alors que la cession du droit au bail suppose de manière générale et préalable l'autorisation ou l'accord du bailleur, la cession du fonds de commerce est exclusive de toute accord de ce dernier.

Certains preneurs à bail, locataires, qui souhaitent céder leur bail commercial en se passant de l'autorisation de leur bailleur tentent ainsi de contourner l'obligation contractuelle d'en solliciter l'accord, en "déguisant" ou "maquillant" l'acte de cession du droit au bail en cession de fonds de commerce.

Il s'agit donc d'une dissimulation volontaire de l'objet de la cession réellement envisagée au préjudice du bailleur.

En effet, le bailleur est en droit de donner son accord préalable et ainsi de choisir le repreneur du local donné à bail.

Or, il peut s'avérer que le repreneur ne respecte pas les obligations du bail commercial repris grâce à la cession du fonds de commerce.

La reprise déguisée du bail commercial peut donc être préjudiciable pour le propriétaire du local commercial puisqu'il ne validera pas la personne du remplaçant de son locataire en place.

Afin de déguiser une cession de droit au bail en cresson de fonds de commerce, il suffit d'insérer dans l'acte de cession des clauses qui tendent à faire croire, de manière artificielle, que l'objet de la cession n'est pas seulement le droit au bail mais aussi d'autres éléments composant le fonds de commerce.

Si l'opération n'est pas simple elle n'est pas impossible.

L'enjeu est de taille puisque :

- La cession du fonds de commerce est en principe financièrement plus intéressante pour le locataire cédant le fonds de commerce ;

- La cession du fonds de commerce ne suppose pas que le locataire obtienne de son bailleur l'accord préalable et exprès à la cession ;

- Le bailleur est privé d'un droit de regard sur le repreneur du contrat de bail commercial cédé avec le fonds.

Dans ce contexte, bien souvent, seule l'analyse par un homme de l'art des clauses du contrat de cession projeté permettra au bailleur d'agir en justice en cas de cession de droit au bail déguisée et préjudiciable.

Pour identifier la dissimulation de l'objet de la cession, il faut tout d'abord analyser les différents éléments composants le fonds de commerce et prétendument céder.

Pour mémoire, le fonds de commerce est composé de :

• biens meubles corporels : le matériel, l’outillage et les marchandises (le stock) ;

• biens meubles incorporels :

- la clientèle qui est l'élément essentiel d'existence du fonds de commerce ;

- le droit au bail (le contrat de bail commercial du local dans lequel est exploité le fonds de commerce) ;

- le nom ou l’enseigne commerciale ;

- les droits de propriété littéraire, artistique et industrielle (les brevets d’invention, les marques, les dessins et modèles, etc...)

- les contrats de travail, d’édition et d’assurance peuvent faire l'objet d'une cession avec le fonds de commerce.

- les contrats de licences professionnelles attachées au fonds de commerce telle la licence de débit de boissons.

D'autres éléments peuvent être révélateurs :

1° L'absence d'indication du prix de l'acquisition des éléments incorporels, marchandises et matériel ;

2° Le défaut d'état des privilèges et nantissements grevant le fonds ;

3° L'absence de clause relative au chiffre d'affaires et de résultats d'exploitation réalisés durant les trois derniers exercices comptables ou durant la possession du fonds si la durée a été inférieure à trois ans.

L'omission de l'un des éléments précités peut d'ailleurs entraîner la nullité de l'acte de cession à la demande de l'acquéreur durant un délai d'une année.

Le 24 janvier 2006, la Chambre commerciale de la Cour de Cassation a d'ailleurs jugé que lorsque les locaux sont fermés, sans achalandage, vides de tout stock, inexploités, ne présentant aucune activité commerciale ou la mise en place dès la prise de possession des lieux par le cessionnaire d'une activité radicalement nouvelle la cession du fonds de commerce, emporte en réalité la vente du seul droit au bail, irrégulière au regard des clauses contractuelles, inopposable au bailleur et la résiliation du bail aux torts du preneur doit être prononcée ainsi que l'expulsion des repreneurs outre le paiement d’une indemnité d'occupation égale au montant des loyers contractuels, charges et taxes prévues au bail jusqu'à libération effective des lieux (Cass. Com., 24 janvier 2006, N° de pourvoi : 04-15175).

Dans ce contexte, la bonne rédaction de l'acte de cession permet de garantir le vendeur du fonds de commerce d'une éventuelle action pour dol et dommages et intérêts de la part de l'acquéreur.

Enfin, il est important de souligner que le bailleur qui refuse la cession du droit au bail de manière injustifiée, sans cause réelle et sérieuse, ou émet des conditions intenables pour l'autoriser peut faire l'objet d'une procédure de la part du cédant afin d'obtenir judiciairement l'autorisation de cession et une condamnation à des dommages et intérêt (Cass. Civ. III, 10 juin 2009, N° de pourvoi : 08-14099) :

« le bailleur avait refusé de donner son accord à la cession si une somme de 14 000 euros ne lui était pas versée pour une remise en état des lieux liée à la présence d'une climatisation alors que cette climatisation avait été installée avec son accord exprès, la cour d'appel, a pu déduire de ces seules constatations que le cédant n'était en rien responsable de la non réalisation de la condition suspensive liée uniquement aux exigences du bail »

Je suis à votre disposition pour toute information ou action.

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Anthony Bem
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