Défaut de droit de recours de la garantie institutionnelle d’un prêt exerçant son action en remboursement à l’encontre du débiteur ou d’une caution pour défaut de validité de la déchéance du terme

Publié le 22/02/2021 Vu 2 009 fois 0
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Les sociétés de garantie de remboursement de prêts bancaires peuvent-elles agir contre le débiteur ou la caution si la déchéance du terme n’a pas été correctement formalisée ?

Les sociétés de garantie de remboursement de prêts bancaires peuvent-elles agir contre le débiteur ou la c

Défaut de droit de recours de la garantie institutionnelle d’un prêt exerçant son action en remboursement à l’encontre du débiteur ou d’une caution pour défaut de validité de la déchéance du terme

 

Le remboursement des prêts bancaires est parfois garanti par des sociétés de caution qui payent en lieu et place des débiteurs en cas d’incident de remboursement des échéances. 

 

Les emprunteurs et les autres personnes qui se sont portés cautions solidaires aux côtés de ces cautions institutionnelles sont protégées par le respect du formalisme de la déchéance du terme du prêt prévu dans les contrats de crédits.

 

A cet égard, le 11 février 2021, la Cour d’appel de Versailles a posé le principe selon lequel les sociétés de garantie de remboursement de prêts bancaires qui payent la banque alors que la déchéance du terme n’a pas été correctement formalisée ne peuvent pas valablement agir en paiement contre le débiteur ou la caution. (Cour d’appel de Versailles, 16ème Chambre, 11 février 2021, n°19/03268)

 

En l’espèce, la banque Crédit Lyonnais a consenti à une société un prêt destiné à financer l’acquisition d’équipements professionnels. 

 

La société Interfimo, spécialisée dans le cautionnement des prêts consentis aux professions libérales, est une caution institutionnelle. 

 

En tant que telle, elle s’est portée caution du remboursement du prêt par l’emprunteuse, tout comme le gérant de cette dernière. 

 

A la suite de défaillances de l’emprunteuse et après mises en demeure, la société Interfimo a été conduite à payer huit échéances mensuelles à la banque, puis, cette dernière se prévalant de la mise en œuvre de l’exigibilité anticipée du prêt, le capital restant dû.

 

La banque ayant été payée par la société Interfimo ne pouvait donc plus se prévaloir de la déchéance du terme. 

 

La banque a ainsi remis à la société Interfimo une quittance subrogative pour lui permettre de se retourner contre la société emprunteuse et son gérant. 

 

Sur le fondement de cette quittance subrogative, la société Interfimo a donc assigné en paiement solidaire la société emprunteuse et son gérant. 

 

En effet, pour mémoire, en cas de retard de remboursement, la banque a le droit de prononcer la déchéance du terme en vertu de l’article L 313-52 du code de la consommation, et exiger de l’emprunteur le paiement immédiat tant du capital restant dû que des intérêts échus et de retard.

 

Cependant, les contrats de prêt d’une somme d’argent prévoient souvent les modalités pratiques pour que la défaillance de l’emprunteur non commerçant puisse entraîner la déchéance du terme du prêt, c’est à dire l’exigibilité anticipée et immédiate de toutes les sommes dues au titre du prêt. 

 

A cet égard, la Cour de cassation a jugé que l’exigibilité anticipée du prêt ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans le respect d’un certain formalisme. 

 

Le cas échéant, la jurisprudence impose aux banques d’adresser à l’emprunteur par lettre recommandée avec accusé de réception une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour faire obstacle à la déchéance du terme du prêt, quelle que soit la nature de la défaillance en cause. (Cour de cassation, Première chambre civile, 22 mai 2019, pourvoi n°18-13246)

 

En l’espèce, la clause « exigibilité anticipée » du contrat de prêt stipulait que « (...) le préteur, avec l’accord d’Interfimo, aura la faculté d’exiger le remboursement immédiat de toutes les sommes restant dues au titre du prêt, et ce de plein droit, sur simple avis notifié à l’emprunteur (…) »

 

La société Interfimo a mis en demeure l’emprunteuse de payer les échéances non honorées et lui a aussi indiqué qu’ : « A défaut, nous ferons application de la clause d’exigibilité anticipée prévue au contrat, nous rembourserons le capital restant dû à LCL et nous engagerons une procédure judiciaire à votre encontre »

 

Cependant, la cour d’appel a estimé que la société Interfimo ne versait aucune pièce venant démontrer l’existence du « simple avis notifié à l’emprunteur » adressé par la banque à l’emprunteur, conformément aux termes du contrat de prêt. 

 

De même, les juges d’appel ont estimé que dès lors qu’il était stipulé au contrat que « le préteur, avec l’accord d’Interfimo, aura la faculté d’exiger (…) », la société Interfimo ne peut pas valablement affirmer que dans les relations avec l’emprunteur, le prêteur et la caution disposaient concurremment de la faculté de prononcer la déchéance du terme

 

Pour cause, la société Interfimo n’était pas dispensatrice de crédit et l’incise entre deux virgules (« avec l’accord d’Interfimo ») ne concerne que les rapports entre le prêteur et cette caution  institutionnelle et non les rapports entre l’emprunteur et la société Interfimo. 

 

Cette lettre pourrait être regardée tout au plus comme l’avertissement préalable du débiteur, exigé par l’article 2308 alinéa 2 du code civil qui dispose que : « Lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n’aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte ; sauf son action en répétition contre le créancier »

 

Cette lettre permet à la caution qui a payé d’attester de la satisfaction à cette exigence.

 

Ainsi, la société emprunteuse n’a pas été rendue valablement destinataire par la banque du simple avis convenu. 

 

Dans ce contexte, la Cour a jugé que la banque pouvait et devait adresser à la société emprunteuse un avis conforme afin de pouvoir prétendre à l’exigibilité anticipée du prêt litigieux. 

 

Par conséquent, la Cour d’appel de Versailles a considéré que :

 

« agissant en qualité de subrogée, la société Interfimo ne peut prétendre à plus de droits que ce que la banque a pu lui transmettre si bien qu’elle n’est pas recevable à réclamer à l’emprunteuse le capital restant dû en suite de la déchéance du terme qu’elle ne peut opposer à la société Invictus ainsi qu’à son cofidéjusseur, monsieur X, et obtenir paiement de la somme réclamée à la Selarl emprunteuse ». 

 

Faute de qualité à agir en justice, la Cour a déclaré la société Interfimo irrecevable en son action en paiement du montant des mensualités du prêt échues

 

Il résulte de cette décision qu’à chaque fois que la banque n’a pas mis en œuvre ou n’a pas correctement mis en œuvre la clause d’exigibilité anticipée du prêt, la caution institutionnelle qui l’a payé ne sera pas en droit de se substituer à elle et d’en réclamer le paiement par subrogation au débiteur. 

 

Autrement dit, la banque est tenue de réclamer selon les modalités contractuelles le paiement du capital restant dû au débiteur faute de quoi la caution solidaire appelée en garantie ne pourra pas le faire à sa place ni se subroger dans les droits de la banque. 

 

Cette solution est logique puisqu’à la date du paiement du prêt par la société Interfimo, la banque ne pouvait pas transférer à cette dernière une dette alors inexistante, de sorte que la caution institutionnelle ne pouvait pas valablement se prévaloir de l’exigibilité anticipée du prêt. 

 

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Anthony Bem
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