En l'espèce, à la suite de la mise en ligne d'un texte intitulé « Plainte disciplinaire contre l'avocat véreux Jean-Louis Y… », celui-ci fit citer directement devant le tribunal correctionnel son auteur, M. X…, pour injures publiques envers un particulier. Le texte en cause qualifiait maître Y… d'« avocat véreux, raciste et belliqueux » et lui imputait également la participation à une « tentative d'escroquerie au jugement », la tenue de propos racistes et le recours à des menaces physiques.
On précisera que l'un et l'autre étaient alors adversaires dans le cadre d'un procès civil.
En première instance et en cause d'appel, les juges ont déclaré le délit d'injure publiques envers un particulier établit avec pour conséquence l'octroi de dommages et intérêt au profit de l'avocat et la condamnation à une peine d'amende avec sursis à l'encontre du prévenu.
Cependant, la cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt d'appel compte tenu « qu'en se prononçant ainsi, alors que les expressions outrageantes et injurieuses étant, en l'espèce, indivisibles des imputations diffamatoires et se confondant avec elles, le délit d'injures se trouvait absorbé par celui de diffamation, et que dès lors la qualification visée dans la poursuite était inappropriée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ».
La Haute juridiction a ainsi posé le principe selon lequel « lorsque les expressions outrageantes ou appréciations injurieuses sont indivisibles d'une imputation diffamatoire, le délit d'injure est absorbé par celui de diffamation ».
Une telle censure de la part de la cour de cassation est lourde de conséquences puisqu’au cas présent l'avocat ne peut plus "corriger le tir" en introduisant à nouveau son action sur le fondement de la diffamation du fait que la prescription de trois mois à compter de la date de diffusion des propos litigieux était acquise depuis longtemps.
Il conviendra donc de rappeler qu’en matière de presse, la citation, qu'elle émane du ministère public ou de la partie lésée, doit satisfaire aux trois conditions de validité suivantes, également nécessaires à la validité du réquisitoire introductif : l'articulation des faits, la qualification des faits et le visa du texte applicable.
En effet, la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse impose le respect de conditions très strictes de validité de la citation directe.
Ainsi, l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 oblige, dès le début de l'instance, à préciser l'objet, la nature et l'étendue de la poursuite, et de faire connaître au prévenu les points sur lesquels il aura à se défendre, leur qualification juridique et les peines applicables.
La loi suppose donc que le plaignant choisisse entre la qualification d’injure et de diffamation, au risque s’il se trompe d’encourir la nullité de son action et de la procédure sans possibilité de réparer son erreur.
La question de qualification pénale du délit (injure ou diffamation) est particulièrement rigoureuse puisque aucune nouvelle requalification n'est plus possible (Cass. Crim. 13 janv. 1923).
En outre, lorsque les expressions outrageantes et injurieuses sont, comme en l'espèce, indivisibles des imputations diffamatoires et se confondant avec elles, le délit d'injure est absorbé par celui de diffamation.
Il ressort de ce qui précède que deux hypothèses doivent être distinguées :
- si les expressions injurieuses sont indivisibles des imputations diffamatoires, le délit d'injure est en principe absorbé par celui de diffamation ;
- si les expressions injurieuses sont indépendantes des imputations diffamatoires, le délit d'injure peut être poursuivi et puni comme constituant un délit distinct.
La question de la qualification pénale des propos litigieux étant une mission périlleuse, même pour les avocats, il est recommandé de faire appelle aux services d'un expert.
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Anthony Bem
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