Limitation de la liberté d’expression des salariés sur internet par une clause de confidentialité

Publié le 01/06/2012 Vu 3 645 fois 0
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Le 16 avril 2012, la cour d'appel de Douai a jugé que les anciens salariés de société ne peuvent s'exprimer librement sur internet lorsqu'ils sont tenus par une clause de confidentialité, malgré la véracité des propos diffusés (Cour d'appel de Douai Chambre 1, section 1 Arrêt du 16 avril 2012. Eric N. / Access From Everywhere).

Le 16 avril 2012, la cour d'appel de Douai a jugé que les anciens salariés de société ne peuvent s'exprime

Limitation de la liberté d’expression des salariés sur internet par une clause de confidentialité

Cet arrêt est interessant car il illustre un nouveau cas de limitation de la liberté d'expression des internautes et plus particulièrement celle des salariés à l'égard de leurs employeurs.

En l'espèce, la société Access From Everywhere, spécialisée dans la programmation informatique, a conclu un contrat à durée indéterminée avec Monsieur N. en qualité d'attaché commercial.

Suite à la démission de Monsieur N, son ex employeur a découvert l'exercice d'une activité concurrente de la sienne et une campagne de dénigrement à son encontre sur internet.

De plus, l’ex employeur a découvert que son ex salarié diffusait divers messages sur interne avec des informations sur son activité, ses pratiques et ses méthodes commerciales.

Ainsi, pour l’ex employeur Monsieur N avait violé la clause contractuelle de discrétion absolue à laquelle il était tenu, même après l'expiration de son contrat de travail.

Tout d’abord les juges ont rappelé que la présente procédure ne concernait que la recherche d'une éventuelle responsabilité de Monsieur N. pour violation de la clause de confidentialité figurant à son contrat de travail et non les allégations de concurrence déloyale (dénigrement et parasitisme) dont le tribunal de commerce d'Arras avait été parallèlement saisi par la société Kemenn.

Le tribunal a relevé que le contrat de travail conclu prévoyait une clause ainsi rédigée : "Le salarié s‘engage d‘une façon absolue à garder la discrétion la plus grande sur tout ce qui concerne l‘activité de la société telle qu'il en aura connaissance dans l'exercice de ses fonctions et ce, en tout domaine et y compris à l'expiration du présent contrat".

Conformément à l'article L 1121-1 du code du travail l'insertion d'une clause dans un contrat de travail doit être justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.

Or, les juges ont tenu compte de ce que « Monsieur N. exerçait au sein de la société Kemenn les fonctions d'attaché commercial et était donc amené à ce titre à avoir accès aux fichiers clients de la société, à avoir une connaissance technique des produits commercialisés et à disposer de toutes informations sur l'état du marché ouvert à la société et à ses concurrents ; sur le suivi des commandes, sur le personnel, sur les techniques commerciales et de prospection, ainsi que sur des pratiques de management ».

Par conséquent, les juges ont considéré que « la clause de confidentialité exprimée dans des termes certes étendus, était nécessaire pour préserver les intérêts commerciaux de l'employeur et le protéger de toute divulgation au profit de ses concurrents ; que l'obligation de discrétion ainsi imposée au salarié pendant le contrat de travail et à son expiration n'excède pas ce qui est indispensable au but recherché ».

C’est ainsi qu’il a été jugé que « cette clause ne porte pas atteinte à la liberté du commerce » et que Monsieur N. engageait sa responsabilité contractuelle envers la société Access From Everywhere en raison de la violation des dispositions de son contrat de travail, mettant à sa charge une obligation de secret professionnel renforcée et a notamment ordonné la publication permanente du dispositif de la décision sur la page d'accueil du blog personnel de Monsieur N. et de tous les sites internet édités et contrôlés par celui-ci, pendant un délai de 6 mois, sous astreinte provisoire de 200 € par jour de retard.

La publication sur internet des décisions de justice doit répondre à une spécification particulière. 

C’est ainsi que le tribunal a mentionné dans son jugement que « ces publications devront s'afficher de façon lisible en lettres de taille suffisante aux frais de Monsieur N. en dehors de tout encart publicitaire et sans mention ajoutée dans un encadré de 468x120 pixels, le texte devant être précédé du titre AVERTISSEMENT JUDICIAIRE en lettres capitales et gros caractères ».

Par ailleurs, la société Access From Everywhere repochait à son ex salarié de diffuser des messages sur internet notamment le site « lesarnaques.com » dont le sujet est “Kemenn-Locam” dans lequel il est mentionné que le commercial prétend que :

« le site sera corrigé en 24 H, c'est du mensonge (CGV de Kemenn, de mémoire modifications trimestrielles, de mémoire)
le site sera en 1er sur Google, c'est du mensonge (CGV de Kemenn de mémoire..., indexation, pas positionnement, ça n'a rien à voir)
le site sera sur mesure, c'est du mensonge (CGV de Kemenn, de mémoire)... ».

Sur ce point la cour d’appel a jugé que :

« en publiant sur des sites internet et des blogs accessibles au public des informations sur la société Kemenn, son activité, ses méthodes commerciales et de travail, dont il a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions d'attaché commercial au sein de cette société Monsieur N. qui y revendique d'ailleurs son statut d'ancien employé a violé la clause de confidentialité qui lui imposait valablement la plus grande discrétion, y compris à l'expiration de son contrat de travail, engageant ainsi sa responsabilité en application des articles 1134 et 1147 du code civil ».

Ainsi, la prétendue véracité des propos diffusés n'exonère nullement leur auteur de sa responsabilité pour violation de sa clause de confidentialité. 

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Anthony Bem
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