Nullité du contrat de cautionnement si la mention manuscrite de la caution est rédigée par un tiers

Publié le 04/04/2019 Vu 13 421 fois 0
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La mention manuscrite d’un contrat de cautionnement doit-elle obligatoirement être rédigée de la main de la caution ou peut-elle l’être par celle d’un tiers ?

La mention manuscrite d’un contrat de cautionnement doit-elle obligatoirement être rédigée de la main de

Nullité du contrat de cautionnement si la mention manuscrite de la caution est rédigée par un tiers

Avec le temps, le législateur et les juges ont imposé, de plus en plus, d’obligations et de conditions de validité des contrats conclus par les consommateurs puis par les professionnels avec les banques et les établissements de crédits.

La loi a ainsi posé des conditions à la validité des contrats de cautionnement conclus par des personnes physiques en garantie du remboursement d’un crédit immobilier, professionnel ou à la consommation.

Ainsi, le Code de la consommation prévoit que les cautions doivent obligatoirement faire précéder leur signature de la mention manuscrite légale suivante et uniquement de celle-ci :

" En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même. "

De plus, lorsque le créancier demande un cautionnement solidaire la loi lui impose d’obtenir de la caution la mention manuscrite suivante :

" En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X..., je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X... ".

Cette obligation formelle de mention manuscrite a été mise en place par le législateur afin de protéger les cautions pour qu’elles puissent mesurer la portée de leurs engagements.

Par ailleurs, la jurisprudence a aussi fait du respect de cette obligation une condition essentielle de validité du contrat de cautionnement conclu par toute personne physique : consommateurs ou professionnels, sans distinction.

A cet égard, la Cour d’Appel d’Amiens a rendu un arrêt intéressant, le 21 février 2019, en prononçant la nullité d’un cautionnement car la mention manuscrite de la caution avait été écrite de la main d’un tiers, alors qu’il n’était pas rapporté la preuve que la caution était dans l'impossibilité d'écrire (Cour d’appel d’Amiens, 21 février 2019, RG n°16/05156)

Les juges ont aussi rappelé que « Ces mentions manuscrites sont destinées à assurer la protection et le consentement éclairé de la personne qui s’engage en qualité de caution par la prise de conscience de la portée et de l’étendue de l’engagement qu’elle souscrit ».

En l’espèce, une société LPMC avait souscrit auprès de la Compagnie générale de location d’équipement (CGLE), des contrats de location avec option d’achat portant sur des véhicules automobiles et le dirigeant de la société s’était porté caution solidaire du bon paiement de ces engagements.

Or, ce dernier contestait être l’auteur des mentions manuscrites apposées sur les actes de cautionnement.

La Compagnie générale de location d’équipement a donc assigné en justice la société ainsi que le dirigeant caution personnelle aux fins de paiement d’échéances de loyers impayées et de restitution des véhicules.

La caution a invoqué la nullité des cautionnements souscrits en faisant valoir que les mentions manuscrites imposées par la loi avaient été rédigées par le vendeur des véhicules et non par lui-même.

A cet égard, la caution a versé à l’appui de sa défense d’autres actes de cautionnement sur lesquels était apposée son écriture démontrant en comparaison que la mention litigieuse ne pouvait avoir été écrite par lui.

La caution a donc sollicité en vain que soit ordonnée une expertise graphologique.

L’affaire a été portée jusque devant la cour de cassation qui a renvoyé finalement la cause et les parties devant la cour d’appel d’Amiens.

Selon la cour de cassation, les juges ne pouvaient pas valablement condamner la caution à quelque paiement de sommes que ce soit sans avoir préalablement fait procéder à la vérification d’écriture de ces actes.

Pour cause, le code civil prévoit que dans le cas où une partie désavoue son écriture ou sa signature, les juges doivent en ordonnée la vérification.

Le code de procédure civile pose aussi une règle selon laquelle le juge doit vérifier l'écrit contesté par l'une des parties, à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte.

Le code rappelle qu’il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s'il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture.

Dans la détermination des pièces de comparaison, le juge peut retenir tous documents utiles provenant de l'une des parties, qu'ils aient été émis ou non à l'occasion de l'acte litigieux.

A l’analyse du cas d’espèce, les juges d’appel ont considéré que « l’écriture de la mention manuscrite des trois actes de cautionnement litigieux est fort différente dans la mesure où elle comporte notamment une inclinaison inversée tout comme l’écriture de la date et du lieu de signature. Il convient en conséquence de considérer que Monsieur Z X n’est à l’évidence pas l’auteur de la mention manuscrite de l’engagement de caution figurant sur les trois actes litigieux. »

Il découle de cet arrêt que ce n’est que si la caution n’a pas la capacité d’écrire elle-même la mention manuscrite qu’elle a la possibilité de la faire rédiger par un tiers.

En effet, il a pu être validé dans des circonstances où la caution se trouvait dans l’impossibilité d’écrire si le tiers prêtant sa main pouvait être considéré comme ayant reçu mandat de la caution la rédaction ayant lieu à la demande et en la présence de cette dernière qui a apposé sa signature.

Dès lors qu’il n’est établi ni même allégué que la caution se serait trouvée dans l’impossibilité physique de rédiger lui-même la mention manuscrite requise, un tiers ne peut être considéré comme mandataire de l’intéressé.

En conséquent, la mention manuscrite d’un cautionnement ne pourra être valable qu’à partir du moment où la caution en est l’auteur.

Le cas échéant, le cautionnement est nul et l’organisme de crédit ne pourra pas se prévaloir du cautionnement, de sorte que, la caution se trouve déchargée de son obligation de garantie de paiement. 

Cette affaire démontre à nouveau que les dirigeants et professionnels cautions disposent de différents moyens juridiques pour se défendre efficacement et tenter de se défaire de leurs engagements.

 

Elle illustre une nouvelle fois que la caution dispose de moyens de défense pour échapper à son obligation de garantie en cas d'action en paiement de l’organisme de crédit.

 

L’expertise dont dispose le cabinet Bem en matière bancaire et de défense des cautions, ainsi que son savoir-faire dans ce type de contentieux, permettent aux dirigeants de société de tenter de remettre en cause efficacement la validité de leurs cautionnements.

 

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

 

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
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