Nullité pour vice de forme d’un cautionnement professionnel donné par un dirigeant de société pour garantir le paiement des dettes de son entreprise auprès d’un fournisseur de matières premières

Publié le Modifié le 14/09/2020 Vu 2 004 fois 0
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Les dirigeants, peuvent-ils voir annuler leur cautionnement donné auprès d’un fournisseur ou d’une banque pour garantir le remboursement des dettes de leur entreprise si la mention manuscrite ne correspond pas à celle exigée par la loi?

Les dirigeants, peuvent-ils voir annuler leur cautionnement donné auprès d’un fournisseur ou d’une banqu

Nullité pour vice de forme d’un cautionnement professionnel donné par un dirigeant de société pour garantir le paiement des dettes de son entreprise auprès d’un fournisseur de matières premières

Les cautionnements personnels et solidaires souscrits par des dirigeants de société pour les besoins de leur activité peuvent facilement être annulés en raison du non-respect des termes de la formule légale obligatoire.

Le 18 juin 2020, la cour d’appel de Dijon a annulé le cautionnement professionnel donné par un dirigeant de société pour garantir le paiement des dettes de son entreprise auprès d’un fournisseur de matières premières en raison d’un vice de forme (Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 18 juin 2020, n° 18/00881)

En l’espèce, une société de fabrication et de vente de farines alimentaires a consenti à une boulangerie un prêt d’argent destiné à faire face à un besoin de fonds de roulement en contrepartie d'un engagement d'approvisionnement exclusif en farines et du nantissement de son fonds de commerce.

Le gérant de la boulangerie s'est porté caution personnelle et solidaire auprès de la minoterie.

Les échéances de remboursement du prêt ont rapidement cessé d’être payées et la société prêteuse a assigné la caution à comparaître devant le tribunal de commerce.

La caution a soulevé la nullité de son cautionnement du fait d'une absence de conformité parfaite des termes manuscrits de ce cautionnement aux prescriptions légales.

En effet, la validité d’un cautionnement professionnel suppose que les mentions y figurant répondent exactement aux exigences des dispositions de l'article L 341-2 du code de la consommation.

L'article L 341-2 du code de la consommation prévoit que : « toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : «en me portant caution de X...., dans la limite de la somme de '...couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de '.., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X.... n'y satisfait pas lui-même.».

Ce texte s'applique à tous les cautionnements souscrits par acte sous seing privé (hors la présence d’un notaire) au profit des créanciers professionnels par une personne physique (banques ou fournisseurs).

La jurisprudence a une interprétation très large de la notion de « créancier professionnel » puisqu’il s’agit de toute créance née dans le cadre de l'exercice d'une activité professionnelle.

Ainsi, tous les cautionnements souscrits dans le cadre d’une activité commerciale sont des cautionnements professionnels soumis à l’obligation de respect des termes de la mention légale manuscrite obligatoire sous peine de nullité pour vice de forme.

Selon la jurisprudence constante, le non-respect de la formule légale obligatoire en matière de cautionnement professionnel entraîne la nullité de celui-ci en raison de l’ignorance la portée de son engagement par la caution.

Dans la présente affaire, les juges d’appel ont ainsi rappelé que « les dispositions s'appliquent au cautionnement fourni par un dirigeant social pour garantir la dette de sa société ».

En l'espèce, la caution a signé l'acte de cautionnement en y apposant la mention manuscrite suivante : « bon pour cautionnement solidaire et indivisible de la SARL X pour la somme de cinquante mille trois en soixante euros (50 360 euros) ainsi que toutes les sommes dues ou à devoir à la SAS Y en principal, plus les intérêts, commissions, frais et accessoires qui pourraient en résulter pour une durée illimitée, selon les énonciations ci-dessus relatées au présent acte. » (...) « en renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec la SARL X, je m'engage à rembourser la SAS Y sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement la SARL X.».

La cour d’appel a jugé que :

« la formulation employée par la caution diffère de manière assez sensible de celle exigée par les dispositions rappelées du code de la consommation. Alors que le texte exige la mention d'un montant "couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard", c'est-à-dire d'un montant maximal incluant, outre le principal, tous les intérêts et pénalités, Monsieur X s'est engagé pour un montant chiffré ne couvrant que le principal. De plus, son engagement mentionne des commissions, frais et accessoires, qui différent de pénalités. La violation du formalisme des articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation, qui a pour finalité la protection des intérêts de la caution, est sanctionnée par la nullité. Le cautionnement souscrit par Monsieur X ne répond certes pas aux énonciations pré-citées, mais il pourrait constituer en tout état de cause un commencement de preuve par écrit pouvant être corroboré par d'autres éléments extérieurs démontrant qu'il a eu parfaitement conscience de l'étendue et de la portée de son engagement et que l'absence de conformité aux mentions légales n'affectait pas sa compréhension de la portée de son engagement.

Ainsi que le soutient la SAS Y, le cautionnement a été conclu par Monsieur X en qualité de gérant de la société cautionnée et il est signataire de l'acte de prêt qui a été garanti par son cautionnement. Néanmoins, la conscience de la portée de son engagement ne peut être recherchée dans un acte extérieur au cautionnement lui-même. Peu importe que Monsieur X soit signataire du contrat de prêt, puisqu'il l'a signé en qualité de représentant de la SARL X et pas en son nom personnel, et que l'acte de prêt ne comporte aucune mention quant à l'étendue de l'engagement de caution.

Dans ces conditions, il ne peut être considéré que Monsieur X a eu suffisamment conscience de la portée de son engagement. Son cautionnement doit être déclaré nul ».

Ainsi, le cautionnement litigieux ne comprenait pas la mention de l'engagement de la caution sur ses biens et revenus.

Les juges n’avaient donc pas d’autre choix que de constater la dissemblance des termes du cautionnement qui leur était soumis et de prononcer sa nullité pour vice de forme sur le fondement des dispositions du code de la consommation.

Il convient donc de toujours bien vérifier les termes des actes de cautionnement souscrits auprès de professionnels car, dans de nombreux cas, ils peuvent être annulés pour vice de forme, à défaut d’exactitude.

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Anthony Bem
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