Le principe de précaution ne suffit plus à interdire l'installation d'antennes relais en ville

Publié le Modifié le 09/04/2012 Vu 10 909 fois 0
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Le 30 janvier 2012, le Conseil d’État a annulé l’arrêté du maire de Noisy-le-Grand (77) par lequel ce dernier, en vertu du principe de précaution, s’est opposé à l’installation d’une antenne relai de téléphonie mobile dans sa commune (CE, 30 janvier 2012, Société Orange c. Commune de Noisy-le-Grand, n°344992)

Le 30 janvier 2012, le Conseil d’État a annulé l’arrêté du maire de Noisy-le-Grand (77) par lequel ce

Le principe de précaution ne suffit plus à interdire l'installation d'antennes relais en ville

Coup de tonnerre sur les antennes relais :

Le Conseil d'Etat vient de juger que le principe de précaution ne peut justifier les refus d'autorisation délivrée par les maires de communes pour l'installation d'antennes relais de téléphonie mobile se leur territoire.

Or, le Conseil d'État admettait l'application du principe de précaution concernant les demandes de déclaration préalable en matière de droit de l'urbanisme (CE 19 juillet  2010, Association Quartier les Hauts de Choiseul).

Déjà, par trois décisions du 26 octobre 2011, le Conseil d’État a jugé que les Maires ne peuvent, ni au titre de leurs pouvoirs de police générale ni en se fondant sur le principe de précaution adopter une réglementation portant sur l’implantation des antennes relais de téléphonie mobile et destinée à protéger le public contre les effets des ondes émises par ces antennes et par voie de conséquence annule des arrêtés municipaux interdisant sur le territoire communal l’installation d’antennes de téléphonie mobile dans un rayon de 100, 300 mètres autour des crèches, des établissements scolaires ou recevant un public mineur et des résidences de personnes âgées. (CE, 26 octobre 2011, Commune de Saint-Denis, n°326492 ; CE, 26 octobre 2011, Commune des Pennes-Mirabeau, n°329904 ; CE, 26 octobre 2011, Société Française de Radiotéléphone, n°s 341767,341768).

Le 18 mai 2011, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a refusé d'appliquer le principe de précaution et exige que soit rapporter la preuve de l'existence d’un lien de causalité direct et certain entre le dommage allégué et les ondes électromagnétiques en cause, certitude qui, sans ressortir forcément de preuves scientifiques, doit nécessairement résulter de présomptions graves, précises, fiables et concordantes (Cass. Civ. III, 18 mai 2011, n° 10-17.645).

En l'espèce, le maire de Noisy-le-Grand (77) a par un arrêté fait opposition à la déclaration préalable déposée par la SOCIETE ORANGE en vue de l'installation d'une antenne de téléphonie mobile et de baies techniques sur un terrain situé sur le territoire de sa commune.

Le maire de la Commune de Noisy-le-Grand a refusé l'installation d'une antenne de téléphonie mobile sur le fondement de :

- l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme qui dispose que : « Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ».

- le principe de précaution énoncé à l'article 5 de la Charte de l'environnement, à laquelle le Préambule de la Constitution fait référence en vertu de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005.

La SOCIETE ORANGE a donc formé un recours pour excès de pouvoir à l'encontre de l'arrêté du maire devant le juge administratif.

Par un jugement du 18 novembre 2010, le tribunal administratif a rejeté le recours en estimant que si le motif tiré de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ne pouvait légalement justifier la décision d'opposition, faute d'atteinte suffisamment certaine, en l'état des connaissances scientifiques, à la salubrité ou à la sécurité publiques, le motif tiré de l'article 5 de la Charte de l'environnement justifiait à lui seul l'arrêté attaqué.

C’est dans ce contexte que la SOCIETE ORANGE a saisi le Conseil d’Etat.

La plus Haute juridiction administrative a constaté qu' « il ne ressort des pièces versées au dossier aucun élément circonstancié de nature à établir l'existence, en l'état des connaissances scientifiques, d'un risque pouvant résulter, pour le public, de son exposition aux champs électromagnétiques émis par les antennes relais de téléphonie mobile ».

Pour annuler l'arrêté municipal litigieux, le conseil d'état a considéré que :

« Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ; que ces dispositions s'imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leurs domaines de compétence respectifs ;

qu'au demeurant, l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme prévoit que le permis de construire ou la décision prise sur la déclaration préalable de travaux doit respecter les préoccupations définies par l'article L. 110-1 du code de l'environnement qui se réfère au principe de précaution selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable ;

que s'il appartient, dès lors, à l'autorité administrative compétente de prendre en compte le principe de précaution lorsqu'elle se prononce sur l'octroi d'une autorisation délivrée en application de la législation sur l'urbanisme, les dispositions de l'article 5 de la Charte de l'environnement ne permettent pas, indépendamment des procédures d'évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d'être mises en œuvre par les autres autorités publiques dans leur domaine de compétence, de refuser légalement la délivrance d'une autorisation d'urbanisme en l'absence d'éléments circonstanciés faisant apparaître, en l'état des connaissances scientifiques, des risques, même incertains, de nature à justifier un tel refus. »

Par conséquent, il convient de relever que la seule évocation d'un risque incertain ne permet pas au Maire d'une Commune de s'opposer à une déclaration préalable pour l'installation d'une antenne de téléphonie mobile.

Seule la preuve « d'éléments circonstanciés » permettra, le cas échéant, aux Maires de faire application du principe de précaution et de refuser valablement la délivrance d'une autorisation d'urbanisme pour l'installation d'antennes relais de téléphonie mobile.

Autrement dit, à défaut « d'éléments circonstanciés », les Maires ne peuvent légalement pas s'opposer à une déclaration préalable pour l'édification d'une antenne de téléphonie mobile.

Enfin et surtout cette décision est particulièrement intéressante en ce qu'elle considère pour la première fois que les risques sanitaires encourus du fait de l'exposition aux antennes relais sont incertains au regard des normes de distance minimale adoptées dans plusieurs pays voisins, de sorte que ce risque ne puisse justifier à lui-seul un refus d'installation.

Avec cette nouvelle jurisprudence, le principe de précaution n'est plus un principe d'interdiction automatique des installations d'antennes relais.

Je suis à votre disposition pour toute information ou action.

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Anthony Bem
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