Responsabilité de la banque pour soutien abusif en cas de crédit personnel consenti à un dirigeant de société déficitaire pour renflouer celle-ci

Publié le Modifié le 14/09/2020 Vu 2 714 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

Les banques ne peuvent pas prêter des fonds de manière totalement libres à leurs clients.

Les banques ne peuvent pas prêter des fonds de manière totalement libres à leurs clients.

Responsabilité de la banque pour soutien abusif en cas de crédit personnel consenti à un dirigeant de société déficitaire pour renflouer celle-ci

Elles doivent notamment vérifier préalablement la solvabilité de leurs emprunteurs, sauf à engager leur responsabilité sur le fondement de la notion de « soutien abusif » et d’avoir le cas échéant à les indemniser de leurs préjudices subis.

Ainsi, le 15 juin 2020, la cour d’appel d’Agen a sanctionné une banque pour soutien abusif d’une société suite au prêt consenti personnellement à son dirigeant pour les besoins de financement de celle-ci (CA Agen, ch. civ., 15 juin 2020, n° 17/01303).

En l’espèce, la banque Société Générale a consenti un prêt personnel à un artisan pour les besoins du refinancement de son entreprise, afin de la renflouer.

Les échéances de remboursement du prêt sont restées impayées et la banque a prononcé la déchéance du terme du crédit, c’est à dire demander le payement intégral et immédiat de prêt à l’emprunteur défaillant.

Or, l’emprunteur était bénéficiaire du revenu de solidarité active (RSA) et n'a pas signé la fiche des informations personnelles que la conseillère a remplie unilatéralement et qu'elle n’a pas cru nécessaire de lui communiquer.

La fiche de renseignements à l'appui du dossier de demande de prêt indiquait un seul revenu mensuel de 855 euros, soit le seuil de pauvreté en France.

En ajoutant les charges des mensualités de prêt, le taux d'endettement de l’emprunteur était de 46,19 %.

C’est dans ce contexte que l’emprunteur a assigné la banque devant le tribunal de grande instance pour la voir condamner à l’indemniser des préjudices subis suite au manquement à son devoir de d'information, de mise en garde et de conseil.

En effet, l'entreprise était confrontée à un résultat négatif et avait ses comptes bancaires à la même agence que son dirigeant de sorte que la banque ne pouvait ignorer la situation financière difficile de la société.

La banque société Générale ne pouvait donc pas ignorer, dès avant les versements de fonds, qu'elle consentait un crédit équivalent à un prêt à la consommation à un dirigeant d'entreprise qui n'était plus en état de dégager un revenu personnel de son activité professionnelle et qui serait amené à consommer tout ou partie du montant du prêt comme son revenu de substitution.

La cour d’appel a jugé que « la banque qui consent une opération de crédit, au dirigeant d'une société en grande difficulté, ayant pour objet ou pour effet de renflouer celle-ci, participe ainsi à une opération de soutien abusif par personne interposée et doit mettre en garde ce dirigeant, quand il est non averti, des risques qu'il encourt ».

Dans ce contexte, les juges d’appel ont considéré qu’« Indépendamment de l'insincérité de la fiche d'information, la Société Générale a manqué à son devoir de mise en garde ».

Il résulte de cette affaire que la banque qui consent un crédit personnel au dirigeant d'une société en difficulté pour renflouer celle-ci engage sa responsabilité pour soutien abusif comme si elle avait prêté de l’argent à la société elle-même.

Il est aussi important de souligner que la qualité de gérant de société ne confère pas automatiquement le statut d'emprunteur averti et qu’il appartient donc à la banque de prouver que l'emprunteur est averti des conséquences du crédit pour se dégager juridiquement de toute responsabilité.

La cour d’appel a rappelé que la preuve de l'existence de la chance perdue de ne pas souscrire un crédit périlleux incombe au demandeur en réparation et que la réparation de la perte de chance doit être « mesurée à la chance et elle ne peut être égale, ni encore moins supérieure, à l'avantage qu'aurait procuré la chance si elle s'était réalisée ».

Ainsi, les juges évaluent au cas par cas sur la base des éléments et pièces produits aux débats par l’emprunteur, sa détermination à se procurer le crédit convoité et la chance de ne pas risquer avoir à engager ses biens et patrimoine.

Par conséquent, il convient de garder en le mémoire qu’en cas de soutien abusif de sociétés par les banques ou de défaut de mise en garde des emprunteurs sur les conséquences financièrement périlleuses des crédits accordés, ceux-ci disposent d’un droit à l’octroi de dommages et intérêts en réparation de leur perte de chance de ne pas contracter l'emprunt litigieux.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
01 40 26 25 01
abem@cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1426 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1426 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles