Responsabilité des chirurgiens pour défaut d’information des risques du patient ou faute médicale

Publié le 11/05/2013 Vu 8 426 fois 0
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Le 6 février 2013, la Cour de cassation a jugé que les chirurgiens engagent leur responsabilité s’ils ne donnent pas à leurs patients des soins conformes aux données acquises de la science, même pour éviter des complications connues, ou s’ils ne peuvent pas démontrer avoir informé ceux-ci des risques précis des suites opératoires, notamment par la remise d’une brochure exhaustive (Cass. Civ. I, 6 février 2013, N° de pourvoi: 12-17423)

Le 6 février 2013, la Cour de cassation a jugé que les chirurgiens engagent leur responsabilité s’ils ne

Responsabilité des chirurgiens pour défaut d’information des risques du patient ou faute médicale

Le code de la santé publique organise le droit à la réparation des préjudices subis par les patients dans le cadre des actes médicaux ou chirurgicaux.

L'article L. 1111-2 du code de la santé publique dispose que :

« Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à l'exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d'impossibilité de la retrouver.

Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser.

Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel.

La volonté d'une personne d'être tenue dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de transmission.

Des recommandations de bonnes pratiques sur la délivrance de l'information sont établies par la Haute Autorité de santé et homologuées par arrêté du ministre chargé de la santé.

En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen… ».

De plus, l'article L. 1142-1 du code de la santé publique dispose que :

« I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère.

II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.

Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret ».

En l'espèce, un chirurgien a pratiqué sur une patiente une opération de plastie abdominale (abdominoplastie) consistant à raffermir le ventre et à effacer les rondeurs.

Les suites opératoires avaient été émaillées par l'apparition d'une nécrose cutanée.

La patiente a donc sollicité la désignation d’un expert médical afin de faire la lumière sur une éventuelle faute commise par le chirurgien.

L’expert a indiqué que la complication survenue au cours de l'intervention pratiquée par le chirurgien ne résultait pas d'une faute médicale mais constituait un aléa thérapeutique.

Les juges d'appel ont donc rejeté la demande de mise en jeu de la responsabilité du chirurgien.

Les premiers juges ont notamment tenu compte de ce que la patiente avait signé une autorisation d'opérer avec accord sur l'information qui lui a été donnée, en ces termes : "j'accepte l'opération chirurgicale proposée par le docteur Etienne Marie Y.... Je sais qu'il n'existe pas d'acte chirurgical sans risque et que des complications sont possibles même si l'intervention est conduite normalement ; je reconnais que la nature de l'opération prévue ainsi que ses avantages et ses risques m'ont été expliqués en termes que j'ai compris, le docteur Etienne Marie Y... a répondu de façon satisfaisante à toutes les questions que je lui ai posées. J'ai bien noté que toute intervention peut comporter des difficultés qui peuvent contraindre mon chirurgien à en modifier le cours dans l'intérêt de mon état de santé actuel et futur" ;

Cependant, la cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt d'appel en considérant que :

« en statuant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, d'une part, si la nécrose cutanée à la jonction des cicatrices verticale et horizontale, complication connue pour les plasties abdominales dont elle avait constaté la survenance, n'aurait pas pu être évitée par un geste médical adapté, d'autre part, si M. Y... n'avait pas failli à son obligation d'expliciter les risques précis de l'abdominoplastie, notamment par la remise d'une brochure exhaustive, telle que celle qui avait été remise à Mme X... lors de la seconde intervention, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ». 

Implicitement, les juges de la cour de cassation considèrent que le préjudice constaté en l’espèce aurait pu être évité par un geste médical adapté et/ou par la délivrance d’une information explicite sur les risques précis de l’opération réalisée.

Il résulte de cette décision que les chirurgiens engagent leur responsabilité lorsque :

- ils ne donnent pas des soins conformes aux données acquises de la science pour éviter même des complications connues ;

- ils ne peuvent pas démontrer avoir informé précisément leur patient sur les risques des suites opératoires encourus, notamment par la remise d’une brochure exhaustive.

Enfin, il est important de relever que la Haute juridiction a considéré que l’autorisation d'opérer donnée par la patiente à son chirurgien ne valait pas acceptation des risques et ne permettait pas de prouver le bon respect de son obligation d’information par ce dernier.

Par conséquent, le patient doit être précisément informé par son médecin sur les risques inhérents à l’opération envisagée et, en cas de litige, le professionnel de santé doit être en mesure de produire un document d’information personnalisé sur les risques encourus et signé par le patient pour échapper à la mise en jeu de sa responsabilité.

Les formules et les formulaires types ou standardisés tendant à exonérer voir limiter la responsabilité des professionnels de santé sont donc nulles.

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