Le retrait de fonctions d'un fonctionnaire et l'absence de rémunération constitutifs de harcèlement

Publié le Modifié le 28/09/2015 Vu 4 833 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

La collectivité publique engage-t-elle sa responsabilité en cas de mise à l’écart d'un fonctionnaire, absence de versement de rémunération et retrait de tâches administratives ?

La collectivité publique engage-t-elle sa responsabilité en cas de mise à l’écart d'un fonctionnaire, ab

Le retrait de fonctions d'un fonctionnaire et l'absence de rémunération constitutifs de harcèlement

Le 24 juillet 2015, la Cour administrative d'appel de Marseille a jugé que la mise à l’écart d'un fonctionnaire, le retrait de tâches administratives et l'absence de versement de rémunération constituait un ensemble d’agissements qui ont pour effet de dégrader les conditions de travail et la santé, ainsi que de compromettre son avenir professionnel et qui présentent dès lors le caractère d’un harcèlement moral et donc d’une faute de nature à engager la responsabilité de la collectivité à son égard (Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 24 juillet 2015, 13MA03470)

En l'espèce, une fonctionnaire, secrétaire générale de mairie, se plaignait de : 

- avoir été dépouillée progressivement dans des conditions humiliantes et vexatoires de la plupart des responsabilités et missions qui lui étaient confiées, 

- mise à l’écart de manière injustifiée, 

- diverses vexations durant plusieurs années,

- de conditions de vie précaires pendant dix mois faute de versement de sa rémunération.

Elle a donc assigné la commune qui l'employait devant le tribunal administratif pour dégradation de ses conditions de travail ET en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d’existence résultant des fautes commises par la commune.

Dans un premier temps, le tribunal administratif  a écarté l’existence du préjudice du fait de la dégradation de ses conditions de travail et rendu un jugement qui a limité son indemnisation au préjudice résultant du retard de versement de sa rémunération et à ce montant.

Or, aux termes de l’article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issu de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : "Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel".

Pour mémoire, le harcèlement moral e suppose donc la réunion des critères cumulatifs suivants :

- Des agissements répétés,

- Une dégradation des conditions de travail,

- Une atteinte à la personne de l’agent harcelé.

Sur le fondement de cette disposition légale, la Cour administrative d'appel de Marseille a réformé le jugement du tribunal administratif et condamné la commune à verser une indemnisation du fonctionnaire communale au titre du harcèlement subi par ce dernier.

Pour ce faire les juges d'appel ont pris en considération le fait que :

- elle n’a pas perçu de rémunération pendant près d’un an et que la commune a attendu près de quatre mois, après l’allocation par le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes d’une provision, pour régulariser sa situation,

- la plupart des fonctions qui lui étaient confiées en sa qualité de secrétaire générale de la mairie avant son congé de maladie, lui ont été retirées et qu’elle a notamment été écartée de la tenue du secrétariat des séances du conseil municipal, du secrétariat du bureau centralisateur des scrutins, des fonctions de représentation de la commune auprès de la communauté de communes et de nombreuses autres fonctions telles que la préparation du budget de la commune, la préparation des délibérations, le calcul des impositions locales, la préparation des dossiers de subvention, le suivi des dossiers d’emprunts, l’examen de la dette de la commune, le suivi des dossiers de marchés, les dossiers de médailles d’honneur et la gestion du courrier,

- il n'existait aucun motif d’intérêt général justifiant qu’elle ait été écartée des fonctions qui lui étaient antérieurement confiées ,dont l’existence ou le contenu ne peuvent être substantiellement affectés par un transfert de compétences au profit de la communauté de communes,

Selon la Cour administrative d'appel de Marseille :

"la commune a commis un ensemble d’agissements qui ont eu pour effet de dégrader ses conditions de travail et sa santé, ainsi que de compromettre son avenir professionnel au sens des dispositions précitées de la loi du 13 juillet 1983 et qui présentent dès lors le caractère d’un harcèlement moral et donc d’une faute de nature à engager la responsabilité de la collectivité à son égard".

L’exercice de ces fonctions de secrétariat constituaient donc bien un droit pour l'agent dont le retrait est assimilé à un harcèlement moral indemnisable par la collectivité publique qui l'employait.

Enfin, il convient de garder en mémoire que l'appréciation des faits de harcélement se fait au cas par cas et que les juges disposent d'un pouvoir souverain d'appréciation des faits.

A cet égard, il est important de souligner que la victime ne doit pas prouver l’existence du harcèlement moral dont il se plaint.

L'agent doit en effet simplement rapporter la preuve d'éléments de faits susceptibles d’en faire présumer l’existence tandis que l’administration doit produire en sens contraire que les agissements en cause ne sont pas constitutifs d’un harcèlement.

Je suis à votre disposition pour toute information ou action.

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01

Email : abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1426 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1426 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles