Bail commercial dérogatoire: nouvelle limite de durée et effet du terme à l’égard des parties

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La loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises a introduit d’importantes modifications quant à la durée et à l’effet du terme du bail commercial dérogatoire.

La loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises a introduit d’i

Bail commercial dérogatoire: nouvelle limite de durée et effet du terme à l’égard des parties

Le bail dérogatoire est un bail commercial de courte durée qui a la particularité d’échapper aux dispositions du statut des baux commerciaux classiques, aussi appelés baux 3/6/9.

Ainsi, l’avantage principal de ce bail pour le locataire exploitant un fonds de commerce est de ne pas être contraint de s’engager sur une longue période.

Aussi, ce bail est dit « dérogatoire » en ce que le montant du loyer peut être fixé librement par les parties et n’est pas plafonné, à la différence d’un bail commercial statutaire.

Toutefois, pour bénéficier d’un tel régime, le bail commercial de courte durée est soumis à certaines conditions légales.

Pour mémoire, selon l’article L.145-5 du code de commerce, la signature de ce bail est possible :

-  seulement lors de l’entrée du locataire dans les locaux, et non suite à un bail commercial classique;

- s’il est établi par écrit;

- si les parties expriment expressément dans le contrat leur intention de déroger au statut des baux commerciaux. 

Aussi et surtout, le bail commercial dérogatoire est soumis à une limite de durée depuis son introduction par le décret n°53-960 du 30 septembre 1953 réglant les rapports entre bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux à loyer d'immeubles ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal.

A l’origine, l’article L.145-5 du code de commerce prévoyait que le bail commercial dérogatoire ne pouvait excéder la durée de deux ans, et ce sans être contraint à une durée minimum.

Or, précisément à cet égard, la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, dite loi « Pinel », entrée en vigueur le 20 juin 2014, a introduit d’importantes modifications.

En effet, cette loi a modifié les dispositions de l’article L.145-5 du code de commerce précité quant à la durée (1) et à l’effet du terme du bail dérogatoire à l’égard des parties (2).

1. La nouvelle limite de durée du bail dérogatoire

L’article L.145-5 alinéa 1 du code de commerce dispose désormais que :

« Les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du présent chapitre à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à trois ans. »

Ainsi, le bailleur et le locataire peuvent conclure un bail dérogatoire d’une durée de 3 ans et non plus seulement de 2 ans comme auparavant.

A cet égard, il convient de préciser qu’il s’agit d’une durée maximum de sorte que les parties peuvent toujours s’engager pour une durée moindre.

Aussi, s’il est permis de conclure plusieurs baux dérogatoires de manière successive, leur durée totale ne peut pas dépasser 3 ans.

2. L’effet du terme du bail dérogatoire à l’égard des parties

La loi « Pinel » précise l’effet du terme du bail dérogatoire à l’égard des parties par:

  • l’interdiction de conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux (a) ; et 

  • l’introduction d’un délai pour décider des suites de la relation contractuelle au terme du bail (b).

a. L’interdiction de conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux

L’article L.145-5 alinéa 1 du code de commerce prévoit aussi que :

« A l'expiration de cette durée, les parties ne peuvent plus conclure un nouveau bail dérogeant aux dispositions du présent chapitre pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux ».

Dès lors, ce texte interdit expressément aux parties de conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fonds de commerce dans les mêmes locaux à l’expiration de la durée de trois ans.

Il en résulte que, le bailleur et le locataire peuvent conclure un nouveau bail dérogatoire à l’issue de cette période de trois ans, seulement dans les deux cas suivants :

  • pour l’exploitation d’un autre fonds de commerce, dans les mêmes locaux ou ; 

  • pour l’exploitation du même fonds de commerce, dans d’autres locaux.

b. L’introduction d’un délai pour décider des suites de la relation contractuelle au terme du bail

Auparavant, lorsque le locataire restait et était laissé en possession des lieux à l'expiration du bail dérogatoire, le bail dérogatoire se transformait automatiquement en un nouveau bail commercial classique, soit un bail 3/6/9 propre au statut des baux commerciaux.

Il en résultait des conséquences préjudiciables à l’égard des parties qui ne souhaitaient pas être liées par ce nouveau bail.

En effet, le locataire commerçant pouvait par le seul fait de sa présence dans les locaux pris à bail au-delà du terme se trouver engagé pour une longue période, malgré sa volonté, et être ainsi contraint au paiement de nouveaux loyers, au minimum jusqu’à la fin de la première période triennale obligatoire du bail.

A cet égard, la loi « Pinel » a apporté des modifications.

En effet, l’article L.145-5 alinéa 2 dispose désormais que :

« Si, à l'expiration de cette durée, et au plus tard à l'issue d'un délai d'un mois à compter de l'échéance le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions du présent chapitre ».

Autrement dit, lorsque le locataire reste et est laissé en possession des lieux à l’expiration de la durée du bail dérogatoire, les parties disposent d’un délai d’un mois à compter de ce terme pour renoncer à la formation d’un contrat de bail commercial statutaire.

Concrètement, le locataire aura un mois pour quitter les lieux afin de mettre un terme définitif à ses relations contractuelles avec le bailleur.

De son côté, le bailleur, propriétaire des locaux, pourra, par lettre recommandée avec accusé de réception, notifier au locataire sa volonté de le voir quitter les lieux avant la fin du délai d’un mois.

De la même manière, le bailleur peut ne pas avoir à notifier au locataire sa possibilité de rester dans les lieux afin de faire naître un nouveau lien contractuel soumis au statut des baux commerciaux 3/6/9, et ainsi obtenir au moins trois ans de loyer.

Enfin, il convient de préciser que ces nouvelles dispositions légales ne changent rien au fait que les parties ont toujours la possibilité de s’entendre amiablement et de donner congé avant le terme du bail dérogatoire. 

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

Anthony Bem 

Avocat à la Cour 

27 bd Malesherbes - 75008 Paris 

Tel : 01 40 26 25 01 

Email : abem@cabinetbem.com

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1 Publié par Visiteur
03/01/2018 10:03

bonjour,
j'aimerais signer un bail precaire pour un hangar du 1er fevrier au 31 decembre 2018 est ce possible si le bailleur et moi meme sommes d'accord?quel genre de bail faut il que je fasse car je veux le louer pour le moment juste personnellement et au courant de l'annee peut etre en faire le lieu de mon activite professionnelle.car aujourd'hui je suis sur un projet de creation d'entreprise dans l'automobile mais je ne suis pas pret a ouvrir encore avant quelques mois.et je ne voudrais pas les contraintes qu'incluent un bail commercial classique(assurances pro,etre lié 3ans si l'entreprise n'etait pas viable).mais c'est une tres bonne affaire que je ne risque pas de retrouver donc j'aimerais le louer pour l'instant cette annee sans risque.on m'a parlé egalement d'un bail derogatif mais je ne sais pas quelle raison invoquée qui serait valable.j'espere que vous m'aiderez a trouver la meilleure facon de faire le meilleur bail dans mon cas precis.merci d'avance de votre attention,cordialement.

2 Publié par Visiteur
09/01/2018 15:26

Bonjour Maître,

J'ai pris un local commercial avec un bail précaire, je rencontre un certain nombre de problème dans ce bail depuis le mois d'octobre, en décembre nous avons un refoulement d'égout, le débouchage a été réalisé mais comme le problème vient du receveur collectif cela arrivera encore apparemment et notre propriétaire ne semble pas s'inquiéter de la gêne que nous rencontrons...
J'ai également un des copropriétaires qui vient me voir régulièrement car ma propriétaire n'aurait pas payer sa consommation d'eau de 2016, nous n'étions pas encore dans le local à ce moment...
Je pensais bêtement que le bail dérogatoire dérogeait au bail commercial pour ce qui était de la durée et de l'impossibilité de demander des indemnités d'éviction...
Peut elle me contraindre à payer des factures d'eau pour 2017, alors que nous n'avons pas réalisé d'état des lieux ni de relève de compteur ?

Merci d'avance pour vos réponses,

Cindy

3 Publié par Visiteur
13/01/2018 21:13

Bonjour Maitre
j'ai besoin de vos lumières .J'étais en négociations depuis de long mois pour un local commercial par le biais de la belle soeur du propriétaire hors territoire et de son notaire.Nous avons conclu un accord pour un loyer ,je devais recevoir un devis de bail car je fais des demande de subventions,je dois attendre l'accord pour louer.Apres presque 8 mois,le propriétaire à décidé de faire un bail dérogatoire à la place d'un bail commercial ,j'attendais donc ce devis. Debut Janvier sans nouvelles j'appelle,la belle soeur qui me dit que le propriétaire à un prévu un autre locataire .A t'il le droit de faire ça sachant que j'ai fais beaucoup de démarches, dépenser de l'argent et monter 3 dossiers ,quel est mon recours ? merci Maître pour vos conseil je suis désespérée.Cordiales Salutations Fabienne Mohamed de Tahiti

4 Publié par Maitre Anthony Bem
13/01/2018 23:25

Bonjour Fabienne,

La rupture unilatérale des négociations pré-contractuelles peut donner lieu à une indemnisation des préjudices subis le cas échéant, mais il vous faudra je pense agir en justice à cet effet.

Cordialement.

5 Publié par Visiteur
14/02/2018 19:51

Bonjour Maître,
Mon locataire a donné son préavis dans les formes, six mois avant la fin de la seconde période triennale. Aujourd'hui après avoir rencontré des problèmes pour se réinstaller il souhaiterait finalement rester et signer un bail précaire pour une année supplémentaire.
Dans la mesure où cela me convient, est-ce légal ou existe-il une forme de bail plus appropriée pour garder ce locataire une année supplémentaire?
Merci d'avance pour votre retour.

6 Publié par Maitre Anthony Bem
15/02/2018 00:21

Bonjour Robert,

Je vous confirme que la signature d’un bail précaire pour une année supplémentaire est tout à fait adapter à votre situation.

Cordialement.

7 Publié par Visiteur
19/02/2018 15:00

Bonjour Maître.

On peut donc établir un bail précaire pour du professionnel ou du commercial. Mais si le locataire se targue d'une sorte de création de "fond de commerce", peut-il réclamer une indemnité d'éviction à la sortie ?

8 Publié par Maitre Anthony Bem
19/02/2018 21:37

Bonjour Olivier P,

Le locataire d’un local commercial, dans le cadre d’un bail précaire, ne peut pas en tant que tel réclamer au bailleur le paiement d’une indemnité d'éviction au terme du bail.

Cordialement.

9 Publié par Visiteur
12/03/2018 19:06

bonjours maitre

je me permets de vous poser une question à laquelle je suis sans réponse voilà si je loue un local pour usage commercial sans signature d'un bail puije partir quand je veux et quel sera le délai obligatoire de mon préavis je tiens à vous remercier de ce renseignement bien préçieux qui m'aidera je vous remercie de la gentillesse si vous pouviez me répondre saphault

10 Publié par Maitre Anthony Bem
12/03/2018 19:15

Bonjour saphault,

Il est tout à fait possible de conclure un bail commercial verbal, sans écrit.

Dans ce cas, il est soumis aux dispositions légales de droit commun qui imposent au locataire, preneur à bail, le respect d’un délai de préavis de six mois avant chaque période triennale pour donner congés au bailleur.

Cordialement.

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