Bail commercial dérogatoire: nouvelle limite de durée et effet du terme à l’égard des parties

Publié le Modifié le 22/04/2015 Vu 84 951 fois 154
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

La loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises a introduit d’importantes modifications quant à la durée et à l’effet du terme du bail commercial dérogatoire.

La loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises a introduit d’i

Bail commercial dérogatoire: nouvelle limite de durée et effet du terme à l’égard des parties

Le bail dérogatoire est un bail commercial de courte durée qui a la particularité d’échapper aux dispositions du statut des baux commerciaux classiques, aussi appelés baux 3/6/9.

Ainsi, l’avantage principal de ce bail pour le locataire exploitant un fonds de commerce est de ne pas être contraint de s’engager sur une longue période.

Aussi, ce bail est dit « dérogatoire » en ce que le montant du loyer peut être fixé librement par les parties et n’est pas plafonné, à la différence d’un bail commercial statutaire.

Toutefois, pour bénéficier d’un tel régime, le bail commercial de courte durée est soumis à certaines conditions légales.

Pour mémoire, selon l’article L.145-5 du code de commerce, la signature de ce bail est possible :

-  seulement lors de l’entrée du locataire dans les locaux, et non suite à un bail commercial classique;

- s’il est établi par écrit;

- si les parties expriment expressément dans le contrat leur intention de déroger au statut des baux commerciaux. 

Aussi et surtout, le bail commercial dérogatoire est soumis à une limite de durée depuis son introduction par le décret n°53-960 du 30 septembre 1953 réglant les rapports entre bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux à loyer d'immeubles ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal.

A l’origine, l’article L.145-5 du code de commerce prévoyait que le bail commercial dérogatoire ne pouvait excéder la durée de deux ans, et ce sans être contraint à une durée minimum.

Or, précisément à cet égard, la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, dite loi « Pinel », entrée en vigueur le 20 juin 2014, a introduit d’importantes modifications.

En effet, cette loi a modifié les dispositions de l’article L.145-5 du code de commerce précité quant à la durée (1) et à l’effet du terme du bail dérogatoire à l’égard des parties (2).

1. La nouvelle limite de durée du bail dérogatoire

L’article L.145-5 alinéa 1 du code de commerce dispose désormais que :

« Les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du présent chapitre à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à trois ans. »

Ainsi, le bailleur et le locataire peuvent conclure un bail dérogatoire d’une durée de 3 ans et non plus seulement de 2 ans comme auparavant.

A cet égard, il convient de préciser qu’il s’agit d’une durée maximum de sorte que les parties peuvent toujours s’engager pour une durée moindre.

Aussi, s’il est permis de conclure plusieurs baux dérogatoires de manière successive, leur durée totale ne peut pas dépasser 3 ans.

2. L’effet du terme du bail dérogatoire à l’égard des parties

La loi « Pinel » précise l’effet du terme du bail dérogatoire à l’égard des parties par:

  • l’interdiction de conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux (a) ; et 

  • l’introduction d’un délai pour décider des suites de la relation contractuelle au terme du bail (b).

a. L’interdiction de conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux

L’article L.145-5 alinéa 1 du code de commerce prévoit aussi que :

« A l'expiration de cette durée, les parties ne peuvent plus conclure un nouveau bail dérogeant aux dispositions du présent chapitre pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux ».

Dès lors, ce texte interdit expressément aux parties de conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fonds de commerce dans les mêmes locaux à l’expiration de la durée de trois ans.

Il en résulte que, le bailleur et le locataire peuvent conclure un nouveau bail dérogatoire à l’issue de cette période de trois ans, seulement dans les deux cas suivants :

  • pour l’exploitation d’un autre fonds de commerce, dans les mêmes locaux ou ; 

  • pour l’exploitation du même fonds de commerce, dans d’autres locaux.

b. L’introduction d’un délai pour décider des suites de la relation contractuelle au terme du bail

Auparavant, lorsque le locataire restait et était laissé en possession des lieux à l'expiration du bail dérogatoire, le bail dérogatoire se transformait automatiquement en un nouveau bail commercial classique, soit un bail 3/6/9 propre au statut des baux commerciaux.

Il en résultait des conséquences préjudiciables à l’égard des parties qui ne souhaitaient pas être liées par ce nouveau bail.

En effet, le locataire commerçant pouvait par le seul fait de sa présence dans les locaux pris à bail au-delà du terme se trouver engagé pour une longue période, malgré sa volonté, et être ainsi contraint au paiement de nouveaux loyers, au minimum jusqu’à la fin de la première période triennale obligatoire du bail.

A cet égard, la loi « Pinel » a apporté des modifications.

En effet, l’article L.145-5 alinéa 2 dispose désormais que :

« Si, à l'expiration de cette durée, et au plus tard à l'issue d'un délai d'un mois à compter de l'échéance le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions du présent chapitre ».

Autrement dit, lorsque le locataire reste et est laissé en possession des lieux à l’expiration de la durée du bail dérogatoire, les parties disposent d’un délai d’un mois à compter de ce terme pour renoncer à la formation d’un contrat de bail commercial statutaire.

Concrètement, le locataire aura un mois pour quitter les lieux afin de mettre un terme définitif à ses relations contractuelles avec le bailleur.

De son côté, le bailleur, propriétaire des locaux, pourra, par lettre recommandée avec accusé de réception, notifier au locataire sa volonté de le voir quitter les lieux avant la fin du délai d’un mois.

De la même manière, le bailleur peut ne pas avoir à notifier au locataire sa possibilité de rester dans les lieux afin de faire naître un nouveau lien contractuel soumis au statut des baux commerciaux 3/6/9, et ainsi obtenir au moins trois ans de loyer.

Enfin, il convient de préciser que ces nouvelles dispositions légales ne changent rien au fait que les parties ont toujours la possibilité de s’entendre amiablement et de donner congé avant le terme du bail dérogatoire. 

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

Anthony Bem 

Avocat à la Cour 

27 bd Malesherbes - 75008 Paris 

Tel : 01 40 26 25 01 

Email : abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1427 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

1 Publié par Visiteur
16/05/2017 17:22

Bonjour Maitre,
J'ai résignée le mois de décembre un deuxième bail précaire d'un an pour mon commerce.
Suite a une activité très faible nous sommes obligé de fermé avant la fin du bail.
Comment je peux mettre fin a mon bail avant son terme(mois de décembre) en sachant que j'ai une clause de résiliation très vague: la force majeur?
J'ai précise que j'ai déposé un chèque de caution et j'ai aussi un garant.
Merci en avance pour votre temps en vos conseils.
Cordialement

2 Publié par Maitre Anthony Bem
17/05/2017 22:16

Bonjour Helga,

Il est possible de résilier un bail commercial précaire en respectant la durée du préavis du congés mentionné dans le contrat de bail.

À défaut, la durée du préavis du congé est due, sauf à ce que le bailleur accorde un délai plus court ou s'abstienne de demander le paiement du loyer sur la période.

Cordialement.

3 Publié par Visiteur
30/05/2017 14:05

Bonjour monsieur BEM,

J'ai signé en septembre 2014 un bail a occupation précaire pour une durée de 24 mois !

Nous somme en mai 2017 et le bailleur ma annoncer au téléphone que je n'avais plus de bail depuis septembre 2016...face a mon étonnement je demande de bien vérifier si il y a une erreur étant donné que nous occupons toujours le local que, nous payons le loyer et que nous recevons toujours la même quittance !
la personne me répond que je peux rester dans cette situation au moins jusque 37 mois après signature du bail, ce qui fait qu en septembre 2017 vous devrez quitter le local !

est ce légal ? ai je un recour ?

4 Publié par Maitre Anthony Bem
30/05/2017 15:20

Bonjour BENTESS,

Votre bail d'occupation précaire s'est transformé en bail commercial de droit commun.

Votre bailleur ne peut donc pas vous faire quitter le local sans vous avoir au préalable indemnisé en vous versant une indemnité d'éviction.

Cordialement.

5 Publié par Visiteur
31/05/2017 12:44

Bonjour monsieur BEM,

Merci pour votre réponse et merci pour votre disponibilité !

nous sommes dans la 3 ieme année de bail précaire (LOI PINEL) donc le bailleur peut au bout de cette 3ieme année nous demander de quitter le local ou nous faire bénéficier d'un bail commercial...

6 Publié par Visiteur
01/06/2017 12:03

Bonjour Maitre,
Merci pour votre réponse.

Cordialement

7 Publié par Visiteur
23/06/2017 17:33

Bonjour,Maître
J'ai signé un bail précaire de 24 mois ! je voulais savoir si il y à possibilité de partir avant la fin de ce contrat pour des raison pécuniaire !

merci d'avance
Jean-Michel

8 Publié par Maitre Anthony Bem
23/06/2017 23:18

Bonjour jmdb,

Il n'est possible de partir avant la fin d'un bail précaire que si les parties sont d'accord pour y mettre un terme amiablement.

À défaut, il doit être exécuté jusqu'à son terme.

Cordialement.

9 Publié par Visiteur
01/07/2017 04:31

Bonjour Maitre,

Nous souhaitons revendre notre fond de commerce pour départ a la retraite définitif, en effet mon père a perçu sa retraite en 2015 cependant il exerce toujours son activité ( actif/ retraite), il souhaite revendrev son local en bénéficiant de la despecialisation pour l acquéreur, peut il évoquer cette possibilité auprès du bailleur, où le fait qu'il sa retraite soit déjà liquidé ne lui permet plus d'y prétendre. Quel est le délai exigé entre la liquidation de la retraite et la vente du fond en évoquant la despecialisation pour prise de retraite. Cdlt

10 Publié par Maitre Anthony Bem
01/07/2017 09:00

Bonjour Fred,

Je vous confirme que votre père parfaitement revendre son fonds de commerce pour départ à la retraite.

Votre père peut aussi bénéficier de la despecialisation de l'activité exploitée dans le local commercial.

Il s'agira alors d'une cession du droit au bail commercial et il conviendra donc idéalement de conclure un nouveau bail avec le bailleur pour prévoir la nouvelle activité commerciale et le nouveau loyer.

Il ne me semble pas qu'il existe de délai légal à respecter entre la liquidation de la retraite et la vente du fonds pour départ à la retraite.

Cordialement.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1427 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles