Au sein d’une copropriété, les différents propriétaires doivent se concerter sur les opérations relatifs aussi bien sur les parties communes, que les parties privée de la copropriété.
Ainsi, afin d’éviter tout conflit entre les copropriétaires, la loi a imposé une obligation de consultation préalable en assemblée générale, réunissant l’ensemble des copropriétaires.
Dès lors, l’assemblée générale des copropriétaires fonctionne de la même manière qu’une assemblée démocratique, l’avis de la majorité fait la loi (conformément à l’article 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965).
Mais il arrive que la majorité se transforme en un instrument de blocage, lésant le ou les copropriétaire(s) minoritaire(s).
Cependant ces derniers ne retrouvent pas démunies face à une décision abusive et dispose d’un recours juridictionnel.
- Notion d’abus de majorité.
Un abus de majorité consiste à utiliser la majorité dans un intérêt autre que collectif. Il peut s’agir alors soit d’un intérêt personnel, soit dans l’intention de nuire, ou encore sans motif légitime.
A cet égard, la Cour de cassation a récemment voulu rappeler et clarifier le contenu de l’abus de majorité.
Ainsi par un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation, en date du 9 juin 2016, n° 15-17.529, il est rappelé que l’abus de majorité s’entend :
- ou bien d’une décision contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires,
- ou bien d’une décision adoptée dans le seul but de favoriser les intérêts collectifs des copropriétaires,
- ou bien d’une décision adoptée dans le but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires.
L’abus de majorité est alors caractérisé en présence de deux conditions cumulatives :
- une résolution d’assemblée générale qui doit être contraire à l’intérêt de la société,
- une résolution constitutive d’une rupture d’égalité entre les associés,
Dès lors, il a été jugé par l’arrêt cité précédemment du 9 septembre 2016, que le changement de destination d’un lot refusé par une décision d’assemblée générale est insuffisant à caractériser un abus de majorité car, il n’est ni contraire au règlement de copropriété, ni contraire à la destination de l’immeuble.
En revanche, il est abusif d’adopter une solution économique privilégiant la sécurité d’une partie seulement des copropriétaires, alors qu’une autre solution assurait la sécurité du plus grand nombre (voir Cour d’appel de Paris, 23e ch.B, 10 février 2000).
En ce sens, a été jugé d’abusif le refus du syndicat d’exécuter des travaux de réfection d’une partie de l’immeuble, sans motif valable. L’assemblée générale a abusé de ses droits en refusant de voter les travaux de remise en état des poutres, et en rejetant toute solution amiable ou de compromis permettant l’exécution desdits travaux sans risque pour la trésorerie de la copropriété (voir Cour d’appel de Paris, 22 mars 1991).
En cas d’abus de majorité, le copropriétaire minoritaire peut engager une action en nullité des décisions d’assemblée générale.
II. Sanction de l’abus de majorité : recours en annulation.
L’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis dispose que : « Les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l'assemblée générale.»
Le copropriétaire souhaitant contester une décision pour abus de majorité doit être diligent car l’action doit être engagée dans les deux mois à compter de la notification de la décision.
Ainsi tant que le copropriétaire opposant ou défaillant n’a pas reçu la notification régulière des décision, le délai de deux moins ne court pas à son égard.
L’action doit être engagée devant le tribunal de grande instance du lieu de situation de l’immeuble (article 62 du décret du 17 mars 1967), et exclusivement contre le syndicat des copropriétaires, pris en la personne de son représentant légal, le syndic en exercice à la date de l’assignation (voir Cass. civ. 3e, 11 octobre 2005, n° 04-15952).
Il convient de préciser que les résolutions prises en assemblée générale restent en vigueur tant que leur annulation n’a pas été prononcée, comme le rappelle un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 3 juillet 1979.
Toutefois, sauf urgence, l’exécution par le syndic des travaux décidés par l’assemblée générale en application des articles 25 et 26 de la loi du 10 juillet 1965 est suspendue jusqu’à l’expiration du délai de recours de deux mois.
En cas de rejet de la demande en annulation, la résolution incriminée est reconnue valable et donc définitivement exécutoire.
Si au contraire, le tribunal admet le bien-fondé de la demande, la délibération est réputée nulle et non avenue.
L'annulation est acquise à l'égard de tous les copropriétaires (voir Cass. civ. 3e, 10 oct. 1973, n° 72-11159) et ceux-ci peuvent s'en prévaloir (voir Cass. civ. 3e, 10 oct. 1973, n° 72-11159).
Qu’ainsi, le syndicat peut être condamné à verser des dommages et intérêts, si le copropriétaire ayant introduit l'action peut justifier d'un préjudice imputable à la décision d'assemblée annulée.
Par conséquence, l’’annulation de l'assemblée implique la convocation d'une autre assemblée.
Qu’en tout état de cause, si un copropriétaire se trouve lésé par une décision de l’assemblée générale, qui pour autant est conforme à l’intérêt général, le juge ne pourra retenir l’abus de majorité, ni examiner l’opportunité même des décisions de l’assemblée générale.
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Joan DRAY
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