L'engagement disproportionné de la caution

Publié le 05/06/2015 Vu 10 003 fois 0
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L’article L 341-4 du Code de la consommation pose le principe légal de la proportionnalité : « Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».

L’article L 341-4 du Code de la consommation pose le principe légal de la proportionnalité : « Un créanc

L'engagement disproportionné de la caution

L’article L 341-4 du Code de la consommation pose le principe légal de la proportionnalité : « Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».

Ce principe est valable que le contrat de cautionnement soit conclu par acte authentique ou par acte sous-seing privé.

La preuve de la disproportion nécessite une analyse en deux étapes de la situation patrimoniale : au stade de la souscription de l'engagement et à celui de son exécution.

1.Au stade de la conclusion du contrat de cautionnement :

À la date de conclusion du contrat de cautionnement, sera menée une étude de la disproportion éventuelle entre la dette garantie et le patrimoine de la caution.

La disproportion entre le patrimoine du débiteur et la garantie donnée par cautionnement s'apprécie au moment où la caution prend son engagement à l'égard du prêteur (Cass. 1re civ., 15 janv. 2015 – Cass. com., 27 mai 2014).

La Chambre commerciale énonce que la disproportion doit être appréciée au regard de l'endettement global de la caution, y compris celui résultant d'engagements de caution. (Cass. com., 22 mai 2013)

2.Au stade de la mise en œuvre du cautionnement

  • Le cas du retour à meilleure fortune :

Le "retour à meilleure fortune" est envisagé par l'article L. 341-4 du Code de la consommation peut résulter d'une diminution des charges.

Lorsque les charges existantes à l'époque de la souscription d'un cautionnement le rendant disproportionné, ont été acquittées ou du moins réduites dans l'intervalle, la condition du retour à meilleure fortune peut être caractérisée (CA Grenoble, 4 juin 2012).

À supposer l'existence d'une disproportion à la conclusion du contrat, elle peut avoir disparu le jour de son exécution, la caution jouissant d'une meilleure fortune.

L'article L. 341-4 du Code de la consommation envisage alors clairement un avantage pour le créancier : il pourra toujours obtenir de la caution qu'elle paye la dette garantie lorsqu'au moment où elle est appelée, son patrimoine s'est enrichi, peu importe dès lors, si au jour de sa conclusion, le cautionnement était disproportionné.

À l'analyse, cette hypothèse suppose un enrichissement de la caution à hauteur de l'engagement souscrit, c'est-à-dire l'existence d'un patrimoine suffisant pour exécuter son obligation de règlement. La seule aisance financière est insuffisante.

  • Appréciation du caractère disproportionné par rapport au patrimoine existant de la caution et non du patrimoine potentiel :

Ce n'est qu'exceptionnellement que la disproportion sera calculée en fonction du patrimoine du débiteur au moment de la mise en œuvre du cautionnement.

La proportionnalité de l'engagement de la caution ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l'opération garantie (Cass. com., 27 janv. 2015).

Dans l’arrêt du 27 janvier 2015, la cour d'appel prend en compte pour le calcul de la disproportion au moment de la conclusion du contrat de cautionnement, les résultats escomptés de l'opération garantie.

Autrement dit, le calcul de la disproportion se ferait à partir d'un patrimoine à venir et non d'un patrimoine existant.

La Cour de cassation censure donc à juste titre la décision d'appel.

Pour que la disproportion soit calculée à partir du patrimoine existant au moment de la demande du prêteur, il aurait fallu que celui-ci établisse qu'à ce moment là le patrimoine de la caution s'était amélioré de telle manière qu'au jour de la mise en œuvre de la garantie, la disproportion n'existait plus, par exemple parce que la caution avait gagné une somme importante aux multiples jeux proposés par La Française des jeux.

En dehors de cette amélioration postérieure à la conclusion du cautionnement, l'appréciation de la disproportion se fait au jour de la conclusion du contrat.

La disproportion de l’engagement de la caution ne saurait s’apprécier en tenant compte des revenus escomptés de l’entreprise dont les dettes sont cautionnées (Cass. 1re civ., 15 janv. 2015 — Cass. com., 27 janv. 2015 — Cass. com., 27 janv. 2015).

3.Preuve de la proportionnalité de l’engagement de la caution :

Le créancier professionnel n'a pas à vérifier l'exactitude des déclarations de la caution.

L'engagement de caution conclu par une personne physique au profit d'un créancier professionnel ne doit pas être manifestement disproportionné aux biens et revenus déclarés par la caution dont le créancier, en l'absence d'anomalies apparentes, n'a pas à vérifier l'exactitude (Cass. com., 14 déc. 2010).

Toutefois, la charge de la preuve pèse sur le créancier professionnel.

Il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d'un contrat de cautionnement manifestement disproportionné, lors de sa conclusion, aux biens et revenus de la caution, personne physique, d'apporter la preuve qu'au moment où il fait appel au cautionnement le patrimoine de la caution lui permet de faire face à son obligation (Cass. 1re civ., 10 sept. 2014 – Cass. com., 1er avr. 2014).

Ce n'est donc pas à la caution mais bien au créancier d'apporter la preuve, qu'au moment de cet appel, le patrimoine de la caution n'est pas disproportionné à son engagement et lui permet donc de faire face à son obligation.

4.En matière de sanction :

La sanction prévue par l'article L. 341-4 du Code de la consommation prive le contrat de cautionnement d'effet à l'égard tant du créancier que des cofidéjusseurs.

Il s'en déduit que le cofidéjusseur, qui est recherché par le créancier et qui n'est pas fondé, à défaut de transmission d'un droit dont il aurait été privé, à revendiquer le bénéfice de l'article 2314 du Code civil, ne peut ultérieurement agir, sur le fondement de l'article 2310 du même code, contre la caution qui a été déchargée en raison de la disproportion manifeste de son engagement (Cass. ch. mixte, 27 févr. 2015). 

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Joan DRAY
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