Le délai et les conditions d’application de la prescription acquisitive immobilière trentenaire

Publié le 03/11/2014 Vu 468 439 fois 504
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Le délai de la prescription acquisitive immobilière est en principe trentenaire, c'est-à-dire de 30 ans.

Le délai de la prescription acquisitive immobilière est en principe trentenaire, c'est-à-dire de 30 ans.

Le délai et les conditions d’application de la prescription acquisitive immobilière trentenaire

L’usucapion ou prescription acquisitive est le fait pour le possesseur d’un bien immobilier (appartement, maison, terrain, immeuble, etc …) d'acquérir juridiquement un droit réel (droit de propriété) sur ce bien, après l'écoulement d'un certain délai durant lequel il s’est comporté comme le propriétaire, sans en avoir le titre.

A cet égard, l’article 2272 du Code civil dispose :

« Le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans. Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans. »

Ce délai de trente ans de la prescription acquisitive immobilière s’applique lorsque deux séries de conditions sont réunies :

- la possession du bien doit être caractérisée (I)

- et le possesseur doit être de mauvaise foi (II)

I. Une possession caractérisée du bien immobilier

La prescription acquisitive trentenaire est caractérisée lorsqu’elle répond à un certain nombre de conditions tenant à la possession de l’immeuble.

En effet, l’article 2261 du Code civil dispose que :

« pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ».

A cet égard, la Cour de cassation a jugé que :

« la prescription acquisitive n’a ni pour objet ni pour effet de priver une personne de son droit de propriété ou d’en limiter l’exercice mais confère au possesseur, sous certaines conditions, et par l’écoulement du temps, un titre de propriété correspondant à la situation de fait qui n’a pas été contestée dans un certain délai ; que cette institution répond à un motif d’intérêt général de sécurité juridique en faisant correspondre le droit de propriété à une situation de fait durable, caractérisée par une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire. » (Cass. civ. III, 12 octobre 2011, n° 11-40.055)

Par conséquent, pour pouvoir prescrire, la possession doit donc être :

- continue : c’est-à-dire être « exercée dans toutes les occasions comme à tous les moments où elle devait l’être après la nature de la chose possédée, sans intervalles anormaux assez prolongés [pas plus de 1 an ] pour constituer des lacunes et rendre la possession discontinue. » (Cass., 11 janvier 1950)

- paisible : autrement dit, le possesseur ne doit pas appréhender le bien immobilier par la force, la violence ou encore par une voie de fait. Ainsi, l’article 2263 du code civil prévoit que « Les actes de violence ne peuvent fonder non plus une possession capable d’opérer la prescription. La possession utile ne commence que lorsque la violence a cessé.»

- publique : elle doit être connue de tous et ne doit pas être dissimulée.

- non équivoque : le possesseur doit manifester sans ambiguïté son intention de se comporter comme le propriétaire.

- exercée à titre de propriétaire : les locataires, dépositaires, usufruitiers et toutes autres personnes qui détiendraient précairement le bien ou le terrain sont juridiquement dans l’impossibilité de se prévaloir valablement d’une quelque prétention sur le fondement de la prescription acquisitive.

Enfin, il convient de relever que la bonne foi du possesseur n’est pas une condition pour acquérir au bout de 30 ans.

La cour de cassation définit la bonne foi  comme étant la croyance de l’acquéreur du bien, au moment de l’acquisition, de tenir la chose du véritable propriétaire. (Cass. Civ. III, 18 janvier 1972)

La bonne foi permet simplement de gagner du temps sur la prescription acquisitive du bien immobilier et de permettre au possesseur de n’attendre qu’un délai de 10 ans au lieu de 30 ans pour acquérir ledit bien.

II. Un possesseur de mauvaise foi

La prescription trentenaire ne s’applique que lorsque le possesseur est de mauvaise foi.

Or, si la bonne foi est présumée, le possesseur est considéré comme étant de mauvaise foi dès lors qu’il occupe les lieux en sachant qu’il n’est pas le titulaire du droit qu’il exerce.

Cette situation se présente notamment lorsque le possesseur ne bénéficie d’aucun titre de propriété ou lorsque son titre n’est pas considéré comme régulier.

Dés lors que le possesseur est de mauvaise foi, il se voit alors appliquer le délai de prescription de droit commun (30 ans).

Toutefois, pour mémoire, le fait d’être de mauvaise foi n’a aucune incidence sur la prescription acquisitive et ne pourrait venir remettre en cause la possibilité pour le possesseur de prescrire.

En ce sens, les règles de la prescription acquisitive en matière immobilière dérogent aux règles en matière de droit contractuel.

En effet, la particularité du mécanisme de la prescription acquisitive en matière immobilière réside dans le fait que même en étant de mauvaise foi, il n’est nullement interdit au possesseur de devenir propriétaire de l’immeuble par usucapion.

Surtout, l’article 2258 du Code civil prévoit qu’on ne peut opposer à celui qui invoque le bénéfice de l’usucapion « l’exception déduite de la mauvaise foi ».

Par conséquent, une personne qui, sans disposer d’un quelconque titre de propriété, a occupé pendant au moins une durée de trente ans un bien immobilier ou un terrain, en sachant qu’elle n’en était pas propriétaire, peut, au terme de ce délai, en devenir le propriétaire par la voie de l’usucapion et au détriment du propriétaire légitime du bien.

Pour ce faire, le possesseur du bien immobilier en question devra faire reconnaître son droit de propriété par voie judiciaire.

En effet, la prescription acquisitive sur un bien immobilier ne s’applique pas automatiquement.

La revendication par le possesseur d’un droit de propriété sur un bien immobilier par la voie de l’usucapion  pourra se faire de deux manières :

- soit en engageant une action judiciaire pour faire constater que le bien immobilier lui est acquis,

- soit en opposant à l’action en revendication engagée contre lui par le véritable propriétaire du bien immobilier, une fin de non-recevoir tirée de la prescription acquisitive.

À cet effet, le possesseur devra être en mesure de prouver qu’il a parfaitement rempli toutes les conditions visées précédemment et ce pendant toute la période où il a « possédé » le bien immobilier.

La preuve de la possession du bien immobilier peut être faite par tous moyens et notamment par témoignages et attestations.

La prescription acquise a un effet rétroactif de sorte que le possesseur est considéré comme propriétaire du bien immobilier rétroactivement depuis le jour où il a occupé ledit bien.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

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Anthony Bem
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1 Publié par Visiteur
10/11/2016 19:23

Bonjour Maitre,

est-il vrai qu'une foi l'acte de notoriété dressé une foi les 30 ans d'occupation sur le terrain passé (période d'occupation allant de avant 1963 à 1993 (acte signé en 1993) il y a encore 30ans, pour qu'un éventuel propriétaire se manifeste et réclame son dû (soit de 1993 à 2023)
je vous remercie.

2 Publié par Maitre Anthony Bem
10/11/2016 21:03

Bonjour nathema,

Je ne comprends pas votre cas.

Merci de bien vouloir le reformuler.

Cordialement.

3 Publié par Visiteur
15/11/2016 02:33

bonjour
j'habite sur un terrain depuis 12 ans et le propriétaire a mis le terrain sur une société baser dans un paradis fiscaux pour ne rien payer impôt .... la police fiscal était venu il y'a 7 an me voir pensant que j'étais le propriétaire du bien et depuis plus rien que puis je faire.

colt

4 Publié par Visiteur
20/11/2016 21:35

bonsoir
mes parents ont construis leur maison en 1976 sur un terrain donné par un de mes oncles à mon pére les quelques premiéres années ils n'y habitaient pas en résidence principale cela n'a pas duré 10 ans peut-on penser que pour l'héritage les enfants de mon oncle ne nous poseront aucuns problémes et sur le cadastre a qui appartient ce terrain faut-il faire un changement à la mairie? merci pour les réponses

5 Publié par Visiteur
23/11/2016 08:28

Bonjour Maître,
Nous voudrions faire l’acquisition d'un terrain sur lequel il y a une villa que nous devrions détruire.
ce terrain à été acquis par les parents du vendeur en ayant fait constaté l’occupation de celui-ci sur une période de 30 ans où plus (sur l'acte, c'est noté de 1963 à 1993).
ce dit terrain à été hériter par l'un des fils, qui entre temps l'a vendu à son frère, le frère étant la personne avec qui nous devrions faire affaire.
Notre notaire nous informe qu'après ce constat de 30 ans d'occupation, il y aurait encore 30ans pour qu'un éventuel "vrai" propriétaire se manifeste et veuille récupérer son terrain. une autre notaire dit que c'est a vie que quelqu'un peut se manifester, une autre encore dit qu'il n'y a rien a craindre. Juridiquement parlant que disent les textes?
peut-on acquérir ce terrain sans crainte? Quel est votre position ?
Merci de votre aide.

6 Publié par Visiteur
29/11/2016 18:01

Bonjour maître
Ma mère est sur le terrain de puis plud de 26 ans à quel moment elle peut faire la demande pour devenir propiétaire et ou elle doit t-elle s'adresser?

7 Publié par Visiteur
30/11/2016 11:59

Bonjour maitre,

Un voisin occupe un garage depuis plsu de 50ans sur un terrain de 1700m2, je suis propriétaire des deux.

Ce voisin va pouvoir demander l'usucapion, mais celle-ci se limite t elle au garage qu'il a entretenu et aménagé pour l'utiliser, ou ira t elle jusqu'à la propriété du terrain sur lequel il se situe, sachant qu'il na jamais rien fait sur le terrain

8 Publié par Visiteur
09/12/2016 14:37

Bonjour Maître,

Mes parents ont construit nos maisons sur un terrain qui leur a été cédé par acte sous seing privé par un faux propriétaire en 1998.
Au décès de ce dernier, ils ont réalisé l'usurpation et ont recherché le véritable propriétaire dont ils ont finalement trouvé l'identité en 2006.
Après plusieurs tentatives de négociations échouées pour l'acquisition et la régularisation des biens, le véritable propriétaire a porté l'affaire devant le tribunal et en mars 2016 le jugement ne validait pas la bonne foi de mes parents et ordonnait : expulsion + indemnités + remise en état.

9 Publié par Visiteur
17/12/2016 08:49

Maître,
J'ai fait construire une maison en 2001 sur un terrain que j'ai acheté en 1997 qui était clôturé par les voisins propriétaire de leur terrain depuis 1977 et qui ont clôturé leur terrain. Ce terrain a été vendu en 2015 à des jeunes qui lors de la signature de l'acte chez le notaire savaient que ce terrain était clôturé depuis 30 ans. Je reçois un courrier de leur avocat ce mardi 13/12 me signalant que j'ai usurpé cette partie de terrain et que j'ai construit sur leur parcelle! Quel fut mon étonnement. Que dois-je faire précisément en urgence. Ont-ils tous les droits? Merci de me répondre

10 Publié par Visiteur
17/12/2016 08:54

Il s'agit d'une superficie de +/- 2 ares que les premiers voisins de l'époque ont clôturé sur une mauvaises borne d'après les nouveaux voisins. Les lois en Belgique sont -elles différentes q'en France? Photos à l'appui. Merci

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