La forme de la demande en relevé de forclusion

Publié le Modifié le 30/10/2014 Vu 6 390 fois 0
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Quelle forme doit revêtir la demande en relevé de forclusion adressée par un créancier négligent au juge-commissaire ? Si la loi n'en dit rien, la jurisprudence a eu l'occasion de se prononcer sur la question le 28 janvier 2014.

Quelle forme doit revêtir la demande en relevé de forclusion adressée par un créancier négligent au juge-

La forme de la demande en relevé de forclusion

Si la loi permet au créancier de demander un relevé de forclusion lorsqu'il a omis de déclarer sa créance à la procédure collective dans les temps, elle ne précise aucunement la forme que doit revêtir cette demande adressée au juge-commissaire.

Aux termes de l'article L.622-26 alinéa 3 du Code de commerce dispose seulement que :

"L'action en relevé de forclusion ne peut être exercée que dans le délai de six mois. Ce délai court à compter de la publication du jugement d'ouverture ou, pour les institutions mentionnées à l'article L. 3253-14 du code du travail, de l'expiration du délai pendant lequel les créances résultant du contrat de travail sont garanties par ces institutions. Pour les créanciers titulaires d'une sûreté publiée ou liés au débiteur par un contrat publié, il court à compter de la réception de l'avis qui leur est donné. Par exception, le délai est porté à un an pour les créanciers placés dans l'impossibilité de connaître l'existence de leur créance avant l'expiration du délai de six mois précité".

Ainsi, le créancier doit impérativement exercer son action en relevé de forclusion dans un délai de principe de six mois.

Mais sous quelle forme doit-il le faire ? 

Cette question a été résolue dans un récent de la chambre commerciale de la Cour de cassation, en date du 28 janvier 2014 (N°12-27.728).

En l'espèce, la question de la forme de la demande était cruciale et, de sa réponse, dépendait la recevabilité de l'action (au regard de la prescription).

En l'espèce, un créancier avait attendu le dernier jour du délai prévu par l'article L. 622-26 du Code de commerce pour adresser sa demande en relevé de forclusion au juge-commissaire.

Il a adressé sa demande par lettre recommandée avec accusé de réception et ainsi que par télécopie. 

La cour d'appel a jugé que cette requête était irrecevable car tardive. Elle estime en effet que la demande en relevé de forclusion est une demande en justice, et qu'en ce sens, elle doit être formée soit par assignation, soit par remise de la requête au greffe du Tribunal (article 54 Code de procédure civile) - cette remise apportant la preuve solide du jour et de l'heure de la réception de la requête.

La Chambre commerciale casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'Appel aux motifs que "la demande en relevé de forclusion peut être formée par requête adressée au greffe". 

Il s'ensuit que la Cour de cassation ne semble imposer aucune forme ou restriction que la loi n'aurait pas explicitement posée, ce qui est une faveur accordée au créancier négligent de déclarer dans les délais. 

Cependant, cette solution semble conforme à l'esprit qui domine la procédure civile française, selon lequel les parties à une action en justice ne doivent pas souffrir des méandres de la procédure. En effet, les solutions légales et jurisprudentielles en la matière tendent à excuser la partie non avisée des formes particulières et des exigences procédurales. Ainsi, par exemple, toute demande en justice interrompt le délai de prescription, quand bien même elle serait irrégulière en la forme ou adressée à une juridiction incompétente (article 2241 alinéa 2 du Code civil).

De même, cette solution est cohérente avec celle qui régi la procédure de déclaration de créance. En effet, la loi ne précisant pas quelle forme la déclaration devait revêtir, la jurisprudence s'est prononcée sur cette question en faveur de l'absence de forme particulière. En ce sens, il a été jugé qu'une simple lettre suffisait (Cour de cassation, chambre commerciale, 16 juin 1987), à la condition que le déclarant soit identifiable et que la déclaration ne soit pas équivoque (Cour de cassation, chambre commerciale, 13 juin 2006). De même, il a été jugé que la déclaration par télécopie n'était pas irrégulière en soi (Cour de cassation, chambre commerciale, 17 décembre 2003).

Par conséquent, cette jurisprudence semble applicable à la demande en relevé de forclusion.

Par l'arrêt du 28 janvier 2014, la chambre commerciale indique également que la date à prendre en compte pour estimer si l'action est prescrite ou non est la date d'envoi de la requête, et non pas la date de réception au tribunal - pourvoi de pouvoir dater précisément l'envoi. 

En conclusion, toute demande en relevé de forclusion formulée par un créancier négligent au juge-commissaire est libre en sa forme. Il convient néanmoins de rappeler que plus le créancier sera diligent, et indiquera les informations précises, moins il se heurtera aux obstacles procéduraux. 

Si la question de la forme de la requête peut paraitre anodine prima facie, elle peut revêtir une grande importance quant au calcul des délais de prescription de l'action. 


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Joan DRAY
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