l'expulsion et les droits des locataires

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L’expulsion d’un locataire n’est pas sans posée de difficultés tant sur le plan juridique que sur le plan humain. De nombreuses personnes qui reçoivent un courrier de leurs bailleurs sont affolées et imaginent qu’ils vont être expulsés du jour au lendemain avec ou sans leur famille. En ces temps de crise économiques, de nombreuses personnes qui travaillent et ont même un emploi stable, ne parviennent plus à payer leurs loyers et se retrouvent en grande difficulté. Pour autant, il faut rassurer ces personnes car l’expulsion est une mesure d’exécution forcée qui n’intervient pas en dehors d’un titre exécutoire et lorsque le bailleur a obtenu ce titre, la loi permet au locataire de solliciter sous certaines conditions un sursis à expulsion.

L’expulsion d’un locataire n’est pas sans posée de difficultés tant sur le plan juridique que sur le p

l'expulsion  et les droits des locataires

I/ l’exigence préalable d’un titre exécutoire 

L'expulsion est une opération étroitement encadrée qui n'autorise aucune initiative personnelle du propriétaire, si ce n'est celle de s'adresser à la justice pour obtenir l'autorisation nécessaire : sans titre exécutoire, le propriétaire ne peut rien faire et surtout pas procéder par lui même à une expulsion.

Est évidemment condamnable le propriétaire qui, pour déloger son locataire, fait procéder à l'ouverture des portes par un serrurier et entrepose les affaires du locataire dans un garage (CA Colmar, 3e ch., sect. A., 10 sept. 2007).

Le propriétaire qui fait changer les serrures, le preneur se retrouvant à la rue sans pouvoir récupérer ses meubles et ses effets personnels, restés cette fois-ci dans les lieux.

Peu importe que le locataire ait lui même pris l'initiative de quitter les lieux en donnant congé, sans pouvoir après coup libérer les lieux à la date promise, faute d'avoir retrouvé un logement. Ces circonstances n'autorisent pas le bailleur à interdire l'accès au logement par cette voie de fait sanctionnée par des dommages intérêts et passible de sanction pénale pour violation de domicile.

L'article 61 de la loi du 9 juillet 1991 dispose que sauf dispositions spéciales aucune expulsion ne peut avoir lieu sans une décision de justice ou un procès-verbal de conciliation exécutoire.

  • La période hivernale

L'article L. 613-3 du Code de la construction et de l'habitation exclut toute mesure d'expulsion entre le 1er novembre et le 15 mars, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l'unité et les besoins de la famille ou que l'immeuble ait fait l'objet d'un arrêté de péril.

  • Le commandement de quitter les lieux

Toutefois, il n’est pas inutile de rappeler que la procédure d’expulsion n’est possible qu’après le prononcé d’une décision du tribunal ayant ordonné celle-ci et ce après signification par un huissier d’un commandement à libérer les lieux.

L’expulsion ne peut avoir lieu qu’après un délai de deux mois suivant le commandement de quitter les lieux conformément à l’article 62 de la loi du 9 juillet 1991.

A compter de cette signification, l'huissier sera en mesure de se rendre sur place en présence de témoins afin de faire une première tentative d'expulsion qui reste généralement infructueuse.

A la suite du refus de l'expulsé de quitter les lieux, l'huissier dresse un procès-verbal de tentative d'expulsion qui est le fondement de son procès-verbal de réquisition de la force publique adressé au préfet.


C'est uniquement s'il est fait droit à cette réquisition que l'huissier pourra se déplacer sur les lieux en présence d'un serrurier et assisté des forces de police ou de gendarmerie afin de demander l'ouverture des locaux loués et pratiquer l'expulsion. L'expulsion sera constatée par un procès-verbal d'expulsion qui reprendra l'ensemble des démarches effectuées par l'huissier.

Le commandement d'avoir à libérer des locaux doit contenir, à peine de nullité, l'indication de la date à partir de laquelle les locaux devront être libérés ; qu'en l'espèce où le commandement délivré à M. et Mme Y... mentionnait une libération « immédiatement et sans délai » en ne fixant ainsi aucune date à partir de laquelle les locaux devaient être libérés, la cour d'appel, qui a refusé d'annuler ce commandement, a violé l'article 194 du décret du 31 juillet 1992 

  • La notification au préfét

Afin d'éviter le plus possible les expulsions ou, à tout le moins, d'en réduire les conséquences, le préfet doit être informé de l'existence d'une procédure à l'encontre d'un locataire à deux moments.

D'abord avant le jugement d'expulsion, plus précisément au stade de l'assignation que le bailleur adresse au locataire afin d'obtenir la résiliation du bail et ce, en application de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

 L'assignation doit être transmise au moins deux mois avant l'audience au préfet, l'objectif étant afin de mobiliser les aides sociales qui pourraient permettre d'éviter l'expulsion.

Ensuite, après que le bailleur a obtenu le titre exécutoire autorisant l'expulsion, au stade du commandement d'avoir à quitter les lieux que l'huissier adresse au locataire.

En application de l'article 62, alinéa 4 de la loi du 9 juillet 1991, l'huissier de justice doit informer le préfet de l'expulsion projetée en vue de la prise en compte de la demande de relogement de l'occupant dans le cadre du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées.

La Cour de cassation avait déjà décidé que le fait de ne pas avoir signifié le commandement au préfet constitue l'omission d'un acte et non un vice de forme et affecte la validité de la procédure sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un grief.

Il convient de préciser que le Préfet a toujours la possibilité de refuser d’accorder le concours de la force publique pour des motifs d’ordre public dans ce cas le bailleur pourra exercer un recours indemnitaire contre l’état.

 L’obtention de délais d’expulsion

Tout d’abord il ne peut y avoir aucune expulsion durant la trêve hivernale c'est-à-dire entre le 1er novembre et le 15 mars.

Limite :

-          l’expulsion est possible en ce cas si un autre logement décent est prévu par le locataire et sa famille

-          Si les locaux menaçant ruine fait l’objet d’un arrêté de péril,

-          Enfin cette expulsion est possible s’il s’agit de personnes dont l’expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux par voie de fait tel que des squatters.

Notamment l’article l.613-1 du code la construction de l’habitation dispose : 

« Le juge des référés ou le juge de l'exécution, selon le cas, du lieu de la situation de l'immeuble peut, par dérogation aux dispositions des articles 1244-1 à 1244-3 du code civil, accorder des délais renouvelables excédant une année aux occupants de locaux d'habitation ou à usage professionnel, dont l'expulsion aura été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne pourra avoir lieu dans des conditions normales, sans que lesdits occupants aient à justifier d'un titre à l'origine de l'occupation. »

Le juge qui ordonne l'expulsion peut, même d'office, accorder les mêmes délais, dans les mêmes conditions.

L’article L.613-2 du code la construction de l’habitation  précise que les délais ne peuvent être inférieurs à trois mois et ni excéder trois ans.


   Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge. » 

Le locataire qui a obtenu un délai par jugement quant à son expulsion n’a plus de loyer à payer mais des indemnités d’occupation fixées par le tribunal puisqu’il n’a plus le bail.

Enfin, il est possible que le paiement d’une astreinte soit ordonné, dès lors qu’un locataire après décision d’expulsion se refuse à quitter les lieux.

Cette astreinte sera versée tant que le locataire ne partira pas.

Il est également utile de préciser que le bailleur ne pourra demander à l’huissier de procéder à l’expulsion, lorsque le locataire aura saisi le juge de l’exécution d’une demande des sursis à expulsion.

Dan un arrêt en date du 14 octobre 1999, la Cour de Cassation a sanctionné un organisme HLM qui n'avait pas averti le JEX saisi d'une demande de sursis à expulsion que cette mesure d’expulsion était d'ores et déjà programmée quatre jours après l'audience, avant que ce magistrat ne statue Cass. 2e civ. 14-10-1999 n° 97-14.447, Sté Logirep),

L’astreinte en matière d’expulsion

Conformément à un arrêt du 11 mars 1987 rendu par la Cour de Cassation, l’astreinte est toujours provisoire, ainsi le juge pourra majorer cette astreinte en cas de résistance de la part du locataire.

L’astreinte ne sera due qu’une fois la décision d’expulsion liquidée.

Possibilité de réduction de l’astreinte : lors d’un arrêt rendu par la Cour d’Appel de Colmar le 28 octobre 1983, il a été jugé « qu’un locataire au chômage disposant de ressources modestes devait bénéficier d’un délai supplémentaire pour libérer le logement ; le montant de l’astreinte devait par conséquent être diminué. »

Le juge peut donc tenir compte des difficultés pour le débiteur  d’exécuter la décision  d’expulsion.

De plus, la Cour de Cassation rappelle dans un arrêt du  6 décembre 1989 que le cumul du paiement d’astreinte ainsi que l’indemnité d’occupation est tout à fait possible.

 Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements complémentaires.

Maître Joan DRAY

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1 Publié par Visiteur
27/11/2010 15:14

Je viens de recevoir une lettre de l'Institut pour la Justice qui stipule qu'un squatteur qui s'introduit illégalement dans votre domicile pendant votre absence, ne peut être expulsé s'il l'occupe depuis plus de 48 heures que sur décision de justice.
Pouvez-vous me confirmer cette disposition ?
Merci

2 Publié par mod77
30/11/2010 15:21

A la lecture de cette publication, il s'avère que l'expulsion est possible même en saison hivernale pourvu qu'une solution de relogement existe pour les locataires.

J'aimerai savoir comment prouver que cette solution existe?

L'envoi d'annonces d'offres de locations immobilières correspondants aux besoins et possibilités financières des locataires est-il suffisant ?
Montrer que la maison de leurs parents peut les héberger suffit-il?

En considérant que les locataires travaillent.

3 Publié par Visiteur
07/08/2011 19:51

Que fait l'Etat contre les expulsions qui se banalisent en France ?

Une jeune Française, parisienne, enceinte est en instance d'expulsion inique, avec sa famille, bien qu'ayant financé son toit.

Pétition de soutien à diffuser et signer :

http://www.sos-blanqui.fr/article-petition-de-soutien-344-signatures-73214377.html.

4 Publié par Visiteur
11/01/2014 13:22

mon fils s' est fait expulser par son propietaire alors qu'il a une petite fille de 22mois et etait enceinte de leur segond bebe. sans autre forme de proces. pouvez vous me dire quel recours avons nous ?
cela a profondement choque leur fille et provoque l' accouchement plus tot que prevu.

5 Publié par Visiteur
14/04/2014 12:26

Bonjour, ma voisine vient à l'instant de se faire expulser sans courriel ni AR au préalable nous avons demandés si il y avait une trace de ce soit disant AR envoyé mais ce fut peu concluant. Dans le seul courrier qu'elle a reçu il est uniquement indiquer qu'elle était expulsable à partir du 14 avril 2014 hors des déménageurs ainsi qu'un huissier ce sont présenter ce matin en lui disant qu'il venait saisir ces biens afin de les mettre dans un garde meuble jusqu'au 14 juin 2014, la date du procès fixée au 30 juin 2014. Cet après midi nous allons à la Maison de la Justice de notre ville, Est-ce la bonne chose à faire? Merci par avance .

6 Publié par Visiteur
14/05/2014 15:28

réponse à loulou: que voulez-vs dire par autre forme de procès? Car il y a une procédure à suivre qui est longue(environ 1an et demi)

7 Publié par Visiteur
17/07/2014 12:22

bonjour
suite a une dette de mon loyer la caisse d allocation familliale ma envoyer un plan d apurement a faire remplir a la societer hlm il on refuser es quil on le droit de refuser? jai envoyer un courier en ar mais pas de reponse a ce jour la caf ma suspendu les droit apl comment faire pour que tout s arrange et que je me retrouve pas a la rue avec mes deux enfants? MERCI D AVANCE

8 Publié par Visiteur
26/08/2014 18:16

Et pendant tout ce temps, quels sont les droits des propriétaires (apparemment inexistants en France)contre les abus de locataires ne payant pas volontairement leur loyer et bien évidemment insolvables ??? Pour eux pas de problème, ils peuvent dormir tranquilles... et continuer de "squatter" le logement

9 Publié par Visiteur
27/08/2014 12:15

Les droits des propriétaires cela me fait sourire : Je suis au chômage en fin de droit dans quelques mois et maintenant SDF depuis mon divorce mon locataire bien qu'il y a eu une expulsion de prononcé reste dans les lieux et dans 2 mois la période hivernal arrive ,j'ai bien peur que ma situation soit plus que dramatique .Aucune loi ne protège les petits bailleurs privés!!.
Aucun droit si 1 juste le droit de se taire et payer les frais de justice honéreux.

10 Publié par jasabi
17/09/2014 09:33

Tout à fait d'accord avec Micer et Maeva,de longues années de galère pour les petits bailleurs privés qui ont juste le droit de garder tous les frais à leur charge.Et si par malheur eux ne payent plus leur credit ,ils seront expulser sans attendre de leur logement et pour eux pas de trêve hivernal

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