Liberté d’expression, devoirs de réserve et de discrétion du fonctionnaire

Publié le 17/08/2023 Vu 2 887 fois 0
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Si la liberté d’opinion du fonctionnaire est garantie, la liberté d’expression est limitée par diverses obligations, dont celle de réserve, de discrétion et de neutralité.

Si la liberté d’opinion du fonctionnaire est garantie, la liberté d’expression est limitée par diverses

Liberté d’expression, devoirs de réserve et de discrétion du fonctionnaire

Un fonctionnaire est libre de penser ce qu’il veut (encore heureux) mais pas de dire tout à fait ce qu’il veut.

Son sort est d’ailleurs le même qu’un salarié tenu d’une obligation de loyauté envers son employeur.

Liberté totale d’opinion

La liberté d’opinion est garantie par divers textes de nature constitutionnels et l’article L.111-1 du Code Général de la Fonction Publique.

La liberté d’opinion ne signifie pas que le fonctionnaire a le droit de penser ce qu’il veut, ce qu'il n'est pas besoin de préciser en France en 2023 : il signifie plutôt qu’un fonctionnaire ne peut pas être discriminé dans l’exercice de sa carrière en raison de ses opinions, politiques ou autres. Ce principe constitutionnel ne souffre pas d’exception, hormis sur quelques postes supérieurs très spécifiques ou le lien direct avec le pouvoir administratif justifie un pouvoir de nomination discrétionnaire. Mais pour le reste, aucun tempérament n’est toléré à la liberté d’opinion : un candidat ne peut pas être recalé à un concours en raison de ses opinions politiques (Conseil d’Etat, 28 mai 1954, Sieur Barel, n°28238). De même, ces opinions ne doivent pas figurer dans les dossiers de l’administration, sachant que le fonctionnaire dispose d’un droit d’accès à son dossier.

Mais penser est une chose, s’exprimer en est une autre. Autant la liberté de conscience est absolue, autant la liberté d’expression est soumise à certaines restrictions.

Liberté plus limitée d’expression

La liberté d’expression demeure le principe, mais celle-ci est restreinte en raison d’obligations à la charge du fonctionnaire.

La principale limite est l’obligation de réserve.

L’obligation de réserve du fonctionnaire ne ressort d’aucun texte, mais elle a été consacrée par la jurisprudence. Elle n’empêche nullement au fonctionnaire de manifester son opinion, mais elle lui impose de le faire avec retenue et de faire preuve de modération dans leur comportement et leur expression.

Cette règle vaut non seulement pour les critiques qui concerneraient son service ou son champ d’activité, mais également pour des questions sans rapport direct avec l’exercice quotidien de son activité (Conseil d’Etat, 23/04/2009, n°316862). En l’espèce, un sous-préfet s’était fendu d’un article considéré comme douteux sur Internet signé de sa main relatif à des questions de relations internationales. Cette publication était éloignée de l’exercice de ses fonctions de sous-préfet : la justice administrative a validé la décision de mettre fin à ses fonctions prise par le Président de la République.

Ce devoir de réserve est toutefois à géométrie variable : les professeurs d’Université jouissent par leur statut d’une plus grande liberté d’expression, tout comme les dirigeants syndicaux lorsqu’ils agissent dans le cadre de la défense des intérêts professionnels. On comprend aisément que dans ce cadre, l’obligation de réserve doit être interprétée plus largement.

De même, plus l’expression est diffusée, plus le manquement sera important – en clair une discussion à la cantine n’a pas le même impact qu’une interview dans un journal ou un passage à la télévision.

Dans le même ordre d’idée, plus le fonctionnaire occupera une fonction élevée, plus le manquement risque d’être important.

Outre le devoir de réserve, le secret professionnel est également un frein important.

L’article 226-13 du Code Pénal punit d’un an d’emprisonnement la révélation d’une information à caractère secret d’une personne qui en est dépositaire soit par état, soit par profession.

Or, l’article L.121-6 du Code Général de la Fonction Publique indique que l’agent public est tenu au secret professionnel dans les conditions de l’article 226-13 du Code Pénal.

Certaines exceptions sont toutefois prévues dans des cas très graves énumérés à l’article 226-14 du Code Pénal.

Le fonctionnaire est encore soumis au devoir de discrétion, plus large que le secret professionnel.

Là où le secret professionnel concerne des informations secrètes, le devoir de discrétion concerne l’ensemble des informations qui n’ont pas vocation à être communiquées aux usagers, lesquelles n’ont pas vocation à se retrouver sur la place publique.

Enfin, le fonctionnaire est tenu d’un devoir de neutralité, qui consiste à s’abstenir de propos, tenue ou comportement de nature à faire douter l’usager de la neutralité du service.

Naturellement, tout manquement à l’un de ces devoirs peut faire l’objet de sanctions disciplinaires, lesquelles doivent être proportionnées et sont susceptibles de recours devant le juge administratif.

 

Mon cabinet se tient à votre disposition pour toute précision ou tout recours

Me Sylvain bouchon

Avocat au Barreau de Bordeaux

bouchonavocat@gmail.com

 

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