➡️ Comment analyser la lucrativité des activités d’une association ?

Publié le 18/01/2024 Vu 2 627 fois 0
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Un récent arrêt du tribunal administratif de Grenoble met en exergue les relations existantes entre une association et une société commerciale conduisant à la fiscalisation de l’association.

Un récent arrêt du tribunal administratif de Grenoble met en exergue les relations existantes entre une asso

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1. Appréciation de la lucrativité des activités d’un OSBL : analyse de la concurrence (1er mode de raisonnement)

Selon l’article 206 et l’article 261, 7, 1° b du Code général des impôts (CGI), un organisme à but non lucratif (association, fondation, fonds de dotation notamment) n’est pas soumis aux impôts commerciaux dès lors qu’il exerce une activité non lucrative au sens fiscal c’est-à-dire :

  • que sa gestion est désintéressée ; et
  • qu’il ne concurrence pas le secteur commercial (lucratif) dans l’exercice de ses activités (cf. BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20 §1).

Dans l’hypothèse où sa gestion est effectivement désintéressée mais il concurrence les entreprises du secteur lucratif, l’organisme est alors imposable dès lors que son activité est exercée selon des modalités de gestion similaires à celles des entreprises commerciales.

 

> Le caractère désintéressé de la gestion d’un organisme est avéré si les conditions suivantes sont remplies :

  • l’organisme est géré et administré à titre bénévole par des personnes n’ayant elles-mêmes, ou par personne interposée, aucun intérêt direct ou indirect dans les résultats de l’exploitation ;
  • l’organisme ne procède à aucune distribution directe ou indirecte de bénéfice, sous quelle que forme que ce soit ;
  • les membres de l’organisme et leurs ayants droit ne peuvent pas être déclarés attributaires d’une part quelconque de l’actif, sous réserve du droit de reprise des apports (BOI-IS-CHAMP-10-50-10-2060).

 

> S’agissant de l’analyse de la concurrence avec le secteur lucratif, quatre éléments doivent être pris en compte, étant précisé que chacun d’eux présente une importance plus ou moins grande dans l’appréciation du caractère lucratif de l’activité. Ainsi, il convient d’étudier, dans un ordre d’importance décroissante, les critères suivants : le « produit » proposé par l’organisme, le « public » bénéficiaire, les « prix » qu’il pratique et la « publicité » qu’il fait (règle dite « des 4 P »).

Pour ce faire, il sera nécessaire d’analyser l’état de la concurrence et plus précisément, son existence dans la zone géographique concernée par les activités de l’organisme, et celle des entreprises (sociétés ou associations) assujetties aux impôts commerciaux exerçant la même activité. Ainsi, a-t-il été récemment jugé qu’une association gestionnaire d’un espace de coworking devait être fiscalisée dès lors que le service est le même que celui proposé par le secteur lucratif local, les prix pratiqués sont similaires à ceux du secteur lucratif et que le public accueilli n’est pas différent de celui du secteur lucratif (Tribunal administratif de Poitiers, 1ère chambre, 8 juillet 2022, n 2101128).

Sur les différentes étapes du raisonnement de l’administration fiscale de la lucrativité des activités d’un OSBL cf. BOI-IS-CHAMP-10-50-10-10.

 

2. Appréciation de la lucrativité des activités d’un OSBL : existence de relations privilégiées (2nd mode de raisonnement)

L’administration analyse également l’état des relations éventuellement entretenues entre l’organisme en cause, d’une part, et les intervenants lucratifs fiscalisés, d’autre part.

L’administration fiscale considère en effet qu’un organisme sans but lucratif est « soumis à l’impôt sur les sociétés, à la cotisation foncière des entreprises (ainsi que, le cas échéant, à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises [CVAE]) et à la taxe sur la valeur ajoutée s’il entretient des relations privilégiées avec des organismes du secteur lucratif qui en retirent un avantage concurrentiel » (cf. BOI-IS-CHAMP-10-50-10-30 §10).

Ainsi, selon l’administration fiscale est lucratif « un organisme qui permet de manière directe aux professionnels de réaliser une économie de dépenses, un surcroît de recettes ou de bénéficier de meilleures conditions de fonctionnement, quand bien même cet organisme ne rechercherait pas de profits pour lui-même ».

 

3. Exemple d’application

En l’espèce, une association a pour objet la pratique et l’enseignement de la musique ainsi que la diffusion de spectacles et concerts. L’association est dirigée par M. B. (président), Mme B. son épouse (secrétaire) et leur fille Mme M. B (trésorière).

Mme B. est par ailleurs exploitante d’un fonds de commerce de magasin de musique (vente et location d’instruments de musique) qui est la propriété d’une société détenue par la famille B.

Il convient également de relever que :

  • les locaux de l’association sont contigus à ceux du magasin de musique et ne sont accessibles que par le magasin ;
  • le site internet du magasin présente l’école de musique comme l’une de ses activités ;
  • les concerts et spectacles de l’association sont réalisés dans une salle appartenant à la famille B (via une SCI) ;
  • les billets des concerts et spectacles sont mis en vente sur le site internet et en caisse du magasin de musique, les sommes perçues étant reversées à l’association.

Contrôlée par l’administration fiscale, l’association a fait l’objet d’un redressement en matière d’impôt sur les sociétés et de TVA ce qu’elle conteste.

Sans surprise, le juge confirme le rappel d’imposition sur les années contrôlées : les éléments ci-dessus mettent en avant tant le fait que l’association constitue le prolongement de l’activité de la société propriétaire du fonds de commerce que la communauté d’intérêts existante entre les dirigeants des deux structures.

Peu importe le fait que les dirigeants exercent leurs activités de manière bénévole (le président et la secrétaire ne sont pas rémunérés) ou dans le cadre de la tolérance de l’administration fiscale (la rémunération de la trésorière ne dépasse pas les trois quarts du SMIC cf.  BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20 §370) : la caractérisation de la communauté d’intérêts entre les dirigeants de l’association et l’activité commerciale vient remettre en cause la gestion désintéressée.

En outre la complémentarité des activités rend inutile l’analyse de la concurrence éventuelle avec le secteur lucratif.

S’il n’est pas interdit à un organisme à but non lucratif de recourir aux services d’une société commerciale ou de détenir les titres d’une société commerciale, il convient de veiller à ne pas entretenir de relations privilégiées avec cette société tant en raison de la similitude de la gouvernance que par l’exercice d’activités connexes ou complémentaires au risque de remettre totalement en cause l’absence de fiscalisation dudit organisme.

Référence : Tribunal administratif de Grenoble, 4e chambre, 7 juillet 2022, n°2001946, association Musique au Présent

 

Source : francegenerosites.org

Pour plus d'infos : Qu'est-ce que la franchise des activités lucratives accessoires ?

Voir aussi notre guide : Recevoir des dons

 

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