Compensation de créance en procédure collective

Publié le 18/08/2019 Vu 6 082 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

La question se pose de savoir si le créancier, qui entend obtenir la compensation de sa propre créance avec celle que détient le débiteur, est dans l’obligation de déclarer sa créance ? à défaut, quel est la sanction ?

La question se pose de savoir si le créancier, qui entend obtenir la compensation de sa propre créance avec

Compensation de créance en procédure collective

Il convient de s’intéresser à deux arrêts qui ont été rendus en février et mars 2019 qui viennent aborder la problématique de la compensation d’une créance déclarée, ou non, au sein de la procédure collective.

En effet, la question se pose de savoir si le créancier, qui entend obtenir la compensation de sa propre créance avec celle que détient le débiteur, est dans l’obligation de déclarer sa créance ? à défaut, quel est la sanction ?

Deux jurisprudences viennent illustrer cette problématique,

Dans la première affaire la société A avait été mise en liquidation judiciaire le 6 janvier 2009, Maître L étant désigné liquidateur.

Faisant droit à la requête de ce dernier, une ordonnance d’injonction de payer est rendue et enjoint à la société G avec laquelle la société A avait contracté, de payer à Maître L, ès qualité de mandataire liquidateur de la société A, un solde de factures impayé relatif à des marchandises délivrées courant 2007.

C’est dans ces circonstances que la société G a formé opposition à cette ordonnance, en invoquant des désordres affectant les marchandises livrées et a demandé des dommages-intérêts en réparation de son propre préjudice.

Pour autant, les choses ne sont pas si simples,

En effet, il convient de rappeler que L'article L. 622-7 1 du Code de Commerce dispose que le jugement ouvrant la procédure emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception du paiement par compensation de créances connexes.

Le créancier considérait qu’en l'espèce, les créances réciproques des parties étaient incontestablement connexes comme résultant du même contrat.

De telle sorte qu’il y avait donc lieu d'ordonner leur compensation.

Cependant, il convient de rappeler qu’il appartient au créancier de déclarer ses créances qu'elles soient certaines ou éventuelles et que la compensation pour dettes connexes ne peut être prononcée dès lors que le créancier n'a pas déclaré sa créance.

A défaut de déclaration de créances, aucune compensation n’est possible.

Dans cette décision, la Cour de Cassation rappelle que la compensation n’est possible qu’à charge pour le Juge, au besoin d'office, de vérifier que la société G avait déclaré sa créance ou que les conditions de la compensation légale étaient remplies antérieurement à l'ouverture de la procédure collective.

La société G n’ayant pas déclaré sa créance elle ne peut opposer une créance de désordres et ne peut solliciter de compensation.

Il en est de même dans la deuxième affaire.

En effet, dans cette deuxième affaire, la société B avait mise en liquidation judiciaire le 1er juillet 2014.

Faute d'avoir converti en saisie-attribution, avant le jugement d'ouverture, la saisie conservatoire préalablement diligentée entre les mains de la banque C sur le compte courant ouvert dans ses livres au nom de la société débitrice, le créancier, la société G, en a donné mainlevée le 17 juillet 2014.

Dans ce même élan, le 28 juillet 2014, la banque C a déclaré sa créance entre les mains du liquidateur, déduction faite de la somme de 58 881,52 euros qu'elle avait inscrite sur un compte et conservée après la mainlevée de la saisie conservatoire, en invoquant la compensation opérée entre, d'un côté, la somme ainsi détenue et, de l'autre, le solde débiteur du compte courant de la société B et le capital restant dû sur un prêt consenti à cette société.

La Cour d’Appel a constaté que la banque C avait isolé la somme de 59 467,50 euros sur un compte spécial ouvert au nom de la société B à fin de saisie conservatoire, laquelle était devenue caduque par l'effet du jugement du 1er juillet 2014 d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

Pour autant, la Cour d'Appel a considéré que du fait de cette caducité, aucune compensation ne pouvait être admise entre, d'une part, la créance constituée par le solde du compte spécial et, d'autre part, la créance constituée par le solde du compte courant et la créance constituée par le solde du compte de prêt, bien que l'inscription de la somme litigieuse sur un compte spécial constitue une simple opération comptable sans incidence sur la clause d'unité de comptes.

La Cour de Cassation rappelle que la banque a déclaré sa créance entre les mains du liquidateur, déduction faite de la somme de 58 881,52 euros, conservée en qualité de tiers saisi à la suite de la saisie conservatoire.

Qu’il en résulte que la banque, faute d'avoir déclaré sa créance en son intégralité, ne peut se prévaloir, pour refuser de restituer la somme de 58 881,52 euros au liquidateur, de la compensation fondée sur la connexité des créances réciproques entrées en compte courant.

Ainsi, en procédure collective, que le débiteur soit en procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, l’absence de déclaration de créance formalisé par le créancier l’empêche de procéder à une compensation de sa créance avec celle du débiteur.

 

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

www.laurent-latapie-avocat.fr

 

 

 

 

 

Vous avez une question ?

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles