Recours du débiteur et maison vendue par le mandataire liquidateur

Publié le 13/03/2014 Vu 2 458 fois 0
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Le chef d’entreprise en liquidation judiciaire et qui est désssaisi conserve le droit de former un recours contre le mandataire liquidateur et contre l’ordonnance prononçant la vente du domicile familial.

Le chef d’entreprise en liquidation judiciaire et qui est désssaisi conserve le droit de former un recours

Recours du débiteur et maison vendue par le mandataire liquidateur

Il convient de s’intéresser à un arrêt qui a été rendu par la Cour de Cassation, en date du 5 octobre 2010, n°09-16.602.

Cet arrêt consacre et rappelle le droit propre du débiteur lorsque celui-ci est en liquidation judiciaire et il affirme notamment « le débiteur en liquidation judiciaire conserve, nonobstant le dessaisissement qui le frappe, qualité pour former en recours, contre l’ordonnance du juge commissaire, statuant sur la vente d’un bien immobilier ».

Cette jurisprudence est intéressante car elle rappelle que, lorsque la liquidation judiciaire est prononcée, le chef d’entreprise, lorsqu’il est en nom personnel, est dessaisi de ses droits et biens au profit du mandataire liquidateur qui a vocation dans l’intérêt collectif des créanciers à se substituer à lui.

Dès lors, le chef d’entreprise, qui s’appelle désormais le débiteur, avec toute la connotation négative que cela peut avoir, n’a plus aucune possibilité de procéder à quelque acte que ce soit. Il ne peut plus que porter plainte ou divorcer.

Toutefois, cette jurisprudence lui permet quand même de s’exprimer et de former un recours lorsqu’il ne
partage pas la position de l’organe principal de la procédure collective.

Il convient de rappeler que si le débiteur est « dessaisi », celui-ci n’est pas « décédé ».

Dans cette affaire, le débiteur a été mis en faillite en octobre 2000. Dans le cadre de la procédure collective, le juge commissaire avait ordonné la vente du bien immobilier qui était la propriété indivise du débiteur et de son épouse, laquelle avait été également mise en liquidation judiciaire en 2005 par voie d’extension. Il convient d’ailleurs de remarquer à ce stade-là que l’extension est une procédure couramment employée par le mandataire liquidateur, car elle permet d’appréhender un actif plus important afin de désintéresser les créanciers.

Alors même que la Loi du 26 juillet 2005 avait supprimé cette action, qui permettait l’action dite d’extension-sanction, laquelle permettait au mandataire liquidateur de mettre en liquidation judiciaire personnelle le dirigeant d’une société, cette action en extension demeure sur la base d’une jurisprudence qui permet en cas de fictivité (fiction) ou de flux anormaux, d’étendre la liquidation judiciaire sur d’autres personnes. Cela permet au mandataire liquidateur d’avoir un actif plus important mais cela expose nécessairement les proches du débiteur à des actions du mandataire liquidateur.

Suite à cette ordonnance du 12 février 2008, qui avait été rendue par le juge commissaire et qui autorisait donc
la vente du bien, le débiteur avait formé opposition à l’encontre de cette ordonnance et notamment contesté le fait que le juge commissaire avait excédé ses pouvoirs en vendant un élément essentiel de son patrimoine, à savoir le logement familial, dans des conditions à la fois viles et partiales. En effet, la vente avait été faite au profit d’une tierce personne à un prix qui avait vocation à désintéresser l’ensemble des créanciers.

La juridiction saisie déclare irrecevable l’action du débiteur, au motif qu’en application de l’article L622-9, celui-ci est entièrement dessaisi. En effet, cet article précise que « le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à compter de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens, même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit, tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée et que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur », article L122-9, ancien du Code du Commerce. Cette disposition est toujours en vigueur suivant une nouvelle codification à ce jour.

La jurisprudence heureusement consacre la possibilité pour le débiteur de former des recours sans passer par
l’accord du mandataire liquidateur, voire même d’aller contre lui. Ainsi, la jurisprudence, notamment un arrêt du 8 juillet 2003 Cas.Com. 00-12.744, considère que le débiteur conserve ses droits propres puisque le liquidateur n’exerce que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine pendant toute la durée de la liquidation judiciaire.

Cette jurisprudence me paraît juste car elle permet au débiteur d’être entendu par une juridiction et ainsi, elle respecte les règles organisant les voies de recours.

Elle permet également au débiteur de bénéficier du double degré de juridiction et surtout du droit d’agir en justice.

Ainsi, le chef d’entreprise qui est en liquidation judiciaire, lourdement malmené puisqu’il est notamment considéré comme un débiteur, a la possibilité de faire valoir ses prétentions et contestations sur le déroulement même de la procédure collective car il ne s’agit que d’un droit propre et d’un droit dit droit individuel. Il a donc la possibilité de former seul des demandes, des défenses ou des recours, nonobstant le dessaisissement qui l’affecte. Cette volonté a d’ailleurs été entendue par le législateur puisque le nouvel article L641-9 de la Loi de sauvegarde du 26 juillet 2005, dispose désormais dans son alinéa 3 que « le débiteur accomplit… des actes, exerce les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission du mandataire liquidateur… ».

Il est donc important que le débiteur qui est en liquidation judiciaire, et dans laquelle on ne cesse de lui rappeler qu’il est dessaisi, afin que le mandataire judiciaire puisse réaliser ses actifs pour payer le passif de la procédure collective, puisse se défendre, s’exprimer et être entendu.

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