Indemnités prud’homales : un projet de décret portant fixation du référentiel indicatif

1) Projet de décret sur le référentiel indicatif soumis au Conseil Supérieur de la prud’homie

Ce référentiel est le suivant :

Les montants seraient majorés d’un mois de salaire dans les 2 cas suivants :

• si le salarié est âgé d’au moins 50 ans à la date de la rupture de son contrat ;
• si le demandeur a des difficultés particulières de retour à l’emploi liées à sa situation personnelle et à son niveau de qualifications au regard de la situation du marché du travail au niveau local ou dans le secteur d’activité déterminé.

Ce référentiel applicable en bureau de jugement ne doit pas être confondu avec le barème applicable en cas de conciliation, visé à l’article L. 1235-1 du code du travail. Il va également être modifié.

L’article L. 1235-1 du code du travail (issu de la loi Macron du 6 août 2015), prévoit un référentiel indicatif d’indemnités, applicable devant le Conseil de prud’hommes, en cas de licenciement  sans cause.

Attention, ce référentiel/barème d’indemnités est indicatif et n’est donc pas obligatoire.

A cet égard, le juge peut « prendre en compte [ce] référentiel » pour fixer le montant des indemnités en cas de licenciement irrégulier (art. L. 1235-5 du code du travail) ou dépourvu de cause réelle et sérieuse (art. L. 1235-3 du code du travail).

L’indemnité pour licenciement sans cause, susceptible d’être allouée au salarié, est fonction notamment de son ancienneté, de son âge et de sa situation par rapport à l’emploi, sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles (C. trav., art. L. 1235-1).

Si les deux parties en font la demande, les juges seront tenus d’appliquer strictement ce référentiel.  En pratique, il n’est pas sûr que les parties s’accordent sur l’application du référentiel.

2) Un référentiel indicatif défavorable aux salariés et contra legem ?

Ce référentiel n’est pas favorable aux salariés.

En effet, à titre d’exemple, un salarié, qui possède 2 ans d’ancienneté dans une entreprise de plus de 10 salariés, dont le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse peut prétendre, aujourd’hui, à au moins 6 mois de salaire en application de l’article L. 1235-3 du code du travail.

Or, le projet de référentiel / barème indicatif prévoit, dans un tel cas, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 3 mois de salaires, ce qui est la moitié du montant prévu actuellement à l’article L. 1235-3.

D’ailleurs, dans le cas susvisé, on voit mal comment un juge pourra appliquer ce référentiel ; en effet, lorsqu’un salarié possède plus de 2 ans d’ancienneté dans une entreprise de plus de 10 salariés, l’article L. 1235-3 du code du travail, prévoit un plancher de 6 mois de salaire alors que le référentiel prévoit 3 mois d’indemnités.

Ce référentiel (ce n’est qu’un projet) est, selon nous, contra legem, en tout cas, pour l’indemnité sans cause, des salariés qui ont 2 ans d’ancienneté dans une entreprise de plus de 10 salariés.

Le même raisonnement s’applique pour les salariés qui ont 3 ou 4 ans d’ancienneté (dans une entreprise de plus de 10 salariés) puisque le barème indicatif prévoit qu’ils peuvent prétendre à respectivement 4 et 5 mois d’indemnité pour licenciement sans cause alors que l’article L. 1235-3 prévoit un plancher de 6 mois de salaire pour les salariés ayant plus de 2 ans d’ancienneté.

Il reste à voir quel sera le barème définitif lors de sa publication au Journal Officiel.

Frédéric CHHUM, Avocats à la Cour (Paris et Nantes)

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