Telles qu'en témoignent les nombreuses jurisprudences obtenues pour le compte de clients du Cabinet BEM (voir ci-dessous), la caution appelée en garantie n'est pas désarmée contre la banque qui lui réclame le paiement de la dette d'une société en faillite, bien au contraire.
En effet, la caution peut se défendre efficacement contre la banque dans le cadre de la procédure initiée à son encontre par cette dernière pour obtenir le paiement de sa garantie, à savoir le règlement de la dette par la caution.
Dans son combat pour la défense des cautions, le Cabinet BEM a obtenu des avancées en matière de droit du cautionnement notamment au travers des décisions de justice suivantes :
- Condamnation de la banque Société Générale-Credit du Nord, le 26 septembre 2024 par la Cour d'appel de Douai (inopposabilité de cautionnements d'un montant total de 370.000 €)
- Condamnation de la banque Société Générale le 25 avril 2023 par le Tribunal judiciaire de Créteil (inopposabilité d'un cautionnement de 377.000 €)
- Condamnation de la banque Caisse d’Épargne le 15 juin 2022 par le Tribunal de commerce de Paris (annulation de deux cautionnements de 195.000 € et 104.000 €)
- Condamnation de la banque Crédit du Nord le 25 avril 2022 par le Tribunal judiciaire de Caen (annulation d'un cautionnement de 520.000 €)
- Condamnation du Crédit Mutuel le 17 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Strasbourg ( annulation d'un cautionnement de 70.000 €)
- Condamnation du Crédit Logement le 22 octobre 2021 par le Tribunal judiciaire de Paris (annulation d'un cautionnement de 391.000 €)
- Condamnation du Crédit Agricole le 28 septembre 2021 par la Cour d'appel de Grenoble (annulation d'un cautionnement de 139.000 €)
- Condamnation de la Banque Populaire le 16 juin 2021 par la Cour d'appel de Paris (annulation d'un cautionnement de 73.500 €)
- Annulation d’un recours du Crédit Logement contre une caution d’un prêt immobilier et obtention de dommages et intérêts au profit de la caution le 6 mai 2020 par le Tribunal judiciaire de Lorient (annulation d'un cautionnement de plus de 400.000 €)
- condamnation de la Banque Populaire le 26 septembre 2019 par la Cour d'appel de Lyon (annulation d'un cautionnement de 54.000€)
- condamnation de la banque Crédit Agricole le 12 septembre 2019 par le tribunal de grande instance du Havre (annulation de cautionnements de 300.000 € et indemnisation du préjudice moral des cautions à hauteur de 2.000 € chacune)
- condamnation de la société de crédit-bail NATIOCREDIMURS le 28 mai 2019 par le tribunal de commerce de Créteil (annulation d'un cautionnement de 148.000€)
- condamnation de la banque CIC le 23 mai 2019 par le tribunal de grande instance de Paris (annulation d’un cautionnement de 113.000€)
- condamnation de la banque BNP Paribas le 24 avril 2019 par le Tribunal de commerce de Châteauroux (annulation d'un cautionnement de 90.000€)
- condamnation de la banque Crédit Lyonnais le 4 avril 2019 par le Tribunal de grande instance d'Angoulême (annulation d'un cautionnement de 850.000€)
- condamnation de la société Sogelease le 12 mars 2019 par le Tribunal de commerce de Bobigny (annulation d'un cautionnement de 68.000€).
- condamnation de la Banque Populaire le 23 janvier 2019 par la Cour d’Appel de Paris (annulation d’un cautionnement de 108.000€)
- annulation d’un cautionnement professionnel donné à un fournisseur de matériel par le Tribunal de Commerce de Bourg en Bresse le 11 janvier 2019 (cautionnement professionnel de 200.000€)
- condamnation de la banque Bred Banque Populaire le 15 octobre 2018 par le tribunal de commerce de Melun (annulation d'un cautionnement de 37.500€)
- condamnation de la banque Bred Banque Populaire le 17 avril 2018 par le Tribunal de grande instance de Fort de France (annulation d'un cautionnement de 738.000€)
- condamnation de la banque Société Générale le 16 février 2018 par le Tribunal de grande instance de Pontoise (annulation d'un cautionnement de 90.000€)
- condamnation de la banque CIC le 13 février 2018 par le Tribunal de commerce de Bobigny (annulation d'un cautionnement de 87.000€)
- condamnation de la banque Société Générale le 9 janvier 2018 par le Tribunal de commerce de Compiègne (30.000€ à titre d'indemnisation de la caution)
- condamnation de la banque HSBC le 7 novembre 2017 par la Cour d'appel de Poitiers (annulation de deux cautionnements de 250.000€)
- condamnation de la banque Caisse d'Épargne le 7 novembre 2017 par la Cour d'Appel d'Angers (36.400€ en indemnisation de la caution)
- condamnation de la banque Caisse d'Épargne le 14 septembre 2017 par la Cour d'Appel de Grenoble (2.000€ à titre d'indemnisation de la caution)
- condamnation de la banque Crédit Agricole le 14 septembre 2017 par le tribunal de grande instance de Nîmes (annulation d'un cautionnement de 158.000€)
- condamnation de la banque Société Générale le 10 mai 2017 par le Tribunal de grande instance de Paris (annulation d'un cautionnement de 300.000€)
- condamnation de la Banque Populaire le 16 janvier 2017 par le Tribunal de commerce de Melun (annulation d'un cautionnement de 140.000€)
- condamnation de la banque BNP le 6 janvier 2017 par le Tribunal de commerce de GAP (annulation d'un cautionnement de 60.000€)
- condamnation de la Banque Populaire le 1er décembre 2016 par le Tribunal de commerce de Saintes (annulation d'un cautionnement de 72.000€)
- condamnation de la banque CIC le 27 octobre 2016 par la Cour d'appel de Versailles (annulation d'un cautionnement de 108.000€)
- condamnation de la banque NATIXIS LEASE le 8 mars 2016 par le Président du Tribunal de commerce de Bourges (annulation d'un cautionnement de 73.000€)
- condamnation de la banque Crédit du Nord le 22 septembre 2015 par la Cour d’appel de Paris (annulation d'un cautionnement de 468.000€)
- condamnation de la Banque Populaire le 13 mai 2015 par le Tribunal de commerce de Paris (annulation d'une caution de 177.000€)
- condamnation de la banque CIC le 11 juillet 2014 par le Tribunal de commerce de Nanterre (annulation d'un cautionnement de 108.000€)
- condamnation de la banque CIC le 11 mars 2014 par la cour d’appel d’Angers (annulation d'un cautionnement de 192.000€)
- condamnation de la Banque Populaire le 4 décembre 2013 par le Tribunal de commerce de Versailles (annulation d'un cautionnement de 500.000€)
- condamnation de la banque BNP le 19 octobre 2012 par le Tribunal de commerce de Versailles (annulation d'un cautionnement de 380.000€)
- condamnation de la banque CIC le 20 octobre 2011 par le Tribunal de commerce de Paris (annulation d'un cautionnement de 48.000€).
Il s'agit classiquement du cas d'un dirigeant d'entreprise ou d'une personne de son entourage (associé, conjoint, concubin, PACS, ami, membre de la famille) qui s'est porté caution au profit d'une société dans le cadre d'un crédit bancaire ou d'une autorisation de découvert du compte courant accordée à cette société, et qui se trouve par la suite être défaillante, en faillite ou liquidation judiciaire, puis qui reçoit une mise en demeure ou une assignation devant le tribunal par la banque afin de tenter d'obtenir le paiement du cautionnement.
Or, il existe au moins 21 moyens de défense dont dispose la caution afin de limiter ou faire annuler son/ses cautionnement(s) :
1 – L’absence de communication par la banque d’un formulaire de renseignements complet sur la situation financière et patrimoniale de la caution au moment de son engagement
2 – L’interprétation et l’application des limites du contrat de cautionnement telles que l’étendue, la durée ou l’objet du contrat
3 – Le non-respect du formalisme de l'acte de caution
4 - La nullité du cautionnement sans mention de la durée ou du délai de l’engagement de caution
5 - La caution doit être informée chaque année de la portée de son engagement et de sa faculté d'y mettre fin
6 - La caution doit être informée des incidents de paiements intervenus
7 - Le non-respect du principe de proportionnalité par la banque et la nullité de la caution pour disproportion
8 - Le non-respect par le banquier dispensateur de crédit de son obligation de conseil ou de devoir de mise en garde
9 - La décharge de la caution par le jeu du bénéfice de subrogation
10 - La violation de l'obligation d'obtenir le consentement de la caution en cas de modification du crédit cautionné
11 - L’inopposabilité du cautionnement en l’absence de déclaration de créance au passif de la liquidation de la société cautionnée
12 - L'existence d'un dol vice du consentement de la caution en présence d'une garantie de la banque par l'OSEO ou la BPI
13 - La « théorie des dominos » ou lorsqu'une caution est annulée elle annule aussi les autres cautions
14 - La prescription de l'action en paiement de la banque contre la caution
15 - L'absence de consentement de l'un des époux mariés sous le régime de la communauté
16 - En cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie des concours sont disproportionnées à ceux-ci
17 - La présence d'une procédure collective en cours et n'ayant donné lieu à aucun plan ou liquidation judiciaire de la société cautionnée car le jugement d'ouverture d'une procédure collective suspend jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation toute action contre les cautions
18 - La nullité du cautionnement quand la société cautionnée est en cours de formation
19 - La nullité du cautionnement en cas de changement de société cautionnée, juridiquement appelée la novation du contrat de prêt principal par changement de débiteur
20 - La nullité du recours du Crédit Logement contre une personne caution en cas d’irrespect de la procédure d’information de la caution antérieure au paiement de la dette de la banque par le Crédit Logement
21- L'absence d'exigibilité de la dette pour défaut de valadité du prononcé de la déchéance du terme du prêt
1 - L'absence de communication par la banque d'un formulaire de renseignement complet sur la situation financière et patrimoniale de la caution
Les banques doivent justifier qu'elles ont, préalablement à la conclusion des cautionnements dont l’exécution est poursuivie, demandé aux cautions de déclarer le montant de leurs revenus, charges, engagements bancaires, crédits ainsi que le détail de leur patrimoine.
En effet, dans une affaire gagnée contre la banque CIC pour un client du Cabinet BEM, le 20 octobre 2011, le Tribunal de commerce de Paris a jugé qu'un gérant, caution personnelle d’un emprunt bancaire conclu par sa société, peut valablement se dégager d'un cautionnement disproportionné à ses biens et revenus en l'absence de communication d'un tel formulaire de renseignement complet.
À cet égard, ils ont jugé que :
« Le principe de proportionnalité est ainsi étendu à toutes les personnes physiques ayant conclu un cautionnement avec un créancier professionnel quel que soit l’objet de la dette cautionnée et qu’il n’y a pas lieu de distinguer là où la loi ne distingue pas.
Attendu que la SOCIETE BORDELAISE DE CREDIT ne justifie pas avoir, préalablement à la conclusion des cautionnements dont l’exécution est poursuivie, demandée à Mme X de déclarer le montant de ses revenus et de son patrimoine.
Attendu que la SOCIETE BORDELAISE DE CREDIT n’apporte pas la preuve que Mme X possèderait au jour des poursuites dont elle fait l’objet un patrimoine lui permettant de faire face à son obligation ;
Attendu dès lors que les cautionnements conclus par Mme X sont manifestement disproportionnés à ses biens et ses revenus ;
En conséquence le tribunal dira que la SOCIETE BORDELAISE DE CREDIT ne peut se prévaloir des engagements de caution et déboutera la SOCIETE BORDELAISE DE CREDIT de ses demandes ».
Par conséquent, les cautions dirigeantes peuvent invoquer de manière rédhibitoire l'annulation de leur engagement de caution pour disproportion en l'absence d'un formulaire de renseignement complet sur la situation financière et patrimoniale de la caution.
Sur la base de cette jurisprudence, le cabinet BEM a obtenu du Tribunal de commerce de Versailles la condamnation de la Banque Populaire, le 4 décembre 2013.
À cette occasion, le Tribunal de commerce de Versailles a jugé que :
« Lorsque le prêteur conclut un contrat de crédit, il est censé avoir estimé préalablement par tout moyen à sa disposition que le garant sera raisonnablement à même de respecter les obligations découlant de son engagement ».
Le 22 septembre 2015, le cabinet BEM a obtenu de la cour d’appel de Paris qu'elle annule des cautionnements solidaires de la banque Crédit du Nord compte tenu de leur disproportion par rapport aux biens et revenus des cautions. (Cour d’appel de Paris, Pôle 5 - Chambre 5-7, 22 septembre 2015 Crédit du Nord / M et Mme X).
Or, dans un nombre important de dossiers,
- aucune demande préalable d'information digne de ce nom n'est faite par la banque,
- quand la demande préalable d'information est faite par la banque, elle est incomplète ou s'est perdue dans les archives de la banque.
2 - Les limites du contrat de cautionnement (étendue, durée, objet ...)
Les limites du contrat de cautionnement découlent de l'analyse du document signé par la caution et la banque afin de rechercher quelle a été la volonté des parties.
Le juge doit, dans cette recherche, respecter certains principes d'interprétation généralement très protecteurs des intérêts de la caution.
À cet égard, l'article 2292 du code civil dispose que : « le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès, et on ne peut pas l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ».
Il découle de ce texte que tout doute quant à l'étendue de l'engagement doit profiter à la caution.
L'interprétation n'a cependant lieu d'être que si les clauses de l'acte sont imprécises ou ambiguës.
Un acte clair n'a pas à être interprété.
Ensuite, il faut tenir compte de la nature du cautionnement souscrit et de certaines limitations conventionnelles qui ont pu être introduites à la demande de la caution.
3 - La nullité du cautionnement pour non-respect du formalisme de l’acte de caution
Lorsqu’une personne se porte caution envers la banque, elle doit écrire de sa main des mentions obligatoires avant de signer l’acte de caution.
À défaut, l’acte de cautionnement est nul.
En effet, le code de la consommation impose un formalisme dont le respect conditionne la validité de l’acte de caution, s’agissant d’une part, du cautionnement simple et, d’autre part, du cautionnement solidaire.
Concernant les cautionnements simples, l’article L 341-2 du code de la consommation dispose que :
« Toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : « En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même. »
Concernant les cautionnements solidaires, l’article L. 341-3 du code de la consommation dispose que :
« Lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : "En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X..., je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X...» ».
Ces dispositions sont d’ordre public de sorte que les parties au contrat ne peuvent y déroger.
De plus, sur le fondement de ces textes, le 5 avril 2011, la Cour de cassation a jugé que :
« La nullité d'un engagement de caution souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel est encourue du seul fait que la mention manuscrite portée sur l'engagement de caution n'est pas identique aux mentions prescrites par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, à l'exception de l'hypothèse dans laquelle ce défaut d'identité résulterait d'erreur matérielle » (Cour de Cassation, chambre commerciale, 5 avril 2011, n° 09-14358).
À cet égard, il est important de préciser que, selon la jurisprudence, seules les erreurs affectant le sens et/ou la portée des mentions manuscrites des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation peuvent entraîner la nullité de l’acte de caution.
Ce qui exclut l’erreur matérielle de ponctuation, la Cour de cassation ayant jugé que :
« L’apposition d'une virgule entre la formule caractérisant l'engagement de caution et celle relative à la solidarité n'affecte pas la portée des mentions manuscrites conformes aux dispositions légales » (Cour de Cassation, chambre commerciale, 5 avril 2011, n° 10-16426).
De même pour l’omission ou l’ajout de certains mots, la Cour de cassation, ayant déclaré que:
« (…) l'évocation du caractère « personnel et solidaire « du cautionnement, d'une part, la substitution du terme « banque « à ceux de « prêteur « et de « créancier », d'autre part, n'affectaient ni le sens ni la portée des mentions manuscrites prescrites par les articles L. 341-2 et suivant du code de la consommation » (Cour de Cassation, première chambre civile, 10 avril 2013, n° 12-18544).
4 - La nullité du cautionnement sans mention de la durée ou du délai de l’engagement de caution
Pour mémoire, l'article L. 341-2 du code de la consommation prévoit que toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci :
« En me portant caution de X, dans la limite de la somme de …. Couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant, les pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de …, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X n'y satisfait pas lui-même ».
Dès lors, la durée de l’engagement de la caution figure parmi les mentions manuscrites obligatoires de l’acte de cautionnement et constitue à ce titre une condition de validité de l’acte de caution.
En effet, le 22 avril 2014, la Cour d’appel de Montpellier a annulé un cautionnement qui n’indiquait pas la durée de l’engagement de la caution (Cour d'appel de Montpellier, 22 avril 2014, n°13/03451).
À cet égard, il a été jugé que :
« Si les dispositions légales susvisées [l'article L. 341-2 du code de la consommation] ne fixent pas la manière dont la durée de l'engagement de caution doit être mentionnée dans l'acte de cautionnement, il n'en demeure pas moins que, s'agissant d'un élément essentiel permettant à la caution de mesurer la portée exacte de son engagement, elle doit être précisée clairement, sans qu'il soit nécessaire de se reporter aux clauses imprimées de l'acte.
Ainsi le terme « mensualité » défini comme une somme payée mensuellement ne correspond pas à une durée.
Aucune limitation dans le temps des mensualités visées dans la mention litigieuse n'est précisée. Dès lors, on ne peut pas considérer, comme le prétend la banque, que l'expression « 108 mensualités » correspond à 108 mois puisque l'indication d'un nombre d'échéances n'est pas représentative d'une durée.
La formule utilisée qui ne revêt aucun sens, affecte la compréhension de la durée de l'engagement de caution et par suite, sa validité. »
Ainsi, l’acte de cautionnement est nul si la mention manuscrite devant indiquer la durée de l’engagement de la caution ne figure pas expressément dans le cautionnement.
Par conséquent, la caution poursuivie en paiement peut opposer à la banque la nullité du cautionnement pour non indication de la durée de son engagement, pour s’en trouver concrètement totalement libérée financièrement.
5 - La caution doit être informée chaque année de la portée de son engagement et de sa faculté d'y mettre fin
L’article L. 313-22 du code monétaire et financier impose une obligation annuelle d'information à tout établissement de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise sous la condition du cautionnement par une personne physique ou morale.
L’article L. 341-6 du code de la consommation prévoit que le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement.
Si cet engagement est à durée indéterminée, il rappelle la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.
À défaut, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Ce texte n'est pas applicable aux situations consommées avant cette date (Cour de Cassation, chambre commerciale, 13 février 2007).
Ces dispositions étant d'ordre public, il est interdit au créancier de faire renoncer la caution à son droit à l'information.
Il a été affirmé que les cautions « dirigeantes» comme les cautions « profanes» pouvaient se prévaloir du non-respect de l'obligation d'information.
L'article 2293, alinéa 2, du code civil énonce aussi que lorsque le cautionnement est contracté par une personne physique, celle-ci est informée par le créancier de l'évolution du montant de la créance garantie et de ces accessoires au moins annuellement à la date convenue entre les parties ou, à défaut, à la date anniversaire du contrat, sous peine de déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités.
6 - La caution doit être informée des incidents de paiements intervenus
En application de l'article L. 341-1 du code de la consommation, toute personne physique qui s'est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement. Si le créancier ne se conforme pas à cette obligation, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.
En application de l'article L. 313-9 du code de la consommation, toute personne physique qui s'est portée caution d'une opération de crédit à la consommation doit être informée par l'établissement prêteur de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement caractérisé susceptible d'inscription au fichier à l'article L. 333-4. La loi n'est applicable que si le premier incident de paiement est intervenu postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi (Cour de Cassation, chambre Commerciale, 13 février 2007).
En application de l'article 47, II, de la loi du 11 février 1994, le créancier de la dette professionnelle d'un entrepreneur individuel ou d'une entreprise constituée sous forme sociétaire cautionnée par une personne physique est désormais tenu d'informer la caution de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement. À défaut, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.
La loi prévoit une sanction : la déchéance pour le créancier du droit aux intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la communication de la nouvelle information.
Seuls les intérêts conventionnels sont supprimés mais non les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153, alinéa 3, du code civil, après mise en demeure.
7 - Le non-respect du principe de proportionnalité par la banque et la nullité de la caution pour disproportion
Cet argument bien que récent est encore trop méconnu ou mal employé.
Pourtant, c'est souvent un des moyens les plus efficaces pour faire annuler la caution.
Le créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Le principe de proportionnalité du cautionnement institué par le Code de la consommation s'applique à toutes les cautions personnes physiques envers un créancier professionnel, même les dirigeants cautions.
Par un arrêt du 3 février 2009, la cour de cassation précise que le caractère disproportionné de l'engagement au regard des revenus et du patrimoine de la caution s'apprécie à la date de la souscription et non à celui des poursuites.
Le 22 juin 2010, la cour de cassation a jugé que :
« selon l'article L. 341-4 du code de la consommation, la sanction du caractère manifestement disproportionné de l'engagement de la caution est l'impossibilité pour le créancier professionnel de se prévaloir de cet engagement ; qu'il en résulte que cette sanction, qui n'a pas pour objet la réparation d'un préjudice, ne s'apprécie pas à la mesure de la disproportion ; qu'ayant retenu que l'engagement de la caution était manifestement disproportionné à ses biens et revenus, la cour d'appel a, à bon droit, rejeté la demande de la caisse » (Cour de Cassation, chambre commerciale, 22 juin 2010, n° 09-67.814)
Sur le fondement notamment de cette jurisprudence, le 22 septembre 2015, la cour d’appel de Paris a annulé au profit de clients du cabinet Bem des cautionnements solidaires de la banque Crédit du Nord en jugeant que compte tenu du régime de la communauté des époux cautions : « le caractère manifestement disproportionné de la caution doit être examiné au regard de la communauté et non individuellement ».
Dans ce contexte, les juges d'appel ont repris l'équation de la disproportion présentée et justifiée, de manière détaillée, par le cabinet Bem au regard de la « communauté des époux cautions ».
Concrètement, les juges ont analysé les revenus annuels et patrimoine des cautions au jour de la souscription du cautionnement litigieux mais aussi des charges constituées du remboursement de l'emprunt immobilier souscrit par les cautions pour acquérir le logement familial, ainsi que les charges locatives supportées par celles-ci :
- « le total des engagements représentait, si l’on ajoute les sommes mensuelles de remboursement du prêt cautionné plus de 55 % de leurs revenus mensuels ».
- « la charge du remboursement de ces mensualités représentaient, ainsi qu’ils le soutiennent, 55 % de leurs revenus mensuels, alors même qu’ils supportaient déjà 1 197,42 euros de remboursements au titre du prêt consenti par la même banque pour l’acquisition de leur résidence, lequel n’étant pas encore remboursé ne pouvait garantir le paiement de l’intégralité du prêt. (Cour d’appel de Paris, Pôle 5 - Chambre 5-7, 22 septembre 2015 Crédit du Nord / M et Mme X).
Cette décision de la Cour d'appel de Paris confirme la consécration du taux limite de proportionnalité des cautionnements qui avait été posé, pour la première fois en jurisprudence, dans une précédente affaire jugée, le 4 décembre 2013, par le Tribunal de commerce de Versailles, au profit d'un autre client du cabinet Bem, aux termes de laquelle il a été posé deux limites d'endettement différents concernant des cautions.
Pour savoir si la disproportion est caractérisée, une véritable analyse de la situation financière et patrimoniale de la caution au jour de son engagement est nécessaire.
L'ensemble des revenus et des dettes de la caution sont à prendre en compte pour le calcul de la disproportion du cautionnement.
Aux termes de cette analyse sera calculée la faculté d'endettement et le taux d'endettement de la caution.
Ainsi, selon la jurisprudence obtenue par le Cabinet Bem, le 4 décembre 2013, devant le Tribunal de commerce de Versailles et le 27 octobre 2016 devant la Cour d'appel de Versailles, les juges ont fixé expressément la limite au-delà de laquelle le cautionnement est disproportionné et donc inopposable à la caution.
Le taux d'endettement maximum consacré par les juges est de 33%.
À titre d'exemple, sur la base de l'équation développée par le cabinet BEM en matière de calcul de disproportion des cautionnements, le 6 janvier 2017, le tribunal de commerce de Gap a jugé, au profit d'un autre client du Cabinet Bem, que la charge d'endettement représentait 655,58 % le revenu mensuel de la caution.
Surtout, les juges de Gap ont expressément confirmé les deux seuils de disproportion des cautionnements posés le 4 décembre 2013.
Peu importe les données figurant sur la fiche de renseignements, « mêmes surévaluées », les juges doivent vérifier :
- que la banque ne pouvait pas ignorer que l’épargne de la caution « allait être employé » pour constituer un apport ;
- que « les dépenses courantes » et les charges courantes de la caution telles que le loyer ;
- si la banque a bien respecté son obligation particulière de se renseigner sur la situation financière de la caution préalablement à la signature de l'engagement de caution.
L'analyse et le calcul de la disproportion des cautionnements suppose donc d'apprécier au cas par cas le régime matrimonial, les revenus, patrimoine, charges et endettement des cautions.
La stratégie judiciaire et le savoir d'un avocat spécialisé en droit du cautionnement jouent à plein pour le développement et la justification de l'argument juridiquement relatif à la disproportion du cautionnement.
8 - Non-respect par le banquier dispensateur de crédit de son obligation de conseil ou de devoir de mise en garde
La caution peut invoquer la faute du créancier qui a manqué à son devoir de mise en garde en accordant un crédit excessif.
Le crédit peut avoir été consenti à un particulier ou à une entreprise.
Cependant, les juges considèrent que seuls les profanes bénéficient d'un tel devoir de mise en garde. L'emprunteur comme la caution avertie doivent démontrer que l'établissement de crédit avait des informations sur leur situation qu'eux-mêmes étaient en droit d'ignorer (Cour de Cassation, chambre commerciale, 28 novembre 2006).
Lorsque la faute du créancier est établie, la caution a le droit à des dommages et intérêts qui peuvent se compenser avec les sommes dues au titre du cautionnement.
En matière de cautionnement d’entreprise, aucune obligation de conseil ou de devoir de mise en garde n'existe au profit du dirigeant caution cependant si la caution est profane ou non avertie elle va pouvoir bénéficier de cette protection particulière.
Pour cela, la Cour de cassation exige des juridictions du fond qu'elles s'assurent que la caution n'avait eu aucun rôle dans la gestion de l'entreprise (Cour de Cassation, chambre commerciale, 31 mai 2005) ou dans la présentation du dossier de prêt (Cour de Cassation, chambre commerciale, 1er juillet 2003).
La caution profane est celle qui ne bénéficie d'aucune formation comptable ou juridique sérieuse, qui n'est pas un opérateur économique averti (CA Nîmes, 17 novembre. 2005).
Les dirigeants cautions sont le plus souvent considérés comme informés (Cour de Cassation, chambre commerciale, 8 janvier 2008).
Cependant, un dirigeant non effectif peut être considéré comme non averti ou peut établir qu'il est profane alors même qu'il est véritablement un dirigeant s’il est néophyte ou incapable de mesurer le risque pris (CA Amiens, 11 octobre 2007 - CA Douai, 3 mai 2007 - CA Aix-en-Provence, 29 novembre 2007 – CA Toulouse, 23 janvier 2007).
9 - Décharge de la caution par le jeu du bénéfice de subrogation
En application de l'article 2314 du code civil, » la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution ».
Cette prérogative, reconnue à la caution, de se prévaloir de la faute du créancier est connue sous le nom de bénéfice de subrogation, est d'ordre public et bénéficie à l'ensemble des cautions sans que l'on ne puisse la remettre en cause contractuellement.
Comme l'a énoncé la Cour de cassation dans un arrêt de principe, il s'agit de tout droit préférentiel ou exclusif conférant un avantage particulier au créancier (Cour de Cassation, chambre commerciale, 3 mai 2006).
La caution qui ne peut se prévaloir de la perte d'un droit préférentiel peut seulement engager la responsabilité civile du créancier (Cour de Cassation, première chambre civile, 17 mars 1998), c’est le cas lorsque le créancier a fait perdre à la caution le bénéfice de :
· Une cession de créance à titre de garantie (Cour de Cassation, première chambre civile 30 septembre 1997),
· Une réserve de propriété Cour de Cassation, chambre commerciale, 27 février 1996),
· Un droit de propriété résultant d'un contrat de crédit-bail Cour de Cassation, chambre commerciale, 14 février 1995),
· Un droit de rétention (Cour de Cassation, chambre commerciale, 25 novembre 1997).
10 - Violation de l'obligation d'obtenir le consentement de la caution en cas de modification du crédit cautionné
S'agissant de la nature et l’étendue du cautionnement, l’article 2292 du Code civil dispose que :
« Le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès, et on ne peut pas l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté. »
Sur le fondement de l’article 2292 du Code civil précité, la Cour de cassation a jugé que :
« (...) les conditions du prêt ayant été modifiées postérieurement à la souscription de l’engagement de caution, celle-ci devait les accepter et que la connaissance qu’elle devait en avoir en sa qualité de dirigeant de la société débitrice ne suffisait pas à caractériser une telle acceptation (...)» (Cour de Cassation, chambre commerciale, 24 juin 2014, N° de pourvoi : 13-21074).
Ainsi, le 24 juin 2014, la Cour de cassation a posé le principe selon lequel la modification du contrat de prêt bancaire postérieure à la souscription d’un cautionnement doit être soumise à l’acceptation de la caution afin que la modification du contrat de prêt lui soit opposable.
En d’autres termes, la caution doit consentir à toute modification du contrat de prêt postérieure à la conclusion de son engagement de caution afin que ces nouvelles modalités lui soient opposables par la banque.
En outre, la Cour de cassation a précisé que la qualité de dirigeant de la société débitrice ne dispense la banque de recueillir le consentement exprès de la caution lors d’une modification du contrat de prêt.
À défaut de respect du principe jurisprudentiel précité, la banque ne peut pas valablement opposer le cautionnement conclu à la caution.
11 - L’inopposabilité du cautionnement en l’absence de déclaration de créance au passif de la liquidation de la société cautionnée
L'article L.622-26 du Code de commerce dispose :
« A défaut de déclaration dans les délais prévus à l'article L.622-24, les créanciers ne sont pas admis dans la répartition des dividendes à moins que le juge commissaire ne les relève de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est due à leur fait ou qu'elle est dû à une omission volontaire du débiteur lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L.622-6.
Ils ne peuvent alors concourir que pour les distributions postérieures à leurs demandes ».
À cet égard, l’article L. 622-24, alinéa 1er, du Code de Commerce précise que :
« A partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans des délais fixés par décret en Conseil d'Etat. Les créanciers titulaires d'une sûreté publiée ou liés au débiteur par un contrat publié sont avertis personnellement ou, s'il y a lieu, à domicile élu. Le délai de déclaration court à l'égard de ceux-ci à compter de la notification de cet avertissement.»
Ainsi, il ressort des dispositions légales précitées et d’un arrêt récent du 3 juillet 2013 (Cour de cassation, première chambre civile, 3 juillet 2013, n°12-21126), trois principes selon lesquels :
· La participation aux répartitions et dividendes prévue dans le cadre de procédures collectives en application de l'article L.622-26 du code de commerce constitue un droit préférentiel ;
· Le défaut de déclaration de créance par une banque créancière au passif du débiteur cautionné entraîne donc la perte d'un droit préférentiel et constitue une faute entraînant l'impossibilité pour la caution de bénéficier d'un recours subrogatoire à l'encontre de l'emprunteur principal ;
· La caution est fondée à invoquer la décharge de son cautionnement suite à la perte de son droit préférentiel du fait de la banque créancière.
Par conséquent, l'absence de déclaration de la créance au passif d'une procédure collective entraine pour la caution une décharge totale de son engagement.
12 - L'existence d'un dol vice du consentement de la caution en présence d'une garantie de la banque par l'OSEO ou la BPI
L'OSEO, remplacée par la Banque Publique d’Investissement depuis 2013, sont des associations de soutien public aux entreprises.
Concrètement ces organismes d'État garantissent les crédits « de renforcement de la trésorerie des entreprises », sur la base d'un fonds ayant pour vocation de soutenir les opérations de renforcement de la structure financière des PME.
De manière traditionnelle, les cautions pensent à tort que leur engagement est limité car l'OSEO ou la Banque Publique d’Investissement les protègera en cas d'impayé et qu'ils payeront en leur lieu et place leur dette vis à vis de la banque, à hauteur du pourcentage du montant de la dette garantie.
Or, cette garantie ne bénéficie qu'à la banque prêteuse et non pas à la personne qui s'est portée caution du remboursement de l'emprunt.
La jurisprudence estime donc que le défaut d’information peut induire en erreur les cautions qui pensent, à tort, que cette garantie limitera d’autant la somme qui pourra leur être réclamé en vertu de leur engagement de caution (Cour d'appel d'Orléans, 6 juin 2013, N°12-01613 ; Cour d'appel de Toulouse, 8 octobre 2013, N°12-00998 ; Cour de Cassation, chambre commerciale, 3 décembre 2013, N° 12-23976).
Ce défaut d’information constitue donc une faute à l'origine d'un préjudice consistant dans la perte d'une chance de ne pas avoir souscrit de cautionnement (Cour d'appel de Versailles, 16 mai 2013 ; N° 12/02606).
De plus, le 23 septembre 2014, la Cour de cassation a jugé que le défaut d’information peut justifier une annulation du cautionnement pour dol vice du consentement (Cour de Cassation, chambre commerciale, 23 septembre 2014, n° 13-20766).
En l'espèce, la Banque populaire a accordé à une société un prêt assorti de la garantie de l'Oséo, dont M. et Mme X (les dirigeants) se sont rendus cautions.
La société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaire, la banque a assigné en paiement les cautions, qui ont invoqué la nullité de leur engagement pour dol.
Les juges ont annulé les engagements des cautions et rejeté, en conséquence, les demandes en paiement de la banque.
En effet, pour retenir l'existence d'une réticence dolosive de la part de la banque envers la caution, la Cour de cassation considère que :
« le prêt litigieux était assorti de la garantie de l'OSEO, laquelle était de nature à accréditer auprès des cautions, l'effectivité du renforcement de la trésorerie de la société ». (Cour de Cassation, chambre commerciale, 23 septembre 2014, N° de pourvoi: 13-20766).
Aux termes de cette décision, la jurisprudence impose dorénavant aux banques une obligation d’information envers les cautions sur les modalités et conditions d'exécution de la garantie Oseo ou de la Banque Publique d’Investissement.
Par conséquent, à défaut d'information de la caution sur la portée de cette garantie spéciale, celle-ci faire valoir une réticence dolosive de la banque ayant surpris son consentement pour faire annuler son cautionnement.
La sanction est donc que les cautions solidaires sont déchargées de leur cautionnement personnel et solidaire en l’absence d’information sur la garantie par l’OSEO ou la BPI.
13 - La « théorie des dominos» ou lorsqu'un cautionnement tombe il fait tomber tous les autres
La « théorie des dominos» est une dénomination personnelle et imagée donnée à un phénomène nouveau en jurisprudence en faveur des cautions.
Depuis un arrêt du 18 mars 2014 de la Cour de cassation, la disparition des cautionnements solidaires fait disparaitre la condition déterminante des autres engagements de caution.
Autrement dit, la caution solidaire poursuivie en paiement peut se prévaloir de la nullité des autres cautions pour faire annuler son propre cautionnement (Cour de cassation, chambre commerciale, 18 mars 2014, N° de pourvoi : 13-11733).
Ainsi, quand un cautionnement est annulé, disproportionné ou vicié, les autres cautions peuvent utilement s'en prévaloir grâce à la « théorie des dominos ».
14 - La prescription de l'action en paiement de la banque contre la caution
L'un des arguments quasiment jamais invoqué en défense par les cautions et pourtant souvent susceptible de trouver à s'appliquer est le délai de prescription de l'action en recouvrement de la banque de deux ans.
En effet, l'action en paiement de la banque contre la caution est enfermée dans une prescription spéciale dite biennale.
L'article L137-2 du code de la consommation dispose que :
« L'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ».
La caution est assimilée en jurisprudence à un consommateur, les notions de « profane » et d’ « averti » sont désuets depuis les années 2010 car les juges estiment que les dirigeants ne sont pas, en tant que tels, des spécialistes du crédit et du cautionnement.
Le délai de prescription de l'action de la banque contre une caution court à compter du jour où la banque a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer l’action en recouvrement du crédit consentie à un professionnel ou un consommateur, c'est à dire à la date du premier incident de paiement non régularisé et non de la date de l'envoi de la mise en demeure ou de la déchéance du terme par la banque.
Or, en pratique les banques laissent très souvent passer plus de deux ans entre les premiers impayés et l'assignation en justice de la caution.
Le cas échéant, par le jeu du délai de prescription dépassé, la caution peut se défendre efficacement contre la banque qui lui réclame en justice le paiement de la dette garantie.
15 - L'absence de consentement de l'un des époux mariés sous le régime de la communauté
L'absence de consentement de l'un des époux mariés sous le régime de la communauté ne permet que de rendre inopposable le cautionnement à l'époux non consentant.
Par voie de conséquence, aucune exécution ne peut être faite valablement sur la communauté des époux par le créancier.
Ce moyen de défense a cependant des effets limités en ce qu'il ne limite que les effets du cautionnement sans permettre de l'anéantir.
16 - En cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie des concours sont disproportionnées à ceux-ci
L'analyse de la fraude et de l'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur relèvent d'une appréciation au cas par cas.
17. La présence d'une procédure collective en cours et n'ayant donné lieu à aucun plan ou liquidation judiciaire de la société cautionnée
Pour mémoire, le jugement d'ouverture d'une procédure collective suspend jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation toute action contre les cautions.
18. La nullité du cautionnement quand la société cautionnée est en cours de formation
Ce moyen de droit est intéressant sur le plan juridique et pratique pour les cautions lorsque la constitution de la société et les formalités d’immatriculation de la société n’ont pas été effectuées.
Le cas échéant, la caution ne peut être tenue à garantir la dette d'une personne autre que celle désignée dans l'acte de cautionnement.
Autrement dit, la caution n'est pas tenue de rembourser la dette due au titre d’un cautionnement lorsque la société cautionnée était en cours de formation et qu'elle n'a pas été immatriculée au registre du commerce et des sociétés.
19. La nullité du cautionnement en cas de novation du contrat de prêt principal par changement de débiteur
La novation du contrat de prêt principal par changement de débiteur intervient notamment en cas de fusion de sociétés entre elles ou quand juridiquement la personne morale cautionnée est modifiée.
Les conditions des crédits bancaires accordés à des sociétés peuvent être modifiées ou reprises par d'autres sociétés mais les cautions doivent alors, à nouveau, se réengager comme telles, au profit de la nouvelle entité le cas échéant.
En effet, les cautions doivent connaitre et accepter les modifications des conditions du prêt principal dont le remboursement est garanti par le cautionnement.
La jurisprudence de la cour de cassation considère que lorsque "les conditions du prêt ayant été modifiées postérieurement à la souscription de l'engagement de caution de Mme X..., celle-ci devait les accepter et que la connaissance qu'elle pouvait en avoir en sa qualité de dirigeant de la société débitrice ne suffisait pas à caractériser une telle acceptation, la cour d'appel a violé le texte susvisé [ancien article 2292 du code civil]» (Cour de cassation, chambre commerciale, 24 juin 2014, N° de pourvoi: 13-21074)
La sanction du défaut de réitération du consentement est la nullité du cautionnement.
Ainsi, le changement de société cautionnée, juridiquement appelée la novation du contrat de prêt principal par changement de débiteur ou tout changement des conditions de remboursement du contrat de prêt principal peut donner lieu à une remise en cause de la validité de l'acte de garantie permettant à la banque de demander à la caution un paiement.
Dans certains cas, cet argument se recoupe avec celui du défaut de formule légale manuscrite de la part de la caution.
20. Libération de la caution en cas d’irrespect de la procédure d’information préalable antérieure au paiement de la dette de la banque par une société de garantie
Pour mémoire, les banques disposent de garantie institutionnelle, c'est à dire par des sociétés spécialisées en garantie.
Ainsi, par exemple, le Crédit Logement est une société privée de financement spécialisée dans la garantie de remboursement de prêts immobiliers au bénéfice des banques.
Cette société constitue donc une sureté supplémentaire pour les banques lors de la souscription d’un emprunt bancaire.
Autrement dit, le Crédit Logement est une caution de remboursement de crédits immobiliers au profit des banques.
Cet organisme peut venir en doublon d’autres cautionnements personnels et solidairement donnés par des personnes physiques en garantie de remboursement de crédits immobiliers.
En tant que caution professionnelle, le Crédit Logement est tributaire de plusieurs obligations vis-à-vis de sa cocaution (aussi appelée cofidéjusseur).
Le Crédit Logement doit notamment avertir les cocautions avant tout paiement qu’elle s’apprête à réaliser à la banque.
Autrement dit, le Crédit Logement ne doit pas effectuer de paiement à l’insu de la caution qui n’est pas en mesure de contester l’exigibilité de la créance.
La caution peut en effet contester notamment le capital restant dû ou l’irrégularité de la déchéance du terme de la banque.
Dès lors, le Crédit Logement doit toujours pouvoir être en mesure de justifier de l'existence de courriers envoyés en recommandé avec accusé de réception antérieurement à son paiement à la caution ou à l’emprunteur.
Il convient enfin de souligner que les documents que doit produire le Crédit Logement doivent indiquer expressément qu'en l'absence de régularisation des échéances de prêt impayées, dans un délai fixé, il sera amené à rembourser en lieu et place de l'intégralité du crédit.
La caution peut donc utilement se défendre dans le cadre de contentieux avec le Crédit Logement sur le fondement du non-respect de la procédure de règlement de la banque par ce dernier.
Le Cabinet Bem a ainsi obtenu l’annulation d’un recours du Crédit Logement contre une caution d’un prêt immobilier et des dommages et intérêts d’un montant de 10.000€ au profit de la caution le 6 mai 2020 par le Tribunal judiciaire de Lorient.
21- L'absence d'exigibilité de la dette de la caution faute de déchéance du terme du prêt cautionné valablement prononcée
En principe, la déchéance du terme d’un prêt, résultant du prononcé de la liquidation judiciaire du débiteur principal, n’a d’effet qu’à l’égard de celui-ci et ne peut être étendue à la caution, sauf clause contraire à l’article L 643-1 du code de commerce.
Sur ce fondement, une caution peut utilement contester l’exigibilité de la dette par son créancier en raison du défaut de déchéance du terme du prêt prononcée valablement.
Le 23 septembre 2021, la Cour d'appel d’Aix-en-Provence a jugé que l’engagement de la caution à garantir le remboursement d’un prêt ne permet pas d’étendre à la caution la déchéance du terme encourue par le débiteur principal. (Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-3, 23 septembre 2021, n 19/03743)
En l’espèce, une société avait souscrit auprès de la société d’une autre société de crédit-bail un contrat de crédit-bail, portant sur un engin professionnel.
Le gérant de la société s’était porté caution solidaire des engagements au titre de ce contrat de crédit-bail.
Par jugement, le tribunal de commerce avait ouvert une procédure de liquidation judiciaire de la société emprunteuse.
Le contrat de crédit-bail n’avait pas été résilié avant l’ouverture de la procédure collective de la société débitrice principale et l’acte de cautionnement ne contenait aucune clause prévoyant l’exigibilité anticipée liée à l’ouverture d’une liquidation judiciaire de la société.
En effet, l’acte de cautionnement que l’acte signé par la caution ne comportait aucune clause sur l’exigibilité anticipée liée à l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre du locataire.
Le crédit-bailleur avait mis en demeure la caution de régler la dette puis l’avait assigné en paiement devant le tribunal de commerce.
Cependant, la caution s’est défendue en invoquant le fait que la déchéance du terme prononcée à l’encontre de la société débitrice ne lui était pas personnellement opposable.
Ainsi, les juges ont débouté le crédit-bailleur en considérant que la créance dont se prévalait la société de crédit-bail à l’encontre de la caution n’était pas exigible.
Les juges ont précisé que la seule déclaration de créance au passif de cette procédure collective n’emportait pas exigibilité anticipée des sommes à l’encontre de la caution.
Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire ne rend donc pas les créances non échues exigibles.
A défaut d’exigibilité anticipée du crédit-bail litigieux antérieurement à l’ouverture de la procédure collective, la résolution du contrat n’a donc jamais été prononcée à l’égard de la caution qui n’a donc rien à payer.
Il résulte de cette décision que les cautions peuvent utilement se défendre contre leur créanciers suite à l’ouverture d’une procédure collective de l’entreprise garantie.
En pratique, il convient de garder en mémoire que les cautions doivent toujours être mises en demeure de régler le montant des sommes dues au titre du contrat de crédit suite à l’ouverture d’une procédure collective à l’égard de la société emprunteuse puisque l’exigibilité anticipée du prêt n’est pas opposable à la caution.
Il ressort de ce qui précède que la caution peut se défendre utilement afin de tenter soit de limiter soit d’anéantir son engagement envers la banque.
Compte tenu du caractère de plus en plus technique de ce type de litige, l’assistance d’un avocat expert en cautionnement bancaire est devenue indispensable afin que les droits et les intérêts des cautions soient défendus avec la garantie de ne pas être passé à côté d'un argument
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Anthony Bem
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