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Cadres dirigeants : indemnité de golden parachute de 981 100 euros d’une Directrice des Relations Extérieures réduite à 1 000 euros (c. cass. 4 mars 2020, n°18-20531)

Publié le 03/05/2020 Vu 4 805 fois 0
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Le versement d'une indemnité forfaitaire de trois années de salaire annuel net en cas de départ de la salariée constitue une clause pénale.

Le versement d'une indemnité forfaitaire de trois années de salaire annuel net en cas de départ de la salar

Cadres dirigeants : indemnité de golden parachute de 981 100 euros d’une Directrice des Relations Extérieures réduite à 1 000 euros (c. cass. 4 mars 2020, n°18-20531)

Le versement d'une indemnité forfaitaire de trois années de salaire annuel net en cas de départ de la salariée à l'initiative de l'employeur avait pour objet de conférer à la salariée une garantie de sécurité dans son emploi et de sanctionner l'employeur en cas de rupture du contrat et constituait une clause pénale.

1) Faits et procédure

Selon l'arrêt du 31 mai 2018 de la Cour d’appel de Paris, Mme H... a été engagée par la société GDP Vendôme (la société), à compter du 2 septembre 2002, en qualité de Directrice des relations extérieures.

Le 17 février 2014, la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

Par jugement du 4 mai 2015, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté la salariée de ses demandes.

Le 14 septembre 2015, la salariée a été déclarée inapte à son poste et licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 4 décembre 2015.

2) Enoncé du moyen

La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à ce que la société soit condamnée à lui verser la somme de 981 100,31 euros à titre d'indemnité de départ et de condamner cette dernière à lui verser à ce titre la seule somme de 1 000 euros.

La salariée plaidait :

« 1°/ qu' il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; que suivant l'article 8 de l'avenant au contrat de travail du 12 janvier 2006, tel que modifié par l'avenant en date du 30 avril 2010, les parties avaient convenu que : « Quel que soit le motif de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur, sauf démission non équivoque de la salariée, la société GDP Vendôme s'engage à verser à la fin du contrat de travail à Mme H... J..., une indemnité forfaitisée à trois années de salaire annuel net moyen. Le salaire annuel net moyen correspond à la moyenne de tous salaires nets et accessoires perçus les trois années précédant la rupture. Il est expressément convenu que cette indemnité qui tient compte notamment des investissements, particulièrement en termes de compétence et de crédibilité, consentie par Mme J... H... au profit de GDP Vendôme, revêt une finalité strictement indemnitaire et ne constitue par une clause pénale. Par conséquent, les parties reconnaissent que l'indemnité susvisée est insusceptible de révision en vertu de l'article 1152 du code civil ou de tout article qui viendrait lui substituer postérieurement à la signature du contrat » ; qu'en affirmant, pour débouter Mme H... de sa demande, que ladite clause avait pour objet de conférer à la salariée une garantie de sécurité dans son emploi et de sanctionner l'employeur en cas de rupture, en sorte qu'elle constituait une clause pénale, cependant qu'il résultait de cette clause claire et précise que l'indemnité fixée par les parties constituait une prime à versement différé lors de la fin du contrat de travail fixée en contrepartie de l'investissement, des compétences et de la crédibilité de Mme H... et ne sanctionnait aucune obligation contractuelle à laquelle l'employeur se serait engagée, la cour d'appel, qui a dénaturé la clause litigieuse, a violé le principe susvisé, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;

2°/ que, dans ses écritures, Mme H... avait précisément expliqué, sans être contestée, que l'indemnité de départ, qui avait été confirmée contractuellement par deux fois, avait pour objet de rémunérer de manière différée son investissement et sa crédibilité et notamment, la mise à disposition de son carnet d'adresses qu'elle avait constitué au terme de nombreuses années de travail et dont la Société GDP Vendôme avait largement bénéficié, ce qui était confirmé, d'une part, par le contexte dans lequel ladite clause avait été insérée, dès lors que l'indemnité de départ avait été insérée dans le contrat de travail par avenant en date du 12 janvier 2006 prévoyant par ailleurs une augmentation notable de sa rémunération, une mise à disposition de moyens importants pour exercer ses fonctions, l'octroi du statut de cadre dirigeant ce qui avait été confirmé par avenant en date du 30 avril 2010 lequel poursuivait l'amélioration des conditions de travail et d'autre part, par la circonstance que les relations de travail s'étaient brusquement dégradées à partir du moment où la société GDP Vendôme n'a plus eu besoin de la crédibilité et du réseau social de Mme H... ; qu'en affirmant que la clause litigieuse constituait une garantie de sécurité de l'emploi et ne concernait pas l'exécution du contrat, sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, quelle était la cause de cet engagement et quelle était l'économie générale du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;

3°/ qu'en affirmant de manière péremptoire, que la clause visée par l'article 8 du contrat de travail avait pour objet de conférer à la salariée une garantie de sécurité dans son emploi, cependant que dans ses écritures, la société GDP Vendôme avait seulement soutenu, au mépris des termes précis de l'article 8 du contrat de travail, qu'était en cause une indemnité contractuelle de licenciement et n'a jamais, à aucun moment, fait valoir, implicitement ou explicitement, que ladite clause constituait une garantie d'emploi ou visait à conférer à Mme H... une garantie de sécurité d'emploi, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

4°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en retenant, et sans provoquer préalablement les observations des parties à cet égard, que la clause visée par l'article 8 du contrat de travail avait pour objet de conférer à la salariée une garantie de sécurité dans son emploi, cependant qu'il ne résultait ni des écritures des parties ni des énonciations de l'arrêt qu'il avait été soutenu que la clause litigieuse constituait une garantie de sécurité de l'emploi, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties à cet égard, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

5°/ qu'en affirmant de manière péremptoire, que la clause visée par l'article 8 du contrat de travail avait pour objet de conférer à la salariée une garantie de sécurité dans son emploi et de sanctionner l'employeur en cas de manquement à cette obligation en sorte qu'elle constituait une clause pénale, cependant que ladite clause ne comportait, ni explicitement, ni implicitement, d'engagement de maintien de l'emploi et ne précisait à aucun moment que l'indemnité forfaitaire avait pour objet de sanctionner la violation de ce prétendu engagement, la cour d'appel a derechef violé le principe suivant lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;

6°/ que la clause de garantie d'emploi prévue contractuellement ne constitue une clause pénale que si l'employeur s'est engagé à maintenir l'emploi pendant une certaine période et que l'indemnité contractuellement prévue a précisément pour objet de sanctionner le manquement à cet engagement ; qu'en affirmant que la clause visée par l'article 8 du contrat de travail avait pour objet de conférer à la salariée une garantie de sécurité dans son emploi et de sanctionner l'employeur en cas de manquement à cette obligation en sorte qu'elle constituait une clause pénale, sans rechercher, ni préciser quelle était l'étendue de l'engagement de maintien de l'emploi et sans rechercher si la sanction était stipulée en vue de sanctionner la méconnaissance de cet engagement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur, ensemble l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;

7°/ qu'en se bornant à affirmer, pour réduire la prétendue pénalité à la somme de 1 000 euros que celle-ci apparaissait manifestement excessive au regard de la somme versée au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à justifier le caractère manifestement excessif du montant de la clause et sans se fonder sur la disproportion manifeste entre l'importance du préjudice effectivement subi et le montant contractuellement fixé, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;

8°/ qu'en visant, pour affirmer que la pénalité était excessive, le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement versée à Mme H..., après avoir considéré que l'indemnité prévue par l'article 8 du contrat de travail avait pour objet de sanctionner, non pas le préjudice résultant de la rupture du contrat de travail, mais le préjudice résultant de la violation par l'employeur de son engagement de maintien de l'emploi, et ce faisant, la perte de chance de conserver son emploi, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a derechef violé l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;

9°/ qu'en visant, pour dire que la pénalité était manifestement excessive, le montant de l'indemnité conventionnelle versée au jour du licenciement, la cour d'appel, qui ne s'est pas placée au jour où elle statuait pour apprécier le caractère prétendument excessif de la pénalité, a violé l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;

10°/ que la réduction de la pénalité ne peut avoir pour effet de porter celle-ci à un niveau inférieur à la compensation du préjudice réel ; qu'en réduisant d'office la pénalité à la somme de 1 000 euros sans jamais rechercher quel était le préjudice réel subi par Mme H... et sans préciser que la somme ainsi réduite était conforme au préjudice réel subi par cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;

11°/ que nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ; qu'en réduisant d'office la pénalité à la somme de 1 000 euros sans, à aucun moment, rechercher si le comportement déloyal de la société GDP Vendôme, qui avait confirmé par deux fois que la clause litigieuse ne constituait pas une clause pénale, avait procédé au harcèlement moral caractérisé de Mme H... à partir du moment où la crédibilité et le carnet d'adresse de cette dernière ne lui étaient plus utile afin de contraindre celle-ci à prendre l'initiative de la rupture au point tel que celle-ci a été déclarée inapte à son travail, n'était pas de nature à la priver de la possibilité de solliciter la réduction de la pénalité due, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé, ensemble les dispositions de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur. »

3) Arrêt de la Cour de cassation du 4 mars 2020

La cour d'appel de Paris, procédant à l'interprétation, que son ambiguïté rendait nécessaire, de la clause du contrat prévoyant le versement d'une indemnité forfaitaire de trois années de salaire annuel net en cas de départ de la salariée à l'initiative de l'employeur, a retenu, sans méconnaître les termes du litige, ni violer le principe de la contradiction, et procédant à la recherche prétendument omise, que cette clause avait pour objet de conférer à la salariée une garantie de sécurité dans son emploi et de sanctionner l'employeur en cas de rupture du contrat, et pu décider qu'elle constituait une clause pénale.

La Cour de cassation conclut que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a estimé son montant manifestement excessif au regard du préjudice subi et en a réduit le montant.

 4) Analyse

Cette décision est très dure pour la salariée, Directrice des relations Extérieures.

La Cour de cassation a considéré que cette indemnité de 3 ans de salaires nets constituait une clause pénale et était d’un montant excessif.

En l’occurrence, la salariée avant 13 ans d’ancienneté.

Par avenant du 30 avril 2010, les parties avaient convenu que : « Quel que soit le motif de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur, sauf démission non équivoque de la salariée, la société GDP Vendôme s'engage à verser à la fin du contrat de travail à Mme H... J..., une indemnité forfaitisée à trois années de salaire annuel net moyen. Le salaire annuel net moyen correspond à la moyenne de tous salaires nets et accessoires perçus les trois années précédant la rupture. Il est expressément convenu que cette indemnité qui tient compte notamment des investissements, particulièrement en termes de compétence et de crédibilité, consentie par Mme J... H... au profit de GDP Vendôme, revêt une finalité strictement indemnitaire et ne constitue par une clause pénale. Par conséquent, les parties reconnaissent que l'indemnité susvisée est insusceptible de révision en vertu de l'article 1152 du code civil ou de tout article qui viendrait lui substituer postérieurement à la signature du contrat »

Elle avait saisi le conseil de prud’hommes en résiliation judiciaire en février 2014. Elle sera licenciée pour inaptitude en septembre 2015.

La Cour de cassation considère que « cette clause avait pour objet de conférer à la salariée une garantie de sécurité dans son emploi et de sanctionner l'employeur en cas de rupture du contrat, et [la Cour d’appel a] pu décider qu'elle constituait une clause pénale ».

Il est recommandé aux cadres dirigeants de négocier une indemnité de départ qui soit raisonnable sans être excessive, faute de quoi, ils risquent de tout perdre.

Cet arrêt n’est pas publié au bulletin de la Cour de cassation.

 Source : legifrance

 C. cass. 4 mars 2020, n°18-20531

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000041745286&fastReqId=256001278&fastPos=1

Frédéric CHHUM avocat et membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)

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Maître Frédéric CHHUM est membre du conseil de l'ordre des avocats de Paris (2019-2021). Il possède un bureau secondaire à Nantes et à Lille.

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