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Non-concurrence (secteur start up) : une chargée de clientèle de PAYTOP obtient le paiement de sa clause de non concurrence (CA Paris 21 dec. 2023)

Publié le 23/12/2023 Vu 785 fois 0
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En l’absence de renonciation par l’employeur à une clause de non-concurrence, le paiement de la contrepartie est dû.

En l’absence de renonciation par l’employeur à une clause de non-concurrence, le paiement de la contrepar

Non-concurrence (secteur start up) : une chargée de clientèle de PAYTOP obtient le paiement de sa clause de non concurrence (CA Paris 21 dec. 2023)

Il en va de même lorsque la renonciation intervient au delà des délais prévus contractuellement ou conventionnellement.

 

C’est ce que plaidait la salariée chargée de clientèle de cette start up.

 

1)      Faits et procédure

 

La société Paytop est une start-up française créée en 2012 et spécialisée dans les services

liés au paiement en ligne à l’international. Elle emploie plus de 10 salariés et applique la

convention collective dite SYNTEC.

 

Mme X a été engagée par la société Paytop par contrat à durée indéterminée du 1er juin 2017, en qualité de chargée de clientèle, statut cadre. Elle percevait à ce titre une rémunération fixe de 2.333,33 euros bruts par mois, à laquelle s’ajoutait une rémunération variable annuelle de 2.000 euros bruts.

 

Par courrier remis en main propre le 5 octobre 2018, Mme X a donné sa démission en demandant à ce que son préavis d'une durée de trois mois soit réduit à un mois.

 

Par courriel du 19 octobre 2018, sa supérieure hiérarchique a accédé partiellement à sa demande en réduisant son préavis à un mois et dix jours. Il lui était alors précisé qu'elle serait libérée de ses fonctions à compter du 16 novembre 2018 au soir.

 

Par courriel du vendredi 2 novembre 2018, Mme X a informé sa supérieure qu'elle n'effectuerait pas la totalité du préavis prévu et qu'elle quittait son poste le soir même.

 

Par courrier du lundi 5 novembre 2018, la société Paytop a indiqué à Mme X qu’elle renonçait à l’application de la clause de non-concurrence prévue dans son contrat de travail.

 

Par courrier du 18 décembre 2018, Mme X a dénoncé son solde de tout compte, au motif de l’absence de paiement de la clause de non-concurrence.

 

Par courrier du 19 décembre 2018, la société Paytop lui a répondu que la renonciation à la clause de non-concurrence avait été faite le 05 novembre 2018, soit avant la date de la fin du préavis convenue entre les parties et fixée au 16 novembre 2018. Elle a donc refusé de modifier le solde de tout compte de Mme X.

 

Considérant que la clause de non-concurrence avait été levée tardivement et que le paiement de la contrepartie financière afférente lui était dû, Mme X a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 04 février 2019.

 

Par jugement contradictoire du 05 juin 2020, le conseil de prud’hommes de Paris a :

 

- débouté Mme X de l'ensemble de ses demandes, et l’a condamnée au paiement des entiers dépens,

- débouté la SAS Paytop de sa demande reconventionnelle et de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

Le conseil a considéré que la renonciation à la clause de non-concurrence par l’employeur était bien intervenue dans le délai contractuel qui s’achevait le 16 novembre 2018.

 

Par déclaration notifiée par le RPVA le 10 juillet 2020, Mme X a interjeté appel de cette décision.

 

2) Arrêt du 21 décembre 2023 de la Cour d’appel de Paris

 

 

Dans son arrêt du 21 décembre 2023, la Cour d’appel de Paris, statuant publiquement, par arrêt contradictoire :

 

. infirmele jugement entrepris ;

 

Statuant à nouveau et y ajoutant :

 

. condamne la société Paytop à payer à Mme X les sommes suivantes :

- 19.447,66 euros bruts au titre de la contrepartie financière à la clause de non concurrence

pour la période du 17 novembre 2018 au 16 novembre 2019 ;

- 1.944,77 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

. dit que les intérêts légaux courent à compter de la convocation de la société devant le

bureau de conciliation ;

. condamne Mme X à payer à la société Paytop la somme de 1.060,60 euros au

titre de l’indemnité compensatrice de préavis, avec intérêts au taux légal à compter de la

date du jugement et capitalisation des intérêts dus pour une année entière ;

. ordonne la compensation entre les sommes dues par les parties ;

. ordonne à la société Paytop de remettre à Mme X un bulletin de paie récapitulatif

conforme à la décision dans le délai d’un mois de sa notification ;

. dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure

civile ;

. condamne la société Paytop au paiement des dépens.

  

2.1)            Sur la levée de la clause de non-concurrence

 

En l’absence de renonciation par l’employeur à une clause de non-concurrence, le paiement de la contrepartie est dû. Il en va de même lorsque la renonciation intervient au delà des délais prévus contractuellement ou conventionnellement.

 

Le contrat de travail liant les parties prévoit une clause de non-concurrence de douze mois à compter de la cessation dudit contrat et la possibilité pour l’employeur d’y renoncer, cette renonciation devant intervenir : «au cours des quinze jours suivant la notification de la rupture du présent contrat au salarié ou par la salariée et en tout état de cause au plus tard à la date du départ effectif du salarié de la société ».

 

Les parties s’opposent sur l’interprétation de cette clause, la salariée soutenant que son employeur avait jusqu’au 20 octobre 2018 pour se libérer et la société faisant valoir au contraire qu’elle disposait d’un délai jusqu’à la fin du préavis, date du départ effectif de la salariée.

 

Il ressort de la rédaction de cette clause, qui est claire et précise et qui ne donne pas lieu à interprétation, que l’employeur disposait d’un délai de 15 jours à compter de la notification de sa démission par la salariée pour renoncer à l’obligation de non-concurrence et que, si le départ effectif de la salariée se situait à l’intérieur de ce délai (cas d’une dispense d’effectuer le préavis ou de réduction du préavis à moins de quinze jours), la société devait renoncer au plus tard à la date de ce départ effectif.

 

Le délai de 15 jours était ainsi assorti d’une limite intangible, à savoir la date du départ effectif de la salariée de l’entreprise avant son écoulement.

 

Dans le cas présent, Mme X ayant notifié sa démission à la société Paytop par lettre remise en main propre le 5 octobre 2018, c’est à cette date que le délai de 15 jours imparti à l’employeur pour renoncer à la clause de non-concurrence a débuté pour expirer le 20 octobre 2018, puisqu’à cette date la salariée était toujours présente en son sein.

 

Ainsi contrairement à ce qui est soutenu par l’intimée, ladite clause ne lui donnait pas une possibilité de renonciation jusqu’à la date prévue de fin du préavis au 16 novembre 2018 ou jusqu’à la date du départ effectif de la salariée puisque celui-ci est intervenu postérieurement à l’expiration du délai de 15 jours.

 

La société n’ayant levé la clause de non-concurrence que le 5 novembre 2018, cette renonciation a été faite au-delà du délai imparti et dès lors Mme X doit bénéficier du paiement de la contrepartie financière fixée dans le contrat, la société ne produisant aucune pièce pour établir que son ancienne salariée n’a pas respecté la clause de non-concurrence à laquelle elle était soumise.

 

Par ailleurs, les développements de la société sur la mauvaise foi de la salariée et son abandon de poste au cours du préavis sont inopérants à la soustraire à sa propre obligation de payer la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, étant au demeurant relevé que le départ effectif de la salariée en cours de préavis est en tout état de cause postérieur à l’expiration du délai de 15 jours.

 

Aux termes de l’article 10 du contrat de travail, l’indemnité de non-concurrence correspond à «deux-tiers (2/3) d’une (1) année de rémunération brute incluant salaire fixe, partie variable et primes et avantage en nature, calculée sur la base des douze derniers précédant la rupture du contrat de travail (incluant les indemnités de congés payés). A compter de la cessation du présent contrat, la Société versera la contrepartie financière à la Salariée chaque mois et pendant toute la durée de l’engagement de non-concurrence ».

 

Mme X expose sans être contredite qu’entre novembre 2017 et octobre 2018 (12 derniers mois précédant la rupture du contrat de travail), elle a perçu une rémunération brute totale (incluant la rémunération fixe et variable, les primes et avantage en nature et les congés payés) de 29.171,49 euros bruts et que la contrepartie financière afférente à la clause de non-concurrence correspondant à 2/3 de cette somme, elle doit percevoir 19.447,66 euros bruts à ce titre.

 

Enfin, la contrepartie financière de l’obligation de non-concurrence ayant la nature d’une indemnité compensatrice de salaires, elle ouvre droit à congés payés.

 

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a rejeté cette demande et la société est condamnée à payer à l’appelante cette somme au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence pour la période du 17 novembre 2018 au 16 novembre 2019, outre la somme de 1.944,77 euros bruts au titre des congés payés afférents.

 

2.2)            Sur la demande reconventionnelle de la société

 

La société fait valoir à juste titre que la salariée ayant quitté son poste avant la fin du préavis fixé d’un commun accord au 16 novembre 2018, elle est redevable d’une indemnité, peu important, contrairement à ce qu’elle soutient, l’absence de preuve d’un préjudice.

 

Il sera donc fait droit à la demande en paiement de la somme de 1.060,60 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis.

 

La cour ordonne la compensation entre les sommes dues par les parties.

 

2.3) Sur les demandes accessoires

 

La société supportera les dépens de première instance et d’appel.

 

En revanche, il n’est pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles.

 

Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)

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A propos de l'auteur
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Maître Frédéric CHHUM est membre du conseil de l'ordre des avocats de Paris (2019-2021). Il possède un bureau secondaire à Nantes et à Lille.

Tél : 01 42 56 03 00 (Paris) ou 02 28 44 26 44 (Nantes) ou 03 20 13 50 83 (Lille).

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