CA ROUEN, 15 décembre 2021, RG n° 21/03206 *
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de ROUEN rappelle les obligations pesant sur la CPAM en cas de saisine d’un CRRMP dans le cadre de la reconnaissance d’une maladie professionnelle.
Il était question, en l’espèce, d’une salariée qui avait établi une déclaration de maladie professionnelle pour une tendinite du poignet droit que la CPAM a pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels après avis d’un premier CRRMP.
L'employeur a contesté cette décision devant les juridictions de sécurité sociale. Dans le cadre de ce recours, un nouveau CRRMP a été saisi.
En la matière, dans sa rédaction applicable en la cause, l'article D. 461-29 du CSS prévoit que le dossier examiné par le CRRMP doit comprendre notamment un avis motivé du médecin du travail portant notamment sur la maladie et la réalité de l'exposition de celle-ci à un risque professionnel.
Conformément à l’article D. 461-34 du même code, le dossier mentionné à l'article susvisé est constitué par la CPAM.
Sur le fondement de ces dispositions, il ressort d’une jurisprudence constante que l’absence de l’avis du médecin du travail rend irrégulier l’avis du CRRMP, de sorte que l’employeur est en droit de solliciter l’inopposabilité de la décision de prise en charge prisée sur la base dudit avis (Cass. civ. 2ème, 23 janvier 2014, n° 12-29.420).
La Cour de cassation l’a encore rappelé récemment (Cass. civ. 2ème, 7 janvier 2021, n° 19-18.981).
La seule possibilité pour la CPAM de pallier cette absence est de démontrer qu'elle a été dans l'impossibilité matérielle de l'obtenir avant transmission du dossier au CRRMP.
En l’espèce, la Cour d’appel de ROUEN reprend cette jurisprudence et constate que l’avis du second CRRMP saisi sur son instruction ne contenait pas l’avis motivé du médecin du travail.
La CPAM soutenait avoir sollicité cet avis dès qu'elle avait été destinataire de l'arrêt de la Cour ordonnant la saisine d'un nouveau CRRMP. Cependant, la Cour constate que l'organisme de sécurité sociale était dans l'incapacité de justifier d'une quelconque démarche en vue d'obtenir cet avis ni, par conséquent, d'une impossibilité de se le procurer.
De plus, la Cour note que la CPAM aurait dû être déjà en possession de cet élément puisqu'elle avait saisi un premier CRRMP. Or l'examen de l'avis de ce premier CRRMP révèle qu'il ne figurait déjà pas dans le dossier qui lui avait été adressé.
La Cour déclare donc inopposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie déclarée par l'un de ses salariés.
Il est intéressant de noter que la présence d’un avis motivé du médecin du travail est également obligatoire dans le cadre de la saisine d’un CRRMP ordonnée par une décision de justice et non seulement dans le cadre d’une première saisine faite au cours de la procédure d’instruction d’une maladie professionnelle.
Cet avis a d’ailleurs une importance primordiale en vue de démontrer ou non le caractère professionnel de la pathologie déclarée par le salarié.
En dépit de cette importance, on notera que la nouvelle rédaction de l’article D. 461-29 du code de la sécurité sociale, applicable depuis le 1er décembre 2019, ne fait plus obligation à la CPAM de solliciter l’avis du médecin du travail. Il ne s’agirait que d’une simple faculté.
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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.