La question de la compétence et de la loi applicable à un contrat de travail international : deux questions différentes

Publié le 25/02/2024 Vu 664 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

Par cet arrêt, la Cour d'appel est amenée à apprécier la compétence des juridictions prud’homales françaises dans le cadre d’un litige international, auquel s’ajoutait la question de la loi applicable

Par cet arrêt, la Cour d'appel est amenée à apprécier la compétence des juridictions prud’homales franÃ

La question de la compétence et de la loi applicable à un contrat de travail international : deux questions différentes
Infographie_CA_COLMA.pdf

CA COLMAR, 08 septembre 2023, RG n° 23/00222 *

Par cet arrêt, la Cour d'appel de COLMAR est amenée à apprécier la compétence des juridictions prud’homales françaises dans le cadre d’un litige international, auquel s’ajoutait la question de la loi applicable.

En la matière, il existe une règlementation spécifique au niveau du droit de l’Union européenne.

Plus particulièrement, sur la compétence, il convient de se reporter au Règlement n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, dit Règlement Bruxelles I bis.

L’article 21 dudit règlement prévoit qu’un employeur domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait :

a) devant les juridictions de l’État membre où il a son domicile ;
ou
b) dans un autre État membre :

i) devant la juridiction du lieu où ou à partir duquel le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant la juridiction du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail ;
ou
ii) lorsque le travailleur n’accomplit pas ou n’a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant la juridiction du lieu où se trouve ou se trouvait l’établissement qui a embauché le travailleur.

L’article 23 précise qu’une clause attributive de juridiction ne peut déroger aux compétences susvisées, hormis si :

1) elle est conclue postérieurement à la naissance du différend ;
ou
2) elle permet au travailleur de saisir d’autres juridictions que celles indiquées précédemment.

S’agissant de la question de la loi applicable, on se reportera cette fois-ci au Règlement n° 593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, dit Règlement Rome I.

Sur l’articulation de la question de la juridiction compétente et la loi applicable, la Cour de cassation a récemment rappelé que l'appréciation de cette compétence n'est pas subordonnée à la détermination préalable de la loi applicable au contrat de travail (Cass. soc., 17 janvier 2024, n° 22-16.107).

Telle était la problématique qui était soulevée dans l’arrêt commenté.

En l’espèce, il était question d’un salarié qui a été embauché par une société de droit allemand en qualité d'ingénieur projet dans le domaine automobile. Le salarié a été mis à disposition d'une société française jusqu'à la crise sanitaire de 2020, moment où il a été mis en activité partielle.

Après avoir été placé en arrêt de travail, le salarié a saisi le Conseil de prud'hommes de Strasbourg pour faire valoir des irrégularités quant à sa situation.

En cours de procédure, la question de la compétence des juridictions françaises s'est posée.

Après avoir rappelé des textes précités, la Cour d'appel note que le salarié a conclu un contrat de travail avec une société dont le siège est situé en Allemagne, ce qui permet de retenir la compétence des juridictions allemandes en application du premier critère de l'article 21.

Cependant, le salarié n'a jamais travaillé en Allemagne. En effet, dès son embauche, il a été mis à la disposition d'une entreprise française située dans le département du Doubs jusqu'au 31 mars 2020, avant d'être placé en chômage partiel puis en arrêt de travail. Les juridictions françaises se trouvent donc également compétentes en application du deuxième critère de l'article 21.

Ainsi, selon la Cour, en l'absence de hiérarchisation entre les différents critères de compétence, le demandeur pouvait donc saisir au choix les juridictions allemandes ou les juridictions françaises.

Par ailleurs, si le contrat de travail contient une clause attributive de compétence à la juridiction de Karlsruhe, cette clause est toutefois sans incidence sur la compétence internationale et n'est donc pas opposable au requérant.

Enfin, la loi applicable au litige n'est pas un critère de compétence prévu par le règlement européen.

Dès lors, elle juge que c'est à tort que le conseil de prud'hommes s'est déclaré incompétent au profit des juridictions allemandes au motif que la loi allemande était applicable au litige.

Cet arrêt souligne le raisonnement à tenir en présence d’un contentieux international :  on détermine, en premier lieu, la juridiction compétence avant de s’intéresser, dans un second temps, à la loi applicable, avant, enfin, de trancher le litige au fond.

Maître Florent LABRUGERE

https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/ 

Avocat au Barreau de LYON

Droit du travail – Droit de la sécurité sociale

N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

Vous avez une question ?

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

A propos de l'auteur
Blog de Blog de Maître Florent LABRUGERE

Bienvenue sur le blog de Blog de Maître Florent LABRUGERE

Rechercher
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles