Depuis ces dernières années, nombreuses sont les entreprises, les commerçants, les artisans et les professions libérales qui ont été démarchées par des sociétés proposant des référencements sur un annuaire en ligne, afin d'améliorer leur visibilité sur internet, alors que telles promesses sont purement chimériques.
En effet, une fois rétribuée, ces sociétés se font silencieuses et ne répondent ni aux relances par téléphone, ni aux mises en demeure par écrit.
En revanche, si la victime refuse de régler ce qui lui est demandé, car il a deviné avoir été victime d’une manœuvre peu scrupuleuse, elle subit relances et menaces en tout genre.
Sans rentrer dans davantage de détails, on se contentera d'évoquer un très intéressant arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 janvier 2013 qui a statué sur une escroquerie aux faux annuaires professionnels.
RÉSUMÉ DES FAITS
Deux prévenus, une société et son gérant, sont poursuivis pour avoir trompé des commerçants, des administrations et des professionnels libéraux au moyen de manœuvres frauduleuses.
Pour ce faire, ils les ont prospecté et leur ont fait croire qu'ils renouvelaient leur abonnement aux « PAGES JAUNES ». Une fois les victimes conquises, ils leur ont remis un document intitulé « demande d'inscription » lequel avait une ressemblance apparente avec les Pages jaunes au premier examen superficiel.
En effet, le document :
- contenait un intitulé en gros caractères sur un bandeau jaune "Annuaire Pro" ;
- des éléments de base étaient pré-remplis et laissait supposer qu'il ne s'agissait que d'une simple vérification de données déjà existantes ;
- le prix indiqué de l'abonnement mensuel était identique ou presque identique au prix annuel de l'abonnement des « PAGES JAUNES »
La supercherie était telle que les victimes ont cru qu’il s’agissait d’un document officiel de la société PAGES JAUNES, ce qui les a déterminés à remettre aux prévenus le prix de l’abonnement demandé.
La duperie découverte, les prévenus ont été traduits en justice pour escroquerie.
PROCÉDURE
Bien qu’ayant relevé les stratagèmes sus indiqués des prévenus, la Cour d’appel de COLMAR a néanmoins refusé de les retenir comme éléments significatifs d'une manœuvre participant au mode opératoire global d’une escroquerie, car ne reposant que sur une dizaine de victimes sur le millier de plaignants recensés au cours de l'enquête. De fait, la Cour d’appel a prononcé la relaxe des prévenus.
Mais la Cour de cassation n’a pas été de cet avis et a cassé l’arrêt au motif que les manœuvres réalisées par les prévenus, consistant à créer une confusion, dans l'esprit des clients prospectés, avec la société Pages jaunes, pour leur faire souscrire des bons de commande auprès de la société poursuivie, étaient caractérisées.
QUE RETENIR DE CET ARRÊT ?
L'article 313-1 du Code pénal définit le délit d'escroquerie comme le fait de tromper une personne par l'emploi de manœuvres frauduleuses afin de la déterminer à remettre des fonds à son préjudice.
La Cour de cassation range ainsi au titre de l’escroquerie tout agissement cultivant le risque de confusion dans l’esprit d’une personne ou bien toute erreur sur l'identité du cocontractant, et des services qu'il fournit.
Désormais toute société démarchant un professionnel et l’induisant en erreur sur son identité se rend coupable d’escroquerie et doit craindre d’être poursuivie pénalement.